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Syndicat Sud Travail Affaires sociales du Ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale
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Sud Travail Affaires sociales
Rapport BESSIERE : l'inspection du travail
--> Rapport à Monsieur le Ministre Délégué aux Relations du Travail - Janvier 2005
Conformément à la mission que vous avez bien voulu me confier par lettre du 17 septembre 2004, j’ai l’honneur de vous rendre compte du résultat de mes investigations et réflexions concernant l’évolution de l’organisation et des conditions dans lesquelles intervient l’inspection du travail, qui doit accompagner le renforcement des effectifs et des moyens nécessaires pour remplir au mieux les différentes missions des services de votre ministère dans ce champ d’action.

Le contexte dans lequel a été conduite cette réflexion est sans précédent. L’ensemble des agents des services a été traumatisé par le double meurtre dont ont été victimes Sylvie TREMOUILLE et Daniel BUFFIERE. Chacun (e) construit sa réaction individuelle à ce traumatisme, avec des appréhensions personnelles, et donc différentes, et la dimension collective de l’influence de ce drame sur l’exercice de leur métier par les agents de contrôle ne peut être évaluée dans l’immédiat. Elle n’en doit pas moins être prise en compte comme un élément déterminant, parmi d’autres, de l’organisation de l’action de l’inspection du travail au cours des prochaines années, tant dans la réponse aux attentes des agents que dans la confortation de l’action publique de contrôle sur les champs du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle.



Monsieur Gérard LARCHER
Ministre délégué aux relations du travail
55, rue Saint Dominique
75007 PARIS SP
L’odieuse irruption de ce drame dans la vie des services amplifie le sentiment de malaise, voire de crise, de l’inspection du travail, qui a fait l’objet de multiples analyses depuis plusieurs décennies et dont la forme actuelle se caractérise, au-delà de l’évolution multidimensionnelle de sa sphère d’intervention et des adaptations qu’elle suscite, par deux éléments majeurs touchant au fondement de son action :

- La « fragilisation » du droit du travail. L’inspection est née avec le droit du travail, comme contributrice indispensable à son effectivité (« la loi vaudra ce que vaudra l’inspection », selon la formule du ministre de l’industrie en 1892). Il en résulte un lien originel qui explique une « fragilisation » de l’inspection du travail face à :

 La difficulté à positionner le contrôle d’un droit du travail désormais « écartelé », dans la diversité de ses sources, entre autonomie et dépendance, entre collectif et individuel, entre civil et pénal.

 La stigmatisation dont fait l’objet le droit du travail dans un déséquilibre perçu entre recherche de flexibilités (d’ailleurs facteurs de complexité) et de sécurités des salariés ou des parcours professionnels.

- L’expression d’une fracture entre l’échelon territorial d’intervention et les autorités centrales et intermédiaires, se traduisant par une ineffectivité de la notion de « système d’inspection du travail », trop souvent illustrée par :

 une relative impuissance des organes de direction à piloter l’action et à rendre compte de l’activité de sections d’inspection arc-boutées sur l’affirmation d’une indépendance dérivant sur une autonomie auto construite, et sur des demandes de moyens supplémentaires sans véritable remise en cause de l’organisation,

 une insatisfaction des agents de contrôle devant l’insuffisante reconnaissance de leur engagement dans le quotidien de leur territoire et la relative nouveauté d’une pression hiérarchique sous le double timbre d’une quantification de l’activité et d’actions prioritaires nationales aux modalités de mise en œuvre d’autant plus contestées qu’elles sont le plus souvent perçues davantage comme des conséquences des évolutions générales de l’action publique (loi de finance et juridiciérisation) que comme l’expression d’une politique en faveur de l’application du droit.


---


Ce tableau occulte l’importance de la régulation sociale diffuse que pratique l’inspection du travail, qui semble satisfaire aussi bien ses auteurs que les partenaires sociaux, même si elle s’exerce au détriment de la mission originelle de contrôle. Il néglige aussi les avancées significatives, bien qu’insuffisantes, de l’action collective au cours des dernières années, à travers les initiatives régionales et locales prises dans le cadre des instructions nationales novatrices sur la politique du travail, et qu’il convient de promouvoir.

Il illustre cependant un important déficit de confiance qui peut être analysé comme l’aboutissement d’un long processus paradoxal, mais non dépourvu d’une certaine logique. Alors que la France se dotait, en 1975, d’un corps interministériel d’inspecteurs du travail porteur d’une ambition dans l’exercice des missions d’inspection du travail, elle entrait dans une longue période où la progression du chômage allait imposer au Ministère une organisation des services et une gestion du corps prioritairement orientées vers les politiques de l’emploi et de lutte contre les exclusions, dont l’interdépendance avec l’action de l’inspection allait être soulignée à plusieurs reprises, le plus souvent pour appeler les agents à une participation à la mise en œuvre de politiques publiques intégrées dans lesquelles l’action de contrôle de l’application du droit n’était pas première. La mission identitaire des services est ainsi devenue minoritaire et les ajustements des moyens et réexamen des modes d’action de l’inspection jugés primordiaux dès 1976 (Claude CHETCUTI – Droit social février 1976) n’ont pas été assurés, aggravant les déficits de méthode déjà soulignés.

La cohésion sociale justifie que les politiques d’emploi et d’insertion soient encore renforcées et que l’implication des services dans leur mise en œuvre soit à la hauteur de leurs ambitions. Il ne s’agit donc pas de procéder à une compensation, mais à un rééquilibrage, permettant de faire face aux exigences nouvelles de la société comme l’amélioration des taux d’activité impliquant une meilleure qualité du travail, ou la santé publique qui interpelle les notions de santé et de « bien-être » au travail. Ces exigences justifient une attention particulière aux réponses à apporter simultanément aux problèmes de l’administration du travail à travers :

 une affirmation forte de sa légitimité, fondée sur l’utilité sociale de ses missions, au premier rang desquelles le contrôle de l’application d’un droit du travail réhabilité,
 une re-définition de ses modalités d’intervention,
 un ajustement de son organisation,
 une réflexion active sur ses pratiques et ses outils,
 une adaptation de la gestion de ses ressources humaines.

Chacun de ces axes est solidaire avec les autres et il serait illusoire de ne pas les appréhender ensemble dans le plan global qui doit accompagner le renforcement progressif (mais significatif) des moyens.

Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, à l’expression de mon plus respectueux dévouement.




Jean BESSIERE
PROPOSITIONS RELATIVES A L’ORGANISATION
DE L’INSPECTION DU TRAVAIL
ET AUX CONDITIONS DANS LESQUELLES ELLE INTERVIENT






I – Donner du sens à l’action

1 –- Mission d’enquête interministérielle sur les différentes formes « d’incivilité » ou de « délégitimation » subies par les services publics, notamment ceux chargés de contrôle, afin de recenser les réponses qui y ont été apportées et celles qui restent à construire pour affirmer l’autorité publique, en particulier dans l’autorité du contrôle


2 –- Contenir les débats démocratiques sur les possibles évolutions du droit du travail dans un cadre républicain respectant le droit applicable et ceux qui sont chargés de le faire appliquer


3 – Promouvoir comme une priorité de la nation une politique du travail, intégrant une politique de contrôle de l’effectivité du droit, comme vecteur de progrès, sur des enjeux de santé et de progression du taux d’activité à travers la qualité du travail


4 – Promouvoir le droit du travail dans le cadre de la préparation et de la célébration du centenaire du ministère du travail (2006), en intégrant des informations sur le rôle de l’inspection du travail et ses modalités d’intervention


5 – Inciter les directions régionales et départementales à concevoir chaque année des modalités de présentation de l’action de l’inspection du travail (raison d’être, objectifs, moyens d’action, activité, résultats et impact) dans son environnement et notamment auprès des partenaires sociaux


6 – Donner toute leur importance aux travaux engagés par la MICAPCOR sur la déontologie et l’éthique


7 – Intégrer l’action de l’inspection du travail comme un sujet régulier des programmes de recherche et d’évaluation des politiques publiques, sous la responsabilité de la DARES, en liaison avec les autres directions d’administration centrale




8 – Redonner du corps à la mission de « veille sociale » que la convention 81 de l’OIT confie à l’inspection du travail, en initiant, en 2005, une action collective de repérage et de mise en valeur des éléments du droit du travail qui posent problème dans l’efficacité des contrôles


9 – Démontrer à l’inspection du travail quelles sont ses responsabilités, son utilité et ses obligations dans le cadre d’une politique du travail centrée sur l’amélioration du sort de ceux qui travaillent, en prenant en compte le milieu dans lequel ils évoluent, et au sein d’une administration du travail identifiée comme telle, au cœur des problématiques interdépendantes qui traversent la politique du travail


10 – Promouvoir les évolutions institutionnelles (décentralisation, loi de finances…) et juridictionnelles (responsabilité des fonctionnaires) comme un des leviers d’action pour une meilleure organisation, et non comme le vecteur d’une politique fondant l’action



II – Modalités d’intervention


11 – Conforter le caractère généraliste de l’inspection du travail française sur les champs du milieu du travail, des conditions de travail, des relations de travail et de l’emploi et de la formation professionnelle


12 – Repréciser la compétence générale de l’inspection en matière d’application du droit du travail quelle que soit sa source, en répondant aux questions que posent les développements des accords d’entreprise et des « textes volontaires »


13 – Apporter de la sérénité dans les débats sur l’éventuelle unification des services d’inspection du travail


14 – Affirmer que la richesse de l’action de l’inspection du travail française est en partie constituée par les activités contribuant à l’effectivité du droit, en dehors de la fonction de contrôle (veille, information, sensibilisation, autorité administrative, conseil et conciliation) et faire en sorte que cette contribution soit intégralement valorisée comme participant à la réalisation des objectifs de la politique du travail




15 – Définir, au niveau national, dans quelles conditions la priorité donnée au contrôle, parmi toutes les modalités d’intervention de l’inspection, se traduit par des choix à assumer par l’administration, devant la collectivité nationale et les usagers, sur le traitement des décisions que doivent prendre ou les avis que doivent rendre les agents de contrôle et des demandes d’intervention « individuelles » (qu’elles émanent des particuliers, de syndicalistes, ou d’employeurs)


16 – Centrer l’activité de l’inspection, sur le champ de l’emploi, sur l’application des textes contribuant à « l’état de droit » dans les entreprises, sans préjudice des liaisons à mettre en œuvre, par l’encadrement, pour assurer la cohérence entre les différentes activités des divers services de l’Etat



III – Organisation de l’inspection du travail


17 – Créer un service central de l’inspection du travail, structure administrative de soutien et d’encadrement, dirigée par un haut fonctionnaire à l’autorité reconnue, et bénéficiant de l’appui d’un comité d’experts et d’une entité permettant la consultation des partenaires sociaux et des usagers


18 – Conforter et responsabiliser la hiérarchie régionale et départementale dans le pilotage de l’action de l’inspection, dans une logique d’adhésion, concentrée par un dialogue sur les objectifs et les moyens et par la rédaction de documents d’engagements réciproques, entre les CTRI et le service central, et entre les DDTEFP et les sections


19 – Permettre aux directeurs régionaux, dans le cadre du dialogue sur les objectifs et les moyens, de structurer les sections d’inspection du travail, dans le respect des principes définis par le livre VI du Code du travail, avec le souci d’une amélioration qualitative (compétence, méthode, outils, partenariats…) et quantitative du contrôle surtout dans les petites entreprises


20 – Assurer aux contrôleurs du travail des conditions d’exercice de leur activité tenant mieux compte de leur profil et de leur capacité à exercer des missions plus ou moins complexes, dans le cadre des dispositions de l’article L 611.12 du Code du travail


21 – Engager une action d’envergure pour donner aux agents de contrôle les moyens de faire face à l’évolution des problématiques relatives à la santé et à la sécurité au travail :
- organisation pluridisciplinaire de l’action davantage que spécialisation individuelle,
- développement des compétences et évolution des pratiques


22 – Rechercher la meilleure synergie entre les différentes ressources (et l’optimisation de chacune de ces ressources) enrichissant l’action des agents de contrôle : compétences techniques dans les services (déconcentrés et centraux) externes aux services (institutionnelles ou ponctuelles) réseaux appui ressources méthodes (organisés ou spontanés)


23 – Tout mettre en œuvre pour que le projet SITERE, système d’information devant être opérationnel en 2006 réponde à toutes les attentes



IV – Pratiques professionnelles et outils des agents de contrôle

IV . 1 – Sur les pratiques individuelles

24 – Mettre en place un programme d’études et de recherches sur les pratiques professionnelles réelles et leur compréhension, dans le prolongement de divers travaux d’investigation dont la richesse est peu exploitée


25 – Mettre en place un groupe de travail chargé de l’inventaire des guides méthodologiques de contrôle à actualiser ou à concevoir, comme par exemple un « guide repère pour la pratique de la visite »


26 – Coordonner et valoriser, au niveau national, les différents travaux réalisés au niveau local en terme de production d’outils


27 – A partir de l’analyse de l’impact du CD Rom risques chimiques (prochainement diffusé) impulser une politique de développement de ce type d’outil, conçu davantage pour accompagner l’action que pour améliorer les dispositifs de formation


28 – Missionner la DRT et l’INTEFP pour redéfinir le contenu des journées d’échanges sur les pratiques de l’inspection du travail


29 – Définir une doctrine de l’inspection quant à ses modes d’intervention sur des problématiques investies récemment (harcèlement, stress au travail, lutte contre les discriminations à l’embauche…)



4.2 – La pratique collective

30 – Définir la notion de « diagnostic travail », avec le souci de libérer l’inspection de contraintes méthodologiques qui ne sont pas dans sa mission mais aussi de la responsabiliser dans l'argumentaire sur son activité et son organisation


31 – Promouvoir une programmation de l’action rompant nettement avec l’organisation « au fil de l’eau », mais articulant actions proactives et réactives, priorités nationales et initiatives locales, dans le cadre des actions du programme 4


32 – Mettre en place un groupe projet, au niveau national, pour définir une politique d’évaluation de l’action, avec des indicateurs quantitatifs et surtout qualitatifs aussi accessibles que révélateurs


33 – Encourager les initiatives locales (départementales ou régionales) de nature à informer, consulter ou associer les partenaires sociaux et les usagers. Mettre en place un observatoire national de ces pratiques, auprès du CNIT ou des groupes de travail spécifiques s’y substituant



4.3 – Les pratiques professionnelles et les contrôles « à risques »

34 – Sans préjudice des dispositions relatives à la procédure d’évaluation des risques, mettre en place, dans chaque direction régionale et chaque direction départementale, un protocole « d’affirmation de la légitimité du contrôle et de soutien des agents en contact avec le public », donnant des repères méthodologiques aux agents, prévoyant l’organisation collective des mesures préventives, reprécisant les modalités de soutien moral, médical, administratif, judiciaire dû aux agents, dans le cadre de la circulaire du 24 septembre 2003, et exposant les formes de relations avec le parquet, les services de police et de gendarmerie, etc…



4.4 – Les outils

35 – Explorer différentes possibilités de développer les sanctions administratives, en recherchant « un juste équilibre entre les deux catégories de sanction, en instituant un système tout à la fois lisible, cohérent et crédible »




V – Gestion des ressources humaines

36 – Augmenter sensiblement les effectifs affectés au contrôle de l’application du droit du travail, en conjuguant cette évolution avec celle des modalités d’intervention


37 – Redéfinir les fonctions de secrétariat et d’assistance, afin de reconnaître les évolutions qu’ont connues les agents en poste et de préciser dans quelles conditions un renforcement du pôle « travail » pourrait résulter d’un redéploiement interne suite à l’abandon de tâches de gestion des mesures des politiques emploi ou de la mise en place de secrétaires administratifs


38 – Anticiper les conséquences de la mise en place de secrétaires administratifs dans les services sur la gestion de carrière des contrôleurs du travail, notamment dans le cadre de leur mobilité interne aux services


39 – Redéfinir les postes d’inspecteur du travail non dédiés à la mise en œuvre de la politique du travail, en justifiant leur existence par la valorisation de compétences dans les champs de la connaissance de l’entreprise, des relations sociales, de l’organisation du travail ou du contrôle


40 – Veiller à orienter prioritairement les inspecteurs élèves du travail vers une activité de contrôle (travail ou emploi ou formation professionnelle) et contribuer, ainsi à un renforcement significatif des moyens consacrés à l’effectivité de droit dans un délai de trois ans


41 – Examiner dans quelle mesure et dans quelles conditions la reconfiguration ou l’ajustement de l’organisation des sections d’inspection du travail permettra à des directeurs adjoints du travail de poursuivre leur carrière en section, dans une logique de poste, et non de gestion individuelle de carrière


42 – Mieux identifier les fonctions de directeur adjoint sur le pôle « travail » afin que les missions contribuant au pilotage et à l’appui des sections d’inspection du travail ne soient pas trop tributaires d’autres missions


43 – Mobiliser des directeurs du travail sur des fonctions d’assistance aux directeurs régionaux et directeurs départementaux dans leur mission de pilotage de l’action de l’inspection du travail


44 – Déterminer avec précision les attentes de l’Administration sur les fonctions d’appui technique et d’expertise afin de définir une politique de recrutement (ingénieurs, ergonomes, etc…) conforme à ces attentes


45 – Elargir le vivier des candidats aux concours de contrôleur et d’inspecteur du travail, afin de permettre un meilleur « brassage des cultures » entre généralistes à profils de juristes, de scientifiques ou techniciens. L’hypothèse d’une meilleure utilisation des opportunités des actuels concours paraît devoir être privilégiée à celle de la conception de concours distincts


46 – Reconfigurer les épreuves du concours d’inspecteur du travail afin qu’elles permettent un meilleur repérage des pré-requis pour l’exercice d’un métier essentiellement basé sur « la relation »


47 – Diversifier les modes de recrutement pour les corps de contrôleurs et inspecteurs du travail, dans le cadre des orientations générales de la fonction publique : 3ème voie, préparation aux concours et accompagnement spécifique pour des bénéficiaires des politiques de la ville ou d’égalité des chances, reconversion…


48 – Explorer en quoi la concrétisation du concept de « formation tout au long de la vie » va modifier, dans les années à venir, le rapport entre les actuelles formations initiale et continue et impliquer une nouvelle conception des produits de formation


49 – Intensifier les travaux, à peine entrepris, sur l’évolution des compétences nécessaires à l’exercice des métiers du ministère du travail et notamment ceux d’inspecteur et contrôleur du travail


50 – Améliorer l’organisation de l’alternance dans les formations initiales d’inspecteur et de contrôleur du travail dans le cadre d’une vraie contractualisation DAGEMO/INTEFP/services déconcentrés


51 – Appréhender avec pragmatisme les difficultés, liées au statut de contrôleurs stagiaires affectés sur des emplois budgétaires vacants, dans le déroulement de la formation initiale des contrôleurs du travail


52 – Afficher et assumer une réelle ambition pour la formation continue des agents de contrôle sur le champ de la santé au travail, mais aussi sur les autres champs du droit du travail : progression significative du nombre de jours de formation et du nombre d’agents en formation, évolution des produits de formation (formation à distance, accompagnement de l’action de contrôle…)


53 – Définir un plan de formation adapté à chacune des catégories d’agents devant contribuer à la politique du travail : ingénieurs sécurité, médecins inspecteur, chargés d’études, directeurs adjoints du travail et directeurs du travail, directeurs départementaux et directeurs régionaux, agents de la direction des relations du travail


54 – Améliorer le dispositif des formations de l’INTEFP sur la gestion des « situations difficiles » ou « des contrôles à risques », en traitant ce type de situation dans une démarche d’évaluation des risques et de prévention et en concevant des dispositifs de formation ouverts aux différentes dimensions du problème (formations initiale et continue)


55 – Engager l’Institut national du travail de l’emploi et de la formation professionnelle dans la construction de partenariats avec les universités afin de développer les possibilités de validation des acquis de la formation d’une part et de l’expérience professionnelle d’autre part


56 – Se doter des moyens suffisants pour une gestion des corps de contrôle permettant de connaître et de suivre les déroulements de carrière et de mettre en place des orientations objectives sur la mobilité des agents


57 – Ouvrir l’inspection du travail française sur l’Europe, notamment par un élargissement de ses relations avec ses « homologues » et une meilleure exploitation des échanges.

SOMMAIRE




Donner du sens à l’action de l’inspection du travail p. 1

1 – la place du contrôle dans l’action publique

2 – le respect du droit du travail par la société civile

3 – une politique du travail, impliquant un meilleur contrôle et l’application du droit, promue comme répondant à des enjeux de société

4 – une confortation de l’action de l’inspection du travail par l’information et la communication

5 – l’action de l’inspection du travail légitimée par une évaluation de la politique publique qu’elle constitue

6 – une inspection du travail actrice dans l’évolution des modalités d’application du droit

7 – placer l’inspection du travail au cœur d’une politique du travail centrale dans les préoccupations des services



Modalités d’intervention de l’inspection du travail p. 9

1 – conforter et préciser la notion d’inspection du travail généraliste

2 – des missions complémentaires à prendre en compte dans l’élaboration de la politique travail et à rééquilibrer en faveur du contrôle


L’organisation de l’inspection du travail p. 18

1 – le principe d’une organisation territoriale à confirmer mais à adapter

2 – une organisation prenant en compte le potentiel et les difficultés des contrôleurs du travail souhaitant exercer une activité de contrôle en section

3 – assurer l’évolution des compétences et des modes d’intervention liées aux problématiques «santé au travail » et à leurs enjeux

4 – une fonction appui technique et ressources méthode à conforter et diversifier au sein des services déconcentrés

5 – réussir la mise en œuvre du nouveau système d’information SITERE

6 – une hiérarchie départementale et régionale à conforter dans un vrai pilotage

7 – un service central à organiser



Pratiques professionnelles et outils des agents de contrôle p. 53

1 – la pratique individuelle

2 – la pratique collective

3 – les pratiques professionnelles et les contrôles à risques

4 – les outils



Gestion des ressources humaines p.69

1 – augmenter sensiblement les effectifs affectés au contrôle de l’application du droit du travail

2 – optimiser la gestion des ressources humaines en faveur de chaque catégorie d’agents participant à la mission d’inspection du travail

3 – le recrutement

4 – la formation




DONNER DU SENS A L’ACTION DE L’INSPECTION DU TRAVAIL





Les textes fondateurs (loi du 2 novembre 1892), fondamentaux (convention OIT n° 81 du 11 juillet 1947, articles L 611.1 et suivants du Code du travail) et organisationnel (décret du 28 décembre 1994) attribuent à l’inspection du travail la mission principale de contrôle de l’application du droit du travail (Code du travail, lois, règlements, conventions et accords pour L 611.1, « législation du travail » pour le décret, qui consacre la notion « d’action d’inspection du travail » relevant « des attributions principales » et contribuant, notamment « à la prévention des risques professionnels ainsi qu’à l’amélioration des conditions de travail et des relations sociales »).

Cette mission principale s’enrichit par :

- la fourniture d’informations et de conseils techniques aux employeurs et aux travailleurs sur les moyens les plus efficaces d’observer les dispositions légales (convention 81),

- le signalement à l’attention de l’autorité compétente des déficiences ou des abus qui ne sont pas spécifiquement couverts par les dispositions légales existantes (convention 81),

- un rôle de conseil et de conciliation en vue de la prévention et des règlements de conflits (décret 1994 et article R 523.1 du Code du travail).


La mission étant bien définie par les textes, elle est légitime en droit, ce qui ne suffit sans doute pas à la faire admettre « socialement légitime » par tous les interlocuteurs de l’inspection. Cette « délégitimation » de l’action est un mal endogène de l’inspection du travail, mais elle est aujourd’hui d’autant plus mal acceptée par les agents de contrôle que son expression dans l’entreprise ou à la DDTEFP (par des employeurs, mais aussi des salariés ou des demandeurs d’emploi) paraît trouver sa force, et parfois sa violence, dans un contexte national multiforme et complexe fragilisant simultanément le rôle et la place de l’action publique et du droit de travail. La demande diffuse de « relégitimation » que formulent les agents traduit davantage une exaspération qu’une crise d’identité (les inspecteurs et contrôleurs sont, pour la plupart, convaincus, de leur utilité sociale et certains l’expriment parfois sans trop de mesure). Elle est sans doute confortée par la « rupture », déjà repérée par la mission du BIT en 1981 et qui caractérise fréquemment les relations entre l’inspection et sa hiérarchie et doit, de ce fait, aussi trouver une réponse à l’interne.

Les pistes d’action qui paraissent devoir être empruntées interpellent un certain nombre d’acteurs, mais n’exonèrent pas l’inspection du travail d’une démarche sollicitant ses propres capacités à participer à la lisibilité de l’impact de ses actions.



1 – La place du contrôle dans l’action publique

S’adressant le 30 septembre 2004 aux préfets et aux responsables de différents services de l’Etat, le Président de la République a exprimé la voix de la nation :
« Inspection du travail, services sanitaires et sociaux, services de la formation professionnelle et de l’emploi, services responsables du logement et de la ville, ces métiers sont au coeur de la vie quotidienne des Françaises et des Français et de la défense de leurs droits. Les conditions dans lesquelles ils s’exercent sont parfois mal appréciées ou mal connues. Leur difficulté est souvent sous-estimée. Ils nécessitent à la fois, ces métiers, de l’autorité, de la conviction, du coeur, un engagement et une grande force morale. Celles et ceux qui les exercent doivent être respectés dans leurs missions comme dans leur personne. Et je pense à nos deux responsables du contrôle de la législation sociale qui ont perdu la vie dans l’exercice de leur fonction. A travers moi, c’est la Nation tout entière qui condamne cet acte tragique et qui témoigne à leurs familles et à leurs proches de l’estime et de la solidarité du pays…
Bien sûr, tout ne relève pas de l’Etat. L’aide sociale, l’action contre l’exclusion font une large part à l’engagement des collectivités locales et du secteur associatif, mais aussi à l’engagement de chacune et de chacun d’entre nous.
Mais c’est toujours l’Etat qui donne l’impulsion, pour garantir l’égalité, la continuité, l’efficacité de l’intervention de tous les acteurs ».

Cette déclaration, qui n’a pas hélas eu d’écho dans la presse, est importante. Par delà la dénonciation de l’inacceptable (pas forcément imprévisible), elle réaffirme une légitimité de l’action publique dans le contrôle. Elle ne suffit malheureusement pas à rétablir spontanément l’autorité de l’Etat partout où elle est remise en cause sous diverses formes (qui ne concernent pas que le contrôle, comme les services déconcentrés en font la douloureuse expérience dans les COTOREP, les SCRE, les contrôles de la formation professionnelle ou les services de renseignements) alors que simultanément, le discours sur la responsabilité pénale des agents est de plus en plus insistant.

L’inspection du travail a ses règles propres et le droit qu’elle est chargée de faire appliquer a ses spécificités qui doivent s’exprimer dans le cadre des relations sociales et professionnelles. Ces nécessaires distinctions ne justifient pas un isolement dans l’appréhension des phénomènes de société parmi lesquels la remise en cause de l’autorité publique et de la légitimité des contrôles.

Une mission d’enquête interministérielle associant les différents services d’inspection générale pourrait être constituée afin de décrire les différentes formes « d’incivilité » ou de « délégitimation » subies par les services publics, notamment ceux chargés d’une fonction de contrôle, de recenser les réponses qui y ont été apportées par chaque administration (actions sur leur environnement et sur leurs modalités d’intervention) et de proposer les éléments principaux d’une politique d’affirmation de l’autorité publique, en particulier dans l’action de contrôle. Elle pourrait prendre appui sur les travaux engagés à l’initiative des préfets, dans les jours qui ont suivi le drame de Saussignac, dans plusieurs départements (Charente, Doubs, Jura, Somme Yonne…) ou d’autres administrations (concurrence, consommation, répression des fraudes).



2 – Le respect du droit du travail par la société civile

- le droit du travail a vocation à trouver application dans la forme où il est,

- la forme où il est doit faire débat, et il ne saurait être reproché à tel ou tel homme d’Etat, telle ou telle organisation professionnelle, tel ou tel parti politique, telle ou telle organisation syndicale (…) de faire connaître ses propositions d’enrichissement … ou d’allègement,

- la conjugaison des deux affirmations ci-dessus suppose que l’avancement d’une idée ou d’un projet se fasse dans le respect des normes existantes (en fonction de l’autorité ou de la personnalité qui la formule publiquement, une idée peut être perçue comme une alternative ou une obsolescence du caractère obligatoire du texte contraire en vigueur, et l’action des agents de contrôle en est profondément affectée, surtout quant, de surcroît, la condamnation du texte applicable est assortie de formules lapidaires déqualifiant « ce fatras » que serait le code du travail ou « le poids » de la fonction publique).

Le ministre chargé du travail, et le cas échéant les ministres chargés de l’agriculture et des transports, sont les garants du respect de ces principes et doivent être en capacité de repérer et de dénoncer les abus de langage pouvant décrédibiliser la légitimité de l’action de contrôle.



3 – Une politique du travail, impliquant un meilleur contrôle et l’application du droit, promue comme répondant à des enjeux de sociétés

La plupart des débats sur la nécessaire adaptation de l’action de l’inspection du travail sont fondés sur une approche réactive des phénomènes qui la percutent et le plus souvent la menacent : les évolutions de la technologie et de la science (nouveaux risques, interpénétration des champs travail, santé publique, environnement, modification du cadre d’exercice du travail ou de la nature même de la relation entre l’entreprise et le subordonné ou le para-subordonné, voire le télé-subordonné…) l’effondrement du collectif qui caractérisait le monde industriel (externalisation, flexibilité, individualisation, co-activité, affaiblissement du syndicalisme, précarisation et accroissement de différences entre salariés à statut collectif protecteur et travailleurs mal ou non protégés…), l’éclatement du droit du travail, en écho à la complexité accrue des relations au sein des entreprises (normes supra nationales, articulation entre loi et jurisprudence, accords collectifs de différents niveaux, multiplication des possibilités de dérogation…) contexte économique, social et politique (évolution du droit, de son application par les acteurs sociaux, « accomodation » de la règle… mais aussi nouvelles modalités de conception et de gestion de l’action publique).

L’inspection du travail doit effectivement intégrer toutes ces évolutions pour mieux répondre à sa mission fondamentale ci-dessus rappelée. Force est de constater que la modestie des initiatives nationales prises au cours des dernières décennies n’a pas été à la hauteur de l’immensité de cette tâche et il en résulte un manque de repère.

Mais sans perdre de vue cette nécessité d’adaptation réactive aux éléments de contrainte, la politique de contrôle de l’effectivité du droit doit surtout être promue comme vecteur de progrès sur des enjeux de santé et de progression des taux d’activité.

Emploi satisfaisant pour le travailleur et compatible avec des perspectives de carrière, tant sur le plan de la rémunération que des statuts, égalité entre les sexes, santé et sécurité, sécurisation des parcours professionnels en contrepartie de la flexibilité, organisation du travail et équilibre entre vie professionnelle et vie privée, dialogue social et participation des travailleurs, diversité et non discrimination, performances générales du travail constituent 8 des 10 critères de la qualité de l’emploi définis à l’échelon européen (les deux autres relevant davantage des politiques de l’emploi et de la formation professionnelle).

Ils sont repris, pour l’essentiel par le programme annuel de performance n° 4 du ministère, qui vise l’action de l’inspection du travail comme facteur de réussite. Par delà la prise en compte de ces enjeux à l’intérieur des services, il paraît fondamental de concevoir et de promouvoir une politique nationale associant les partenaires sociaux et les autres acteurs publics et privés, positionnant l’inspection du travail comme un acteur majeur, participant, par son activité de contrôle de l’application du droit à la réalisation de cette politique et contribuant à la construction et à la satisfaction d’indicateurs de contexte et d’impact, indispensables à la confortation de « l’utilité sociale » de l’institution que seuls des indicateurs d’activité ou de moyen ne peuvent valablement illustrer.

Une telle ambition à conjuguer avec une réforme de l’organisation de l’action de l’inspection du travail suppose aussi, et surtout, une organisation « par projet » au niveau national, et étant portée politiquement, comme une priorité de la nation.






4 – Une confortation de l’action de l’inspection du travail par l’information et la communication

L’action de l’inspection, doublement légitimée par le rappel de ses principes fondamentaux et par un engagement au service d’une politique de travail ambitieuse, doit être confortée par une politique d’information et de communication contribuant à une meilleure connaissance du droit du travail et une plus grande visibilité des modes d’intervention de l’inspection du travail.

Le rapport du Conseil Economique et Social (2002) sur les dangers de l’ignorance du Droit du travail a analysé « les causes et conséquences d’un droit méconnu », parmi lesquelles une « dimension sociale dévalorisée », du fait d’une insuffisante place de l’information sociale dans les médias, d’une faible présence du droit social dans l’enseignement, d’une méconnaissance du paritarisme et d’une insuffisance de relais. Ces quatre causes identifiées sont autant de pistes d’action pour une politique de « promotion » du droit du travail intégrant la notion de contrôle qui lui est originellement attachée.

Une réflexion sur le contenu de cette politique et sur ses modalités devrait pouvoir être initiée rapidement avec en perspective des actions d’envergure pour le centenaire du ministère en 2006. Sans attendre son aboutissement, des initiatives pourraient être prises en fonction de l’actualité : visites ministérielles valorisant l’action de contrôle de l’inspection, communication sur le rôle joué par l’inspection du travail dans diverses affaires (avec, simultanément, une mise en valeur d’interventions dans des domaines complexes, relevant de faits de société, et dans l’application de droits individuels). Dans le même temps, aux niveaux régional, départemental et local, dans le prolongement et l’extension d’initiatives déjà prises, les responsables des services déconcentrés devront rechercher une activation des relais cités par le Conseil Economique et Social (principalement organisations syndicales et organisations professionnelles), même si le Conseil souligne les limites d’un tel exercice. Il semble fondamental d’inciter les directions régionales et départementales à concevoir, chaque année, des modalités de présentation de l’action de l’inspection du travail (raison d’être, objectifs, moyens d’action, activité, résultats, impact) dans son environnement et notamment auprès des partenaires sociaux, sans préjudice d’autres initiatives, plus ciblées, par exemple dans le cadre de la mise en œuvre d’actions concertées.

Ces orientations doivent intégrer le rappel des conditions d’intervention de l’inspection et leur justification (droit de visite inopinée, droit de circuler librement dans les locaux de travail, droit de rencontrer les salariés hors la présence de l’employeur…) qui ont pour corollaire le respect de règles méthodologiques claires garantissant aux employeurs et salariés une application uniforme des règles de contrôle, dans le respect des pouvoirs de l’agent de contrôle et de son choix des moyens à mettre en œuvre. A ce titre, les travaux sur « la déontologie et l’éthique » souhaités par le rapport IGAS n° 2003111 en août 2003 avec une échéance calendaire de deux ans, entrepris avec résolution par la MICAPCOR sont attendus avec le plus grand intérêt, et avec l’espoir que la méthode de travail retenue pour tenir compte de nombreuses sensibilités permettra de réelles avancées sur les deux thèmes.



5 – L’action de l’inspection du travail légitimée par une évaluation de la politique publique qu’elle constitue

Les actions de promotion de la politique du travail et celles s’attachant à la communication sur les contrôles connaîtront vite leurs limites vis à vis de la légitimité de l’inspection du travail si elles ne s’accompagnent pas d’une action plus ambitieuse d’évaluation de la politique publique que constitue l’action de l’inspection du travail, sous ses différentes formes (contrôle, intervention dans les conflits, information). Les travaux d’évaluation du Ministère n’ont que rarement investi l’activité de l’inspection du travail, trop souvent appelée à faire elle-même l’évaluation de son action à travers ses comptes rendus d’activité dans des formes d’ailleurs peu satisfaisantes parce que peu ordonnées. .

Il est proposé que la DARES convienne chaque année en liaison avec les autres directions d’administration centrale d’un programme de recherche ou d’évaluation sur une ou deux actions ou missions de l’inspection du travail, permettant d’objectiver et de mettre en débat les pratiques (et leurs résultats) de l’inspection du travail.

Au regard de la technicité du sujet, et du caractère « ex post » que recouvrirait la première étude de ce type, son résultat pourrait être intégré dans la politique de communication 2006 (centenaire du Ministère).



6 – Une inspection du travail actrice dans l’évolution des modalités d’application du droit

Par ses interventions en entreprise, l’inspection du travail contribue à l’effectivité du droit. Elle est, depuis plusieurs années, confrontée à une évolution du droit, dans ses sources et dans ses principes, qui complexifie considérablement l’action de contrôle, et nuit, de ce fait, à son effectivité.

La convention 81 de l’OIT lui donnant mission « de porter à l’attention de l’autorité compétence les déficiences ou les abus qui ne sont pas spécifiquement couverts par les dispositions légales existantes », pourrait être utilisée pour donner une place à l’inspection dans les actuels débats sur « l’efficacité » du droit, non pour entrer dans le débat sur le contenu du droit (sa vocation est de veiller à son application) mais dans ceux de sa lisibilité, de son applicabilité ou de son inadaptation et de l’efficacité du contrôle de son application.



Les procédures de rapport périodique ne paraissent pas suffire en l’état actuel de leur fonctionnement, à l’efficacité d’un tel exercice. Une action d’envergure, de nature à assurer une mobilisation des services (ateliers régionaux ou/et nationaux) pourrait être envisagée.



7 – Placer l’inspection du travail au cœur et au service d’une politique du travail centrale dans les préoccupations des services

Les notions de « contrainte » soulignées au point 3 ci-dessus ont leur pendant dans la façon dont sont majoritairement perçues les orientations méthodologiques actuelles de la politique du travail et l’implication, ressentie comme nouvelle (même si elle n’est pas aboutie), de la hiérarchie dans leur mise en œuvre. Davantage que la cible (l’effectivité du droit) et l’objectif global (amélioration du sort des salariés en prenant en compte le milieu dans lequel ils évoluent) c’est la méthode qui est perçue et critiquée, comme une insuffisante reconnaissance de l’engagement professionnel « traditionnel » et une réaction à la triple contrainte « responsabilité des agents publics – loi de finances – décentralisation » qui justifierait une instrumentalisation de l’inspection du travail à travers une démarche privilégiant l’approche quantitative de l’activité, sans véritable réponse aux problèmes de moyens et sans prédilection, pourtant fondamentale, du sens de l’action.

Les fonctionnaires que sont les agents de contrôle ne seront pas en dehors des évolutions judiciaires, budgétaires et institutionnelles qui toucheront l’ensemble de la fonction publique. La prise en compte de ces contraintes dans leur activité et leurs modes d’intervention est, par conséquent, impérative (et il convient de couper court à toute illusion contraire). Elle peut d’ailleurs, si elle n’est pas entravée par un excès de technocratie constituer un levier supplémentaire pour l’évolution des pratiques.

Elle ne peut, cependant, être l’élément de mobilisation pour une action rénovée mais fondée sur les principes légaux qui régissent l’inspection du travail.

C’est donc bien l’essentiel qui doit être mis en exergue : une volonté forte d’effectivité du droit du travail, à partir d’une politique de contrôle structurant l’activité d’une administration du travail (dont l’inspection serait le fer de lance), organisée de manière à répondre, dans son champ d’activité, comme tout service public, aux attentes de performance des citoyens, des usagers, et des contribuables (utilité sociale, efficacité, efficience).

Il s’agit bien de démontrer « l’intérêt à agir » de l’inspection pour ce qu’elle est, et pour sa raison d’être : un service de contrôle (dans l’acceptation la plus large du terme) pour l’application du droit. C’est cette démonstration qui est seule susceptible de réduire l’actuelle fracture, profonde, même si elle peut être appréciée avec nuances suivant les organisations et les individus, entre les agents de contrôle et leur hiérarchie. Elle est à distinguer des appels à la mobilisation « transversale », justifiée dans les années 1990 par les politiques intégrées de « modernisation négociée » ou de « création d’emplois par la réduction du temps de travail » (perçue comme une nécessité de mettre « le travail » au service de « l’emploi »). Elle est porteuse de recentrage : « l’administration du travail » au service de « la qualité du travail » à travers une « politique du travail ».

Mais ce recentrage est nécessaire pour mieux assurer les interdépendances multiples que doit impérativement assumer l’inspection du travail. Ni repliement, ni recul, il doit être conçu comme le moyen d’une ouverture. Cette ouverture, à organiser par l’Administration du travail avec le souci de libérer l’inspection de toutes tâches ne concourant pas directement à son activité principale, s’exercera, suivant les motifs d’intervention de l’inspection, sur les champs de l’emploi, ou de la formation professionnelle, ou de la santé publique, ou de l’environnement ou des sécurités, sociale ou publique (cette liste n’étant pas limitative).

Cette volonté doit se traduire par une expression politique, par l’attribution de moyens (d’autant plus attendue que les besoins ont été chiffrés, même sous forme d’un ordre de grandeur, par l’administration, et que les premières indications budgétaires sur la mise en œuvre du plan de cohésion sociale accentuent le déséquilibre en moyens humains entre les champs emploi-insertion et travail) et par des mesures organisationnelles (qui ne font l’unanimité que sur leur nécessité) touchant à :

ses modalités d’intervention,
ses structures,
ses pratiques,
sa ressource humaine.

Elle demandera du temps, de la conviction, des expérimentations, de la transparence et du dialogue.

MODALITES D’INTERVENTION DE L’INSPECTION DU TRAVAIL




« On attend de l’inspecteur du travail français, tel que l’histoire l’a situé au carrefour de l’activité économique et de la vie sociale, qu’avec une maîtrise permanente et un sens aigu des relations humaines il « dise le droit » dans la pratique quotidienne ; qu’il soit, sans être le plus souvent un technicien, à l’écoute des progrès de la technologie et des risques qu’elle engendre ; qu’il se montre apte au raisonnement économique dans l’exercice des fonctions de conciliateur ; qu’il assume des responsabilités économico-politiques qui l’éloignent de sa vocation première de protecteur du travailleur ; qu’il se montre un administrateur avisé car des tâches de gestion lui seront parfois déléguées par l’administration centrale ; et enfin, à toutes ces aptitudes, on trouvera normal qu’il ajoute celles d’être le conseiller naturel des employeurs, des travailleurs et de leurs organisations, l’éducateur lorsque la loi est nouvelle, le vulgarisateur lorsque l’application est complexe, sans que jamais s’altèrent l’autorité et l’indépendance nécessaires à l’exercice de ses fonctions principales dont la phase la plus délicate est sans conteste son action répressive ». Mission BIT 1981


1 – Conforter et préciser la notion d’inspection du travail généraliste

1.1 – Compétence juridique et technique

Si l’on se réfère au manuel de vulgarisation de l’OIT, l’étude des différents systèmes d’inspection du travail permet d’isoler cinq champs de compétences confiés aux services d’inspection, dont les deux premiers sont cités par l’article 2 de la convention n° 81 de l’OIT (1947) :

-le milieu du travail (santé et sécurité),
les conditions de travail (temps de travail, salariés, congés, âge minimum, accès au travail, etc…),
-les relations de travail (individuelles ou collectives),
-l’emploi et la formation professionnelle (« notamment en cas de restructuration ou de licenciements importants pour motifs économiques »),
-les obligations vis-à-vis de la sécurité sociale.

Ces éléments d’analyse des systèmes d’inspection du travail situent les services français sur les quatre premiers champs pour le Ministère chargé du travail et sur l’ensemble des champs pour le Ministère de l’Agriculture, pour d’évidentes raisons historiques.



Bien que certaines voix s’élèvent, avec moins de force que les échos réprobateurs qu’elles suscitent, pour émettre l’idée d’un recentrage de l’inspection du travail sur tel ou tel champ, la remise en cause du caractère « généraliste » de l’inspection du travail française sur les quatre premiers champs cités ci-dessus n’est pas à l’ordre du jour. Elle est au contraire soulignée comme un atout au regard de l’interdépendance des problématiques principalement rattachées à chacun de ces quatre champs. Il n’est cependant pas inutile de marteler cette évidence, puisque toute tentative d’évolution de l’organisation des missions est a priori dénoncée comme susceptible de remettre en cause le caractère « généraliste » de l’intervention.

Le programme 4 du Ministère « Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail » conforte l’intervention généraliste au regard des champs cités ci-dessus, puisqu’il sollicite l’inspection sur :

le milieu du travail :
la contribution à la surveillance des risques : la mission de veiller à l’application des textes en contrôlant la conformité des conditions de santé et de sécurité au travail dans les entreprises

les conditions de travail :
la principale mission des sections d’inspection du travail est de veiller à l’effectivité du droit au moyen des contrôles en entreprises, de l’information et du conseil aux acteurs. Cette activité porte sur deux dimensions prioritaires :
- les droits fondamentaux des salariés (rémunération, durée du travail, nature et contour du contrôle),
- les discriminations au travail fondées sur le sexe, l’origine ou l’appartenance syndicale.

les relations sociales :
- les services s’assurent de l’implantation et du fonctionnement régulier des institutions représentatives du personnel,
- les services du travail jouent enfin un rôle important dans la prévention et la régulation ou la résolution des conflits du travail.

Les programmes 2 et 3 positionnent l’inspection sur le champ de l’emploi

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Dans le même temps, la volonté d’intensifier la lutte contre le travail illégal dans une double approche (efficacité des contrôles en entreprises et effort de coordination des différents services impliqués dans cette lutte) appelle des mesures spécifiques tenant compte des principes d’intervention généraliste.





1.2 – Compétence générale en matière de contrôle de l’application du droit du travail, quelle que soit sa source

Elle est consacrée par l’article L 611.1 du Code du travail, avec un élargissement important dès 1972 et 1976 : code du travail, lois et règlements non codifiés, conventions et accords collectifs, dispositions particulières du Code de la sécurité sociale et du Code pénal.

Cette compétence générale en droit du travail et des conditions de travail est également une caractéristique du système français qui n’est pas remise en cause mais qui gagnerait à être précisée, s’agissant :

- du développement des sources au niveau européen,
- de la probable multiplication des accords d’entreprise dans le cadre de la loi du 4 mai 2004 (question de la connaissance de l’accord, de l’appréciation de son contenu et de son articulation avec d’autres textes),
- des textes « volontaires » (code de conduite, chartes éthiques, etc…), qui entrent dans la sphère d’intervention de l’inspection du travail dès lors qu’ils « constituent une modification du règlement intérieur et un risque pour la santé mentale du personnel » (TGI Nanterre Ordonnance du 6 octobre 2004).


1.3 – Compétences limitées à certains secteurs d’activité

Pour mémoire, dans la mesure où le présent exercice ne concerne que l’organisation des services du Ministère chargé du travail, on rappellera l’ardent débat sur l’unification des services d’inspection du travail dans lesquels officient les agents des corps interministériels d’inspecteurs et de contrôleurs du travail. Ce débat a pris une nouvelle dimension après le drame de Saussignac, l’unité des services étant présentée par beaucoup comme un facteur contribuant à l’efficacité de l’action et comme un moyen de lutter contre un certain isolement professionnel des agents des inspections du travail en agriculture et dans les transports. Par delà la charte signée en 1993 par les trois ministres concernés, on mentionnera les positions fortes exprimées en faveur de la fusion par une partie des syndicats d’agents (CFDT, CFTC, SUD, UNSA, SNUTEF) une opposition tout aussi forte de la CGT-FO, et la mention d’un débat non abouti à l’intérieur de la CGT.

On observera, enfin, que la question d’un service unifié de l’inspection du travail, si elle est à l’ordre du jour, comme le mentionne la stratégie ministérielle de réforme, pourrait aussi être abordée au regard de l’ensemble des personnes exerçant une activité professionnelle en situation de subordination (travailleurs « indépendants » ou para subordonnés, fonctions publiques, mines et carrières, armement, affaires maritimes, etc…)

Il semble souhaitable que l’inspection du travail ait une approche unique de ses missions, quelle que soit la solution retenue quant à son organisation.

L’éternel débat sur l’unification des services ne permet pas cette approche. Il est donc souhaitable que soit définie une position claire, sur le sujet, à l’intérieur de laquelle pourra être construite une politique du travail et de contrôle opposable à tous les secteurs d’activité, quel que soit le système d’organisation retenu.



2 – Des missions complémentaires à prendre en compte dans l’élaboration de la politique travail et à rééquilibrer en faveur du contrôle

Le rapport présenté par le gouvernement français au BIT pour la période du 1er juillet 2001 au 31 décembre 2003 précise en ses pages 20 à 23 l’ensemble des « tâches de l’inspection du travail », dans une approche extensive puisque prenant en compte les décrets des 20 août et 11 septembre 2003 portant statuts particuliers des corps interministériels des inspecteurs et des contrôleurs du travail, ouvrant aux membres du corps des missions non directement rattachées aux fonctions des sections d’inspection du travail, bien que ces dernières concourent à l’exécution de l’ensemble des missions de la direction départementale, en application du décret du 28 décembre 1994 sur l’organisation des services.

A ce jour, la liste contenue par le rapport susvisé doit être enrichie par une référence aux articles 17 et 36 de la loi n° 806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, avec une attention particulière à l’article 17 en ce qu’il créé une « obligation de signalement », pour tous les services de l’Etat, sans exception, des « menaces imminentes pour la santé de la population dont ils ont connaissance, ainsi que les situations dans lesquelles une présomption sérieuse de menace sanitaire grave leur paraît constituée ». Elle peut aussi évoluer au regard du décret du 29 avril 2004 qui ouvre la voie à l’implication de l’inspection dans des politiques interministérielles, par delà les expériences déjà réalisées dans certains « pôles de compétences » (bruit, amiante, plomb…) ou dans les actions de lutte contre le travail illégal.

Au-delà de cette énumération, l’activité de l’inspection du travail telle qu’elle est aujourd’hui, peut faire l’objet d’une classification entre divers types d’intervention.


Contrôle dans l’entreprise ou sur les lieux de travail :

- à l’initiative de l’agent de contrôle (dont une partie importante en réponse à la demande de l’usager),

- dans le cadre d’une enquête accident du travail ou de l’instruction d’une demande d’intervention, d’un signalement, ou d’un dossier devant donner lieu à décision administrative (de l’inspecteur, du directeur ou d’autres administrations…),

- dans le cadre d’actions collectives, programmées à l’échelle de la section, du département, de la région ou de la nation,

L’évolution de la législation, notamment dans le secteur du bâtiment, a généré un certain déplacement de la fonction contrôle, l’examen de dossiers sur pièces étant quantitativement plus important.

Activité d’autorité administrative (enquêtes, ou instructions de demandes d’autorisation, ou de dossiers ou de recours ou analyses juridiques). Cette activité en fonction de sa nature concerne de manière différente inspecteurs et contrôleurs :

- en application d’un texte législatif ou réglementaire qualifiant l’inspection du travail « d’autorité compétente »,

- dans le cadre d’une délégation ou d’une demande d’avis du directeur départemental,

- en réponse à des demandes d’avis émanant d’autres administrations,

- en qualité de chef de service de sa section d’inspection du travail : participation ou association aux décisions concernant l’organisation de la DDTEFP et la gestion de ses ressources ; pilotage et animation de l’activité des agents placés sous sa responsabilité ; responsabilité du compte rendu d’activités de la section et de différents rapports administratifs…

- participation, dans des proportions très inégales suivant des individus, à des activités d’ingénierie (conception d’outils d’intervention, diagnostics) des groupes de travail, des activités en réseau (dont celles liées à la formation).

L’activité « sédentaire » de l’agent de contrôle est aussi tributaire de son activité de contrôle : lettres d’observation, procès verbaux, investigations diverses d’autant plus exigeantes que le droit et l’organisation du travail se compliquent.

Au total, cette partie de l’activité des agents de contrôle est devenue majoritaire, avec un certain déséquilibre entre sections en fonction du nombre de demandes d’autorisation de licenciement de salariés protégés. Elle préoccupe suffisamment les agents et leur hiérarchie pour avoir donné lieu à des diagnostics (Réf. 12ème section Bouches du Rhône en annexe) et diverses études (Ile de France et tout récemment Aquitaine).

Ces études doivent être analysées aux niveaux national et régional pour objectiver les débats sur la visibilité de l’action de l’inspection du travail. De cette analyse devraient ressortir deux types de décision : un toilettage des textes « libérant » les agents de contrôle et une organisation nouvelle permettant de mieux traiter l’ensemble de la charge.


Réponse à la demande « individuelle » : elle s’inscrit pour partie dans les activités d’information et de conseil technique (également exercées dans le cadre de contrôle) aux employeurs et aux travailleurs sur les moyens les plus efficaces d’observer les dispositions légales, que prévoit l’article 3 de la convention du BIT.

- la notion de demande individuelle est particulièrement sensible, puisque interpellant les notions de « service public » du travail et de « relations de proximité » de l’inspection du travail. De plus en plus importante, compte tenu de l’évolution du droit et de la société, elle s’inscrit souvent aux yeux des agents comme une priorité absolue relativisant l’importance des instructions nationales sur la politique de contrôle. La note de la DRT du 3 décembre 2003 devrait avoir rassuré celles et ceux qui dénoncent une tentation qu’aurait l’administration centrale de sacrifier cette activité, d’autant que les pistes de réflexion sur les contours des « Maisons de l’emploi » privilégient souvent l’apport de l’inspection du travail dans une activité de renseignement sur le droit du travail. La question de l’organisation reste à résoudre dans bon nombre de départements, et par là même, celle de l’équilibre entre réponse à l’attente du public et politique du contrôle. Les interventions des organisations syndicales au sein des CTP réunis en octobre ajoutent d’ailleurs à la dimension subjective du débat en citant parmi les « prérogatives » de l’inspection « sa capacité d’écoute généraliste des salariés », qui n’est discutable ni en tant que « capacité », ni en tant que condition d’exercice ou que conséquence de la mission originelle de contrôle, mais qui peut être révélatrice d’une dérive dans la conception collective des agents de leur mission par rapport aux textes fondateurs et fondamentaux.
Simultanément la récente prise en compte de la responsabilité pénale individuelle des agents renforce l’attention portée par un grand nombre d’entre eux, aux plaintes individuelles, que l’on ne peut rejeter a priori sans avoir mesuré en quoi leur non traitement pourrait mettre en jeu la responsabilité de l’agent.
Quoiqu’il en soit, il n’est pas acceptable que la « demande individuelle » justifie une moindre présence sur le terrain et un « refus » d’une politique de contrôle. Les initiatives départementales ou régionales, suscitées par la DRT sont sans doute intéressantes (elles ne semblent pas avoir été répertoriées). Elles n’exonèrent pas le niveau national, dans sa mission d’organisation de l’action d’une intervention dans la définition de la réponse à ce problème de société.


Conseil et conciliation en vue de la prévention et du règlement de conflits
l’intervention de l’inspection dans la prévention et le règlement des conflits s’est longtemps située sur les deux champs de l’individuel et du collectif. La généralisation des conseils des prud’hommes aurait dû marquer la fin progressive de l’activité de l’inspection du travail sur le champ du conflit individuel. Or le flux de demandes d’intervention demeure élevé et concerne surtout les contrôleurs chargés de l’application du droit dans les petites entreprises. Certes, les pratiques ne sont pas homogènes mais le traitement de la demande paraît encore fort, qu’il soit justifié par la lourdeur de la procédure prud’homale, peu adaptée à certains types de différends ou par la non application du droit que révèle la demande d’intervention, justifiant ainsi l’action au regard de l’article L 611.1 du Code du travail. Sur ce sujet, des solutions d’organisation ont été expérimentées. Elles n’exonèrent sans doute pas l’administration centrale d’une redéfinition de sa doctrine en la matière, en étroite liaison avec le Ministère de la justice, si l’on entend régler la question du « pré-contentieux » dans un service public qui ne serait pas à la seule charge de l’inspection du travail.


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Sans préjudice des préconisations relevant de l’organisation de l’action (réf. infra), il convient de souligner que la complémentarité de ces activités, évidente et non remise en cause

- doit amener l’administration du travail à se donner les moyens de la lisibilité de la contribution de chacune d’entre elles aux objectifs de la politique du travail (indicateurs de contexte, d’activité et de résultat, et surtout indicateurs d’impact). Cette orientation est fondamentale au moment où l’inspection doit s’engager dans la mise en œuvre d’une politique publique du travail. Chaque partie de son activité doit contribuer à la réalisation de cette politique et apparaître comme telle (dans un double souci : rendre compte de l’utilisation des moyens alloués à l’inspection du travail par la collectivité et reconnaître à sa juste valeur le travail de l’agent ayant eu une activité conforme aux missions qui sont celles du service auquel il appartient). Ce chantier n’est, à ce jour, pas réellement ouvert.

- n’exclut pas une dichotomie entre ce qui relève d’une « régulation sociale » incluant le contrôle en réponse à la demande de l’usager, dont les agents et la plupart des organisations, semblent se satisfaire et ce qui ressort d’une « politique du contrôle » évoquée par le Conseil d’Etat pour le champ de la santé au travail, mais qui doit traverser les quatre champs d’investigation de l’inspection généraliste rappelés ci-dessus. Les comptes rendus d’activité au BIT, gravement affectés par la défaillance de la collecte d’information, et les premières investigations de l’IGAS dans plusieurs sections d’inspection en 2004 démontrent que l’activité de contrôle est devenue minoritaire, et parfois dans des proportions très inquiétantes. Ce déséquilibre contre nature (si l’on se réfère à l’origine de l’inspection) écarte tous risques, à court et moyen terme, d’une inspection trop centrée sur une mono-activité de contrôle qui l’appauvrirait et la condamnerait à l’isolement. Il justifie, par contre, une orientation forte pour un recentrage vers cette forme d’intervention et articulant raisonnablement priorités nationales et initiatives locales. Force est de constater que toutes les circulaires ministérielles relatives à l’activité des services sur le champ « travail » ont affirmé que le contrôle et la présence en entreprise étaient la priorité. Leur faible écho ne peut qu’interroger sur l’attention avec laquelle elles ont été prises en compte par les services et sur les réformes d’organisation et de pilotage qu’il appelle, sans perdre de vue que tous les indicateurs relatifs à la fréquence moyenne des contrôles par taille d’entreprise rend illusoire une réforme d’organisation qui ne serait pas nourrie par l’attribution significative de moyens humains.

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Cette classification ne fait pas ressortir en tant que telle les activités d’information et de conseil sur le droit du travail, a priori réparties dans l’activité de contrôle (l’objectif du contrôle étant l’application de la loi, il se concrétise souvent à l’initiative seule de l’agent de contrôle, par l’explication ou le rappel des règles formelles) et dans celle de réponse à l’usager. Elle n’éclaire pas, non plus, la mission de conseil et de diffusion d’informations sur diverses mesures d’aide à la gestion des ressources humaines, notamment dans le champ de l’emploi. Cette activité est relativement ancienne, l’inspecteur du travail généraliste se devant de prendre en compte l’amélioration des conditions d’emploi des salariés au regard de l’ensemble des dispositions du Code du travail. Elle entre dans l’action de contrôle (intégrant information et conseil) de l’autorité administrative, de traitement de la demande individuelle et parfois de prévention ou de règlement des conflits. Elle a connu un « pic » important en matière de licenciement pour cause économique de 1975 à 1986, sujet sur lequel elle reste impliquée, suivant les départements, a minima (respect des procédures) ou beaucoup plus fortement (examen et suivi des plans de sauvegarde pour l’emploi). Elle a cependant été portée par une ambition plus grande à partir de la fin des années 80. Par delà les aides visant directement le sort des salariés en tant qu’individus (emploi des handicapés, chômage partiel, convention FNE, aménagement de poste de travail…) les politiques publiques ont visé une dimension collective touchant davantage à l’organisation des entreprises, intégrant l’approche « gestion des ressources humaines et de l’emploi » dans la recherche de compétitivité. L’implication de l’inspection du travail dans ces politiques, perçue comme une chance par certains agents de contrôle, n’a que faiblement pénétré la culture majoritaire du corps, au coeur de l’opposition supposée entre contrôle et conseil (mais la baisse du nombre de contrôles ne s’explique pas par la progression très limitée, voire virtuelle du conseil sur ce champ). Le rapport du Conseil économique et social sur le danger des ignorances du droit du travail souligne ce débat en préconisant que l’inspection du travail soit centrée sur « l’état de droit » dans l’entreprise. Cette question doit aujourd’hui trouver une réponse dans l’organisation des directions du travail privilégiant l’application du droit comme objectif principal de l’inspection du travail sans perdre de vue la nécessité de cohérence entre politique du travail et autres politiques publiques relevant des services déconcentrés, au premier rang desquelles celles concernant le cohésion sociale.


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Le programme 4 « amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail » conforte l’inspection du travail sur l’ensemble des missions : veille, contrôle, information, sensibilisation, autorité administrative, conseil et conciliation. Il semble privilégier le contrôle mais n’arbitre pas vraiment dans le débat sur l’importance quantitative que doit prendre chacune des missions. Quelles que soient les décisions sur la progression des moyens et sur l’évaluation de l’organisation au niveau local, il appartient au ministère d’être directif, au moins dans les ordres de grandeur, sur la part que doit prendre l’activité de contrôle (sans négliger la nécessité de concevoir des contrôles exigeant une implication forte peu compatible avec la mesure quantitative traditionnelle du type nombre de visites) et d’assumer une part de responsabilité :

- dans la recherche d’allègement des tâches administratives,
- dans la réponse à apporter à la demande sociale, dont l’importance ne saurait être minimisée.

Cette question n’est cependant pas apparue avec le programme 4. Elle était déjà soulignée en 1981 (Elisabeth GARNOT, thèse 3ème cycle Paris IX) : « constituer une doctrine, en définissant des critères de choix, c’est pallier l’inconvénient de la gestion des urgences, et donner l’image « d’une pratique cohérente » ; c’est refuser « le coup pour coup » et l’envahissement de tâches administratives qui deviennent strictement d’exécution formelle ».


L’ORGANISATION DE L’INSPECTION DU TRAVAIL



« Trop abandonné à lui-même, trop peu soutenu, trop peu contrôlé, l’inspecteur du travail est livré à ses propres inspirations, tandis que dans certaines régions les contraventions signalées et les procès-verbaux déclarés sont relativement nombreux, dans d’autres départements, les poursuites sont nulles ou n’ont lieu qu’en cas d’accident. Les deux inspecteurs ont-ils péché par excès de sévérité ou de mansuétude ? Il est impossible de le savoir et nous devons nous borner à constater une extrême inégalité dans l’application de la loi. Quoi qu’il en soit, tout en reconnaissant les imperfections du système, nous serions injustes si nous ne rendions pas hommage au zèle intelligent et au dévouement plein de tact dont font preuve la plupart des agents des services ».
Richard WADDINGTON, député. Chambre des députés 10 juin 1890



1 – Le principe d’une organisation territoriale à confirmer mais à adapter

- La convention n° 81 de l’OIT est peu explicite sur le sujet, en évoquant « l’inspecteur du travail ou les bureaux d’inspection locaux »,

- Le BIT décrit l’organisation des « sections locales » d’inspection à travers la diversité des situations nationales, liées aux territoires (étendue de la zone géographique, respect –ou non – des limites administratives constitutionnelles…) et à l’organisation de l’action (spécialisée par secteur d’activité et/ou champ d’intervention pluridisciplinaire, généraliste).

- En France, le principe d’une intervention locale est un des fondements de l’inspection du travail, puisqu’antérieur à la loi de 1892 (1875). Il est consacré juridiquement par l’article L 620-5 du Code du travail et par le décret du 28 décembre 1994 relatif à l’organisation des services déconcentrés du travail de l’emploi et de la formation professionnelle.

Le décret n° 94-116 du 28 décembre 1994 pose trois principes :

- la section d’inspection du travail est l’échelon territorial d’intervention dans l’entreprise,
- le ministre détermine le nombre et la localisation des sections d’inspection du travail,
- sur proposition du directeur départemental, le directeur régional du travail de l’emploi et de la formation professionnelle décide de la délimitation des sections d’inspection.




La cour de cassation a précisé en 2003 :

- l’affectation des inspecteurs et contrôleurs dans une section territoriale du département … n’a aucune incidence sur leur compétence pour dresser procès verbal, laquelle s’étend à l’ensemble du département.

- l’inspecteur du travail de Marseille n’a pas compétence pour relever une infraction d’entrave au fonctionnement régulier du comité d’entreprise, situé au siège de l’entreprise dans le département du Nord, faute d’avoir pu relever les éléments constitutifs d’infraction en exerçant ses pouvoirs d’enquête dans le cadre de sa compétence territoriale.

Le conseil d’Etat a précisé, par ailleurs, les conditions dans lesquelles doivent être prises les décisions administratives relatives aux demandes d’autorisation de licenciement, au règlement intérieur, à la répartition du personnel dans les collèges électoraux pour les entreprises à structure complexe dépassant le cadre de la section.


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C’est une logique budgétaire et d’allocations de moyens humains qui prévaut en matière de détermination du nombre de sections, la création de sections croisant une demande motivée du CTRI (le plus souvent motivée par l’augmentation du nombre de salariés et d’établissements) et une possibilité de création d’emploi.

Des normes de référence assurent une certaine homogénéité théorique entre la charge des sections (nombre de salariés, nombre d’établissements de plus de 50 et de moins de 50 salariés) et des moyens humains (1 inspecteur, 2 contrôleurs, 1,5 secrétaire ou 2 secrétaires pour une section détachée).

La délimitation des sections est contrainte par le cadre départemental, à l’intérieur duquel le découpage territorial répond à des logiques différentes suivant les départements, le critère essentiel étant l’équilibre de la charge théorique (nombre de salariés et d’établissements, diversité comparable des activités économiques, prise en compte des temps de déplacement…) parfois au détriment d’une logique territoriale administrative, économique ou sociale. Dans les départements les moins peuplés, les déséquilibres s’accentuent : une section d’inspection pour un nombre d’établissements et de salariés très inférieurs à la référence nationale ; dans une même région, deux départements voisins comptent deux sections chacun, pour 40 000 salariés pour l’un, pour plus de 70 000 dans l’autre !

Ce mode d’organisation est ancien et majoritairement vécu comme immuable, puisque répondant simultanément à un souci de proximité et à un renforcement du caractère généraliste de l’inspection, le contrôle d’établissements exerçant tous types d’activité dans la circonscription ajoutant un critère à ceux définissant la « généralité » à partir des compétences juridiques et techniques.




Cependant, divers rapports ou analyses interrogent ce mode d’organisation avec des arguments différents :

- évolutions de l’organisation de l’entreprise (Dughera, Lenoir, Ricochon, Triomphe, Droit social février 1993),

- insuffisante prise en compte, suivant les zones, de la nécessité d’une animation par branche professionnelle (Conseil Economique et Social janvier 1996),

- risque quant « à l’indépendance et l’impartialité » de l’inspecteur, surtout dans le cas où l’inspecteur conserve pendant de longues années la charge d’une même circonscription (BIT mission tripartite 1981),

- rigidité de l’organisation du travail : « l’application uniforme sur l’ensemble des services de normes d’organisation des structures et du partage des tâches (organisation de la section sur la base d’un inspecteur chef de section et de deux contrôleurs, partage des tâches exclusivement fondé sur une répartition par taille d’entreprises), est aussi un élément d’explication important : cela interdit le développement de compétences spécialisées par thématiques ou secteurs professionnels particuliers, alors même que les conditions d’intervention sont souvent spécifiques suivant le secteur et que l’efficacité de l’action repose sur l’acquisition de savoir-faire propres à tel ou tel thème ou secteur. Cela conduit aussi à un morcellement des structures dont le champ d’intervention n’est pas en adéquation avec la carte des bassins d’emploi et à des unités de très petite dimension Au total il est très difficile dans ce contexte de faire émerger la fonction d’animation et de pilotage ». (IGAS 2002-138 Hourcade - Lannelongue – Lejeune – Lucas).

« Le cadre juridique qui organise les sections est aujourd’hui particulièrement adapté à la rénovation de leurs pratiques, à la condition toutefois de réexaminer les modalités de définition de leur périmètre : il est nécessaire de placer au premier rang des critères réellement opérationnels, prenant en compte les besoins des usagers, l’organisation des autres partenaires et la recherche de l’efficacité, sur un secteur géographique qui soit, dans toute la mesure du possible, homogène au plan économique et des activités. Cette structuration ne s’oppose pas à la vision plus large d’un territoire, qui peut être le bassin ou la zone d’emploi, englobant plusieurs sections comme niveau d’intervention pertinent pour la conduite de certaines actions collectives » (rapport Chaze – janvier 2001)




quête de technicité dans l’appréhension des risques professionnels, impliquant une identification de sections généralistes (compétences juridiques et techniques sur les quatre champs traditionnels) intervenant majoritairement sur certains risques ou certaines branches professionnelles (document de travail DRT remis à un groupe de travail du Conseil Supérieur de la prévention des risques professionnels en juillet 2004).

recherche de disponibilité et de références méthodologiques pour lutter contre le travail illégal (communication ministérielle devant la Commission nationale de lutte contre le travail illégal)

tentation de la pluridisciplinarité dans les actions de contrôle sur le champ de la santé au travail (IGAS – février 2003 Zeggar – Roux – De Saintignon) : « dans un premier temps la réponse ne peut être que pragmatique, sans préjuger d’évolution à plus long terme en fonction des résultats obtenus. Dans le cadre de son organisation régionale, la priorité doit être donnée à la constitution de sections spécialisées et pluridisciplinaires sur certaines zones ou sur certains types de risques. Elles seraient composées d’un inspecteur, d’un ingénieur, et pourquoi pas, même si le déficit médical rend cette possibilité peu crédible, d’un médecin. Ces agents seraient tous trois dotés des mêmes pouvoirs d’investigation et de sanction ainsi que d’indépendance… ».


Dans le même temps, diverses expériences sont réalisées dans plusieurs départements. Est ainsi souvent évoquée l’organisation territoriale de Haute Savoie, dans une double approche « travail emploi formation professionnelle et bassins d’emploi très typés ». Plus discrète, mais non moins novatrice, l’initiative du Finistère avec une équipe au profil de section (1 inspecteur, 2 contrôleurs, 1 secrétaire à temps très partiel), mais non désignée comme telle et non attachée à un territoire infra départemental. Cette équipe, est avant tout positionnée comme « appui ressource méthode » au service des cinq sections d’inspection. Elle intervient dans une logique de projet (conception des modalités de l’action, des outils, appui juridique), dans le cadre d’actions collectives locales articulées avec le programme 4 du Ministère. Mais son appui trouve aussi application dans l’activité de contrôle, dans des entreprises dont la liste est précédemment établie en accord avec les sections (l’agent de l’équipe « appui » intervenant seul dans l’entreprise et assumant les suites du contrôle, y compris par la sanction). Dans d’autres départements, la lutte contre le travail illégal, et beaucoup plus rarement, le contrôle des aides à l’emploi ont également constitué des sources d’aménagement à l’organisation classique des contrôles.

Cette énumération démontre une conjonction de facteurs de changement, dont le croisement met en évidence des objectifs pas toujours convergents : approche globale des « entités employeurs supra territoriales », secteurs professionnels, bassins d’emploi et logique transversale travail emploi formation professionnelle, types de risque et pluridisciplinarité notamment dans une perspective « santé au travail » ou « travail illégal » sont les principales motivations liées à la cible d’intervention. Les autres propositions sont plutôt justifiées par une recherche de meilleure organisation en terme de management interne (voire de cohérence statistique dans l’élaboration de diagnostic, ce qui pose le problème de la pertinence d’une organisation calquée sur l’outil qui devrait être à son service et non l’inverse), dont les arguments ne sauraient être négligés.

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Compte tenu de ce foisonnement de suggestions peu soumises à l’épreuve des faits et des problématiques très différentes suivant les régions, les départements (sur 103 services « départementaux » à l’échelon national, 13 ne comptent qu’une section, 27 deux sections et 14 trois sections ; seulement 24 départements comptent 6 sections ou plus mais les 24 départements de 6 ou plus représentent 56 % des sections alors que les 40 départements comptant 1 ou 2 sections ne constituent que moins de 15 % des forces de contrôle pour 12 % des effectifs salariés)et parfois les agglomérations, il semble judicieux de n’envisager une remise en cause de l’existant, (parfois construit avec difficulté et qui a souvent des avantages non négligeables) que sur la base d’un projet local, validé en CTRI après avoir été conçu avec la participation des agents de contrôle, soumis au CTPR, et prenant en compte les critères suivants :

-Amélioration qualitative (compétence, méthode, outils, partenariat) et quantitative du contrôle (surtout dans les petites entreprises), dans le respect des pouvoirs de chaque catégorie d’agent de contrôle et de l’indépendance telle qu’elle est définie par la convention 81,

- Lisibilité de l’action pour les entreprises et les salariés (application de l’article L 620-5 : la délimitation de la section et son organisation définissent a priori quel est l’agent de contrôle qui est en charge de l’entreprise. Ce principe suppose que des instructions précises soient données concernant les conditions juridiques à créer, au regard de la double jurisprudence de la Cour de Cassation rappelée ci-dessus, pour que soit possible une intervention en entreprise ou sur un chantier, avec l’accord de l’agent de contrôle « légitime » au sens de l’article L 620-5, d’un autre agent de contrôle dans le cadre d’actions collectives renforçant le potentiel, technique ou quantitatif des moyens habituels, dans une logique de « projet ». Le sujet a déjà été abordé par la MICAPCOR dans l’instruction technique 2002-03 du 28 mars 2002

- Affirmation du caractère généraliste de l’inspection du travail avec prise en compte simultanée des liens qu’elle doit assurer (en s’appuyant sur l’action des autres forces de l’administration du travail afin de ne pas se disperser dans des activités non liées à l’action sur l’application du droit) avec son environnement sur les champs de l’emploi, de la formation professionnelle, de la prévention des risques et de la santé publique, des relations sociales, et de la justice (civile et pénale), en prenant garde de ne pas privilégier un champ au détriment des autres.





Cette possibilité d’évolution au niveau local suppose une modification du décret du 28 décembre 1994, donnant une vraie responsabilité au directeur régional et au CTRI comme l’avait suggéré le rapport IGAS 2002 – 138. Cependant, les difficultés de pilotage que connaissent les services en matière d’inspection du travail, conjuguées aux débats en cours sur l’organisation territoriale de l’Etat aux niveaux régional (possibilité d’expérimentation de pôle) et départemental (circulaire du premier ministre du 16 novembre 2004) appellent une procédure de validation au niveau central dans des cas nécessitant arbitrage notamment sur la notion de remise en cause de l’indépendance.

Cette procédure devra être prise en compte, le cas échéant, dans les réflexions sur le pilotage de l’inspection au niveau national.

C’est également la structure de pilotage national qui devrait être amenée à rechercher les pistes d’une politique de contrôle des structures complexes, dépassant le cadre du département, ou de la région. Devrait ainsi être revisitée la notion d’inspecteur du travail des sièges sociaux, avec prise en compte de nouvelles exigences dans l’allocation de moyens (y compris juridique), au-delà des possibilités entrevues avec les « dossiers partagés » du nouvel outil SITERE.
C’est elle, aussi, qui devra organiser l’action interrégionale sur des contrôles spécialisés, dans une logique de projet.

L’organisation territoriale de l’inspection devra nécessairement tenir compte, en outre, de la place des contrôleurs et agents de secrétariat (catégorie C mais aussi, le cas échéant, secrétaires administratifs si l’organisation retenue le justifie) et de la question de l’évolution des compétences des agents de contrôle que sous-tend la mise en oeuvre de la politique de santé au travail. Elle ne pourra, enfin, être concrétisée que dans le cadre d’un vrai dialogue de gestion articulant les niveaux territorial, départemental, régional et national, s’appuyant un système d’information à la mesure des enjeux.

Sans qu’il y ait lieu d’imposer de « modèle », divers scenarii d’organisation peuvent être esquissés :

 organisation départementale ou régionale (voire interrégionale) articulant découpage territorial proche de l’actuel et identification et mobilisation de réseaux de compétences thématiques. Ces réseaux, constitués d’agents de contrôle en section et éventuellement d’autres agents – ingénieurs, médecins inspecteurs, inspecteurs ou contrôleurs ou directeurs adjoints « appui ressources méthodes » - ont vocation à informer et aider, le contour de l’aide pouvant prendre différentes formes, jusqu’au contrôle en entreprise à la demande de l’agent de contrôle territorialement compétent (sur ce schéma, l’exemple de l’ANPE, conjuguant ALE et équipes professionnelles peut constituer une référence, parmi d’autres…),




organisation infradépartementale sur un territoire pertinent (dans une logique « travail » éventuellement adossée à une autre logique complémentaire, comme emploi, ou relations sociales ou justice…) plus large que les actuelles sections. Ce nouveau type de section serait placé sous la responsabilité d'un directeur adjoint qui aurait vocation à exercer lui-même le contrôle de certaines entreprises et d’assurer l’ensemble de tâches liées au responsable de service. Les inspecteurs du travail affectés dans cette section auraient la responsabilité du contrôle d’un certain nombre d’entreprises, à partir d’une logique soit territoriale, soit de secteur d’activité économique (et exerceraient la plénitude de leurs pouvoirs, le directeur adjoint n’ayant pas de compétences dans les entreprises confiées aux inspecteurs). Les contrôleurs du travail, auraient aussi un panel d’entreprise défini, dans la même logique, l’application de l’article L 611-12 étant assurée par le directeur adjoint responsable de la section (les avantages d’une telle solution répondent à plusieurs problèmes : continuité de l’activité « inspection » par des inspecteurs promus directeurs adjoints, concentration des missions d’animation et de responsable hiérarchique, inspecteurs du travail « libérés » du temps de réunions et de tâches annexes et se consacrant au contrôle avec la possibilité d’intensifier leurs compétences sur certains secteurs d’activité, contrôleurs non contraints par la règle « + de 50 - de 50 salariés » et travaillant dans les équipes plus fortes et mieux organisées, fonctions d’assistance incluant des possibilités d’action pour des secrétaires administratifs).



2 – Une organisation prenant en compte le potentiel et les difficultés des contrôleurs du travail souhaitant exercer une activité de contrôle en section

Dans son rapport de 1996, le Conseil Economique et Social envisageait de ne confier, à terme, les fonctions d’inspection du travail, qu’à des inspecteurs. Ce choix (suggéré avec la préoccupation « du respect du principe d’égalité de traitement des entreprises et de leurs salariés comme des fonctionnaires ») n’a pas été retenu et les contrôleurs en section – très minoritaires dans leur corps (32%), constituent la principale force (ils sont deux fois plus nombreux que les inspecteurs) de contrôle des sections d’inspection du travail. Le cadre juridique de leur intervention est précisé par l’article L 611-12 du Code du travail, sans ambiguïté sur la notion d’autorité de l’inspecteur du travail, par ailleurs clairement défini comme chef de service par les instructions ministérielles prises pour l’application du décret du 28 décembre 1994 (mais la lecture de ces textes n’est pas homogène, loin s’en faut, dans toutes les sections). Ils sont en principe affectés au contrôle des entreprises de moins de cinquante salariés.

Les entretiens menés à l’occasion de la présente mission ont conforté les éléments de recherche du centre d’études de l’emploi (Nicolas Dodier août 1986), les observations du rapport Chaze et une analyse réalisée de manière empirique et limitée à un département il y a quelques années sur les difficultés rencontrées par ces agents, schématiquement retracées par trois sortes « d’insécurité » :

- « insécurité physique » :
- difficulté personnelle à assumer l’acte de contrôle pour des agents n’ayant pas choisi cette fonction : aller « chez » un employeur, pour lui demander des comptes sur la gestion de son personnel ou sur l’organisation de son activité implique souvent de devoir surmonter une appréhension personnelle,

- difficulté ressentie à l’égard des réactions des personnes contrôlées rarement ravies de l’être… et parfois hostiles, voire violentes,

- difficulté à vivre des circonstances de contrôle douloureuses qui peuvent traumatiser (enquête accidents graves ou mortel par exemple),

- difficulté à exercer dans un milieu dangereux (chantiers amiante, contrôle de bâtiment impliquant l’accès à des plates-formes de travail en hauteur…)


- « insécurité juridique ou technique »
difficulté à maîtriser le code du travail, à percevoir les procès de fabrication ; cette difficulté est d’autant plus ressentie quand le pilotage de la section n’est pas suffisamment assuré pour « sécuriser » l’agent,

difficulté à gérer les priorités, surtout devant le flux de demandes individuelles, (dont celles concernant les dérogations d’utilisation de machines dangereuses , R 234-22)

difficulté à supporter les risques de responsabilité pénale du fonctionnaire

- « insécurité financière » (le terme, cohérent dans la présentation des trois « insécurités », est sans doute excessif)
 dans les grandes villes, système de remboursement des frais de déplacement peu favorable,

difficulté, en début de carrière, à financer le véhicule personnel indispensable pour exercer son activité professionnelle, si le nombre de véhicules de service est insuffisant

rémunération variable souvent inférieure à celle servie aux contrôleurs affectés sur le champ emploi ou de l’administration générale, récompensés par leurs charges d’encadrement, et fonctionnellement plus proches des DDTEFP,

notation parfois moins « avantageuse », et de ce fait déroulement de carrière moins rapide (pour les mêmes raisons).



Ces trois types de difficulté sont surmontées par beaucoup de contrôleurs très motivés et très attachés à leur fonction. Elles sont aussi relativisées, dans certains départements par nombre de contrôleurs souhaitant être affectés en section d’inspection du travail alors qu’ils occupent d’autres fonctions. Elles exigent cependant une réponse adaptée intégrant, pour partie, une organisation du travail tenant mieux compte du profil des agents et de leur capacité à exercer des missions de contrôle plus ou moins complexes. L’organisation de la section (et, par delà, de l’intervention de la DDTEFP dans la politique du travail) est déterminante sur ce point, et des expériences privilégiant des logiques thématiques ou territoriales, en prenant de la distance (dans la limite de l’article L 611-12) avec le schéma actuel, uniforme et inégal dans la répartition des moyens mais disparate dans les modes de management, peuvent offrir une nouvelle opportunité professionnelle aux contrôleurs du travail. Dans ce cadre, il serait opportun de procéder à une première évaluation des expériences menées, dans la continuité du rapport Chaze, dans des sections à 3 voire à 4 contrôleurs, qui ne sauraient cependant constituer la réponse unique aux problèmes posés et notamment à celui de l’insuffisant accompagnement de la hiérarchie de proximité.



3 – Assurer l’évolution des compétences et des modes d’intervention liées aux problématiques « santé au travail » et à leurs enjeux

Le passage d’une intervention dans le domaine de l’hygiène et de la sécurité à la participation à une démarche de « santé au travail », induit une approche professionnelle différente, d’autant que la logique de l’évaluation des risques modifie sensiblement le positionnement du principal interlocuteur de l’agent de contrôle : l’employeur. Cette évolution, aussi perceptible dans les procédures d’arrêt de chantier et d’autorisation de reprise de travaux, impose-t-elle cependant une compétence de « spécialiste » ? Et faut-il parler « d’expertise technique » ou, comme l’avait précisé la circulaire DRT du 4 février 2000 au sujet de l’évaluation des risques, « remplir pleinement sa mission classique de contrôle de conformité », non exclusive de sensibilisation et d’accompagnement partiel des acteurs ?

Dans la revue préventique n° 68 de mars-avril 2003, Jean Morvan souhaite que les pouvoirs publics « veillent à la bonne clarification.. sur les rôles respectifs du contrôleur et du contrôlé ! ». L’auteur, s’appuyant sur la circulaire n° 2 DRT du 23 février 2000, sur une circulaire du 10 mai 2000 du Ministère de l’Environnement, et sur une note conjointe travail/environnement du 14 décembre 2001 (installations classées) conclut à l’accroissement effectif de l’implication des agents de contrôle du ministère du travail dans l’élaboration même du plan de prévention d’un chef d’entreprise … sans encourir pour autant le risque d’une confusion des rôles. On serait plus dans l’évolution d’une posture que dans un changement « de métier ».

Cette distinction est reprise, voire amplifiée par les universitaires consultés au cours de la présente mission (Ph. Auvergnon, JE Ray, Mme Thébaud-Mony, PY Verkindt). J’en retiens une forte insistance sur la pluridisciplinarité (contraire à « l’isolement » et à « l’autonomie » de l’inspecteur du travail) et la nécessité d’avoir suffisamment de compétences pour vivre cette pluridisciplinarité. A ce sujet, PY Verkindt a valorisé plusieurs formules :

- l’inspecteur doit avoir suffisamment de connaissances « techniques » non pas pour apporter des réponses mais pour poser les bonnes questions,

- ces connaissances sont de trois ordres : l’aptitude à la compréhension des procès, les éléments de langage, et une familiarisation avec les cultures des autres intervenants (ces pré-requis devant être opposables à tous les agents de contrôle « généralistes » : « l’inspecteur isolé est mort »).

- l’inspecteur du travail ne doit pas être dans la « contradiction » avec l’employeur. Il doit être dans la « décision », le cas échéant après avoir organisé la contradiction entre l’employeur et de vrais spécialistes.

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D’un échange avec un agent de direction de l’école nationale supérieure des officiers de sapeurs pompiers, il ressort que les fonctionnaires recrutés par cette école sont traditionnellement des ingénieurs (Mines notamment). Or les réflexions en cours portent sur la diversification des recrutements pour prendre en compte simultanément l’évolution de la notion d’évaluation des risques, et les exigences du management (recours à des « spécialistes » ressources humaines).


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Une enquête menée auprès des inspecteurs du travail (peu nombreux et majoritairement titulaires de DUT hygiène et sécurité !) recrutés au cours des dernières années en justifiant d’un diplôme technique ou scientifique, montre que les intéressés observent :

- la prédilection, à ne pas remettre en cause, du droit et de la culture générale dans le métier d’inspecteur du travail,

- l’actuel concours n’interdit pas à des « techniciens » motivés d’intégrer l’inspection. Un recrutement plus ciblé n’est pas souhaité, les fonctions d’appui étant à développer pour se doter de compétences techniques et scientifiques à côté des sections d’inspection du travail,

- la question des « aptitudes » est plus importante que celle des compétences,

- la formation antérieure est un atout pour le métier en section,

- elle n’est déterminante ni dans les affectations à la prise de fonction, ni dans le déroulement de carrière… souvent en dehors de l’inspection en section.

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La promotion 2004, actuellement en cours de scolarité, présente la particularité de compter deux scientifiques (DEA de chimie atmosphérique pour l’une, maîtrise de biologie pour l’autre), qui témoignent de l’intérêt du concours d’inspecteur du travail, tel qu’il est, comme un des seuls faisant une place aux scientifiques (« l’épreuve de droit du travail pouvant être préparée sur mémento ») mais qui n’est pas assez connu parmi les étudiants en sciences. Elles récusent l’idée qu’elles puissent être des « spécialistes », leur formation scientifique les laissant dans la catégorie des « généralistes », affirment ne pas avoir de difficultés à suivre la scolarité à l’INTEFP, sans se distinguer de leurs collègues… et s’en sont remises à des critères géographiques pour choisir leur future affectation, en SEPES pour l’une, en service emploi pour l’autre ( !)

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Les directeurs régionaux du travail de l’emploi et de la formation professionnelle, interrogés sur les expériences éventuellement menées et sur les possibilités d’évolution d’organisation de l’inspection du travail en matière de spécialisation plébiscitent (10 réponses) une intensification des appuis et réseaux, mais se montrent très prudents voire hostiles face à la notion de « spécialiste généraliste ».

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Enfin, le rapport d’inspection générale sur l’accident survenu à l’usine Nitrochimie de Billy-Berclau (Pas de Calais) ne préconise pas une spécialisation de l’inspection du travail, mais une évolution des outils et une organisation de l’interministérialité et de la pluridisciplinarité. Celui sur la prévention sanitaire en milieu du travail (Hayet Zeggar, Jacques Roux, Pierre de Saintignon, février 2003) opte encore plus clairement pour la pluridisciplinarité : « l’évaluation des risques est l’occasion de réorienter les réseaux institutionnels (médecins du travail, CRAM, inspection, consultants, experts…) d’améliorer leur coopération et de mettre en œuvre concrètement la pluridisciplinarité… le caractère pluridisciplinaire des interventions, et par voie de conséquence, leur technicité posent la question du caractère généraliste de l’inspection du travail, à la fois en terme de formation et en terme de connaissances techniques, en particulier sur cette question précise de la prévention des risques sanitaires au travail. Dans un premier temps, la réponse ne peut être que pragmatique, sans préjuger d’évolutions à plus long terme en fonction des résultats obtenus ».

Dans cette proposition, on note une évolution vers la spécialisation de l’inspection à travers une pluridisciplinarité, avec l’inspecteur dans une posture plutôt traditionnelle.


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Il n’en reste pas moins qu’un sondage FITS (IFOP – IPSOS) souligne le recul de l’image « d’efficacité » de l’inspection du travail sur les questions de santé et sécurité au travail : 32 en 1994, 21 en 1997, 18 en 2000. Dans le même temps, les agents de contrôle, et surtout les contrôleurs ne cachent guère le sentiment d’insécurité qu’ils éprouvent pour « s’aventurer » sur certains contrôles dans le domaine de la santé au travail.

Sans méconnaître le besoin d’une analyse plus fine que suscite cette évolution, elle fait écho aux différents constats de l’IGAS relatifs « aux marges de progrès » de notre système d’inspection du travail, qui, pourtant, a multiplié les initiatives, en réponse aux instructions de la DRT, sur le champ de la santé au travail. Possède-t-on aujourd’hui une capitalisation de tous les outils méthodologiques conçus en région ou département, est-on à même d’apprécier les difficultés qu’ont rencontrées les agents (notamment en terme de connaissances) impliqués dans cette profusion de démarches locales ?

L’INTEFP a procédé, en 1998, avec le CAFOC et le CNAM, à une définition des savoir-faire des inspecteurs du travail. Ce document, largement utilisé par la DAGEMO pour son étude métier conserve sans doute un intérêt qui justifie une mise à jour, à laquelle les biennales de l’inspection, grâce à l’implication de la DRT, apportent une première orientation (même si le produit semble s’essouffler). Mais cette étude porte sur le travail réel, et non sur le prescrit (qui n’existe pas vraiment) ou le souhaitable (qui reste à définir).

Vincent Tiano, directeur adjoint du travail, a réalisé un travail colossal sur l’inspection du travail et l’évolution des risques et les éléments d’analyse qu’il comporte, y compris ceux résultant de l’exploitation de questionnaires auprès d’agents, méritent d’être pris en compte.

D’autres éléments pourraient enrichir ces analyses, notamment les programmes de recherche conclus par la DRT, en région parisienne (Seine Saint Denis : suivi des cancers d’origine professionnelle, mais aussi Hauts de Seine et Yvelines) et les investigations que mène l’INTEFP sur le champ de la santé au travail, dans le cadre d’un groupe projet mis en place en septembre 2004. En janvier 2005 ce groupe proposera à la DRT et aux réseaux de formateurs sur le champ de la santé au travail une grille d’analyse d’évolution des compétences et des actions de formation.

Il convient donc d’intensifier les études et recherches sur le « métier » et la « posture » :

- quelles compétences nécessaires ?
- quelles compétences (inégales) actuelles ?
- quels écarts ?
- programmation d’une action de formation d’envergure (bien au-delà des possibilités budgétaires de l’INTEFP en 2005) visant à combler ces écarts, intégrant, si besoin est, des recrutements spécifiques, dans le prolongement de ceux inscrits dans la loi de finances 2005.


Sans préjudice des éléments complémentaires apportés ci-dessous dans les parties « appui ressources et méthode », « pratiques professionnelles » et « gestion des ressources humaines », il paraît souhaitable d’engager dès 2005, une action de communication ciblée sur le concours d’inspecteur du travail auprès de diplômés des facultés des sciences et des écoles d’ingénieur, (mais aussi des facultés de droit ou instituts ayant intégré la notion de « santé au travail ») et une action de même nature auprès des IUT pour le recrutement des contrôleurs dans un souci de diversification des recrutements et de croisement des cultures.

Dans le même temps, les directeurs régionaux et départementaux (réf. infra paragraphe 6) doivent être, en étroite concertation avec les agents de contrôle, en capacité d’organiser l’action des services, le cas échéant en adaptant le cadre actuel de découpage des sections afin de permettre une amélioration quantitative et qualitative des contrôles en utilisant au mieux les compétences existantes (combinaison entre agents de contrôle et forces d’appui - réf. infra paragraphe 4) et en les faisant évoluer en fonction des besoins (programme de formation) et en les intégrant dans la construction d’une pluridisciplinarité, seule alternative à la spécialisation, qui paraît porteuse d’une rupture actuellement inacceptable dans les services.



4 – Une fonction appui technique et ressources méthode à conforter et diversifier au sein des services déconcentrés

4.1 – Les compétences « techniques » des services à étendre et à mieux utiliser

4.1.1 - En ce qui concerne le niveau régional elles ont été examinées
par le rapport IGAS n° 2001089 de septembre 2001 (Amson – Boulanger – Lucas). Le bilan qui avait été alors fait peut être rapidement (et imparfaitement) mis à jour avec une vision prospective.


SEPES : « inégalité dans la mobilisation des équipes régionales sur le champ de la santé et sécurité au travail, avec des tentatives intéressantes en Rhône Alpes et en Bourgogne ». Trois ans plus tard, un effort considérable a été réalisé dans la plupart des régions avec un soutien fort de la DARES, notamment dans la production d’éléments chiffrés sur l’ensemble des problématiques de la politique travail. Le service rendu reste hétérogène, et les recommandations formulées en 2001 sont sans doute plus que jamais d’actualité en ce qui concerne :
 l’élargissement de l’analyse et de l’utilisation pertinente des données pour concevoir les actions à conduire,
 l’évaluation des résultats des actions conduites,
 la prospective.


Inspection médicale du travail et ingénieurs : le temps consacré à l’appui des actions de contrôle était évalué de 5 à 20 % pour les MIRT et entre 30 et 50 % pour les ingénieurs, avec surtout des différences inexplicables, d’une section d’inspection à l’autre, dans la pratique des recours à l’appui. Le jugement semble toujours d’actualité et contribue à la nécessité de rompre avec l’approche trop individuelle des agents de contrôle (fermement condamnée, dans le champ de la santé au travail, par les analyses externes rapportées ci-dessus, conditionnant l’opportunité d’une inspection du travail généraliste à la capacité pour celle-ci d’entrer dans une pluridisciplinarité résolue) : « diversité dans l’approche du métier d’inspecteur du travail et de la place qu’il convient d’accorder aux questions de santé et de sécurité au travail, réticence à aborder les questions techniques, disponibilité effective de techniciens parfois trop peu nombreux, difficulté à concevoir et à organiser un travail structuré et pluridisciplinaire, individualisme ». L’IGAS relevait aussi un décalage entre les sections dans la façon d’assurer la mission du service public de l’inspection du travail en observant une très inégale utilisation des outils méthodologiques et supports techniques conçus à l’échelon régional. Le renforcement souhaitable, et insuffisamment engagé (loi de Finances 2005) des possibilités d’expertises internes sur le champ de la santé au travail, qui devrait aussi être complété par des recours à d’autres types de compétences (ergonome par exemple) impose que soient mieux définies les conditions de recours à ces experts par les sections et aussi les conditions de leur intervention.


Economiste : la mission constatait la disproportion entre la mobilisation des compétences « micro économiques » des économistes et celle des compétences « macro économiques » (« les économistes contribuent rarement à l’analyse de la conjoncture régionale ou de la situation d’un secteur d’activités »). A l’heure où le contenu des diagnostics « travail » demeure problématique, la contribution des économistes à la conception locale de la politique du travail paraît devoir être remise à l’ordre du jour.


Documentation : « il apparaît que les directions départementales ont créé des sections de documentation ou que les agents se sont constitués parallèlement des documentations autonomes ». L’évolution des techniques doit conduire à une vigilance accrue sur ce thème, la multiplication des possibilités d’accès à des documents électroniques impliquant un relâchement, dans certains services, de la volonté d’organiser l’information et la documentation, dont sont victimes les moins performants dans l’utilisation de l’outil. La politique régionale de documentation doit donc être un des éléments de l’appui à l’inspection du travail, avec une optimisation de la mutualisation, adaptée aux spécificités locales.


Communication : « on relève cependant que la communication n’est pas encore spontanément conçue comme un élément intrinsèquement lié à l’action… ». … Tous les précédents développements plaident pour une meilleure lisibilité de l’action de l’inspection et donc pour une meilleure maîtrise de la communication (à intégrer dans la conception de l’action, qu’elle soit collective ou individuelle).
Le traitement des recours : « la tendance est au développement progressif de ce type de tâches »… justifiant un accroissement des fonctions d’appui juridique général... ou spécialisé qui pourrait être mobilisées sur d’autres tâches que le traitement des recours (droits administratif, pénal civil…)


La recherche d’une meilleure opérationnalité des appuis clairement identifiés au niveau régional ne doit pas faire perdre de vue les diverses expériences menées dans des directions départementales et qui tendent à faciliter l’action de l’inspection du travail sur ses activités fondamentales. Le plus souvent ces initiatives portent sur le traitement de la demande individuelle (confié à un service spécialisé, avec divers degrés d’implication dans la relation avec les sections d’inspection du travail) ou sur les politiques de l’emploi (contrôle des aides à l’emploi, suivi des plans de sauvegarde de l’emploi, traitement des enquêtes « main d’œuvre étrangère » ou abattement de salaire des travailleurs handicapés, etc…). Ces pratiques, plus ou moins connues, ne sont pas transposables partout, et il convient d’en assurer la diffusion davantage dans une logique de référence pour la réflexion que d’exemples pour une modélisation. En tout état de cause, ces réflexions doivent intégrer l’aspect « santé au travail », pour envisager, si les moyens budgétaires le permettent, un renforcement de l’appui à l’échelon départemental, quand la nature et le nombre des contrôles le justifient.


4.1.2 – S’agissant du niveau national, la présente mission n’avait pas
pour rôle d’examiner le fonctionnement des services centraux, mais elle n’a pu qu’entendre une énorme attente vis-à-vis de la Direction des Relations du Travail, à peu près symbolisée par cette remarque d’un directeur adjoint du travail fortement impliqué sur le champ « travail » : « très clairement… la DRT est sous dimensionnée, en particulier au niveau des bureaux CT mais aussi NC. Il manque vraiment des appuis pour répondre aux nombreuses questions ou pour relayer les remontées des collègues dans leurs rapports trimestriels. Il faudrait étoffer les bureaux techniques ».

Bien sûr, la réponse à ce constat sans nuance doit conjuguer moyens de la DRT et organisation des relations entre niveaux central, régional, départemental et local avec le souci d’articuler la production de textes et leur application d’une part et entre l’action de l’inspection et celles de tous les autres intervenants sur le champ du travail.

Les moyens de la mission d’animation, doivent être à la mesure de l’enjeu, explication et conviction (toujours plus) conception d’outils mais aussi analyse, capitalisation, validation et retour vers les services sur les données qu’ils ont fournies (pour mémoire on rappellera aussi la nécessité absolue du bon fonctionnement du système d’information)



Les sous-directions de la DRT devront aussi être renforcées pour répondre à l’attente des services. Tout en soulignant que l’actualité de l’élaboration du « plan santé au travail » met davantage en lumière la sous direction concernée sans justifier que soient négligées les autres sous directions, il convient de relever que les relations avec les services déconcentrés, bien que citées comme une des 4 priorités de la sous-direction (avec les questions communautaires et internationales, l’interministérialité et le dialogue avec les partenaires sociaux) pâtit de l’importance des trois autres et se traduit par une vie inégale des réseaux de correspondants (avec un faible retour pour les agents n’étant pas dans les réseaux), une visibilité insuffisante des compétences disponibles pour les services déconcentrés et une condamnation véhémente par les agents de contrôle de la relation centrale/services déconcentrés telle qu’elle est illustrée par la publication du décret bâtiment du 1er septembre 2004, sans communication particulière, si bien que l’analyse des textes et le guide méthodologique ont été faits dans chaque DRTEFP, voire dans chaque département, et parfois dans les sections d’inspection (et pendant ce temps là on espérait que les agents étaient en contrôle…).


4.2 – Les compétences externes

4.2.1 – Des réseaux plus ou moins anciens à revisiter, de nouveaux à explorer

Dans le cadre de son étude sur les perspectives d’évolution des services déconcentrés du secteur travail, de l’emploi et de la formation professionnelle, l’IGAS a constitué, en 2004, un groupe de travail sur leurs relations avec leurs partenaires et opérateurs. Les investigations de ce groupe, dont le résultat n’a pas été publié à ce jour ont notamment porté sur les relations de partenariat des services sur les champs de la santé et de la sécurité au travail et de la lutte contre le travail illégal. Ont été ainsi recensées les difficultés à surmonter certains clivages institutionnels autrement que par les relations interpersonnelles et à identifier les possibilités de nouvelles coopérations (ORST, IPRP, voire ARACT) dans le champ de la santé au travail. L’organisation de nouvelles modalités de gouvernance au niveau régional annoncée dans le projet de plan « santé au travail » serait sans doute l’opportunité de mieux préciser les choses et donnerait aux Directeurs régionaux la possibilité de piloter la mise en place de partenariats construits, dans le cadre de projets portés par la politique de contrôle de l’inspection du travail. Indépendamment de cette évolution souhaitable, il convient sur certains types de risques, de faire un premier bilan de l’application des textes relativement récents (relations avec les DRIRE par exemple) ou de la mise en œuvre de principes portés par le rapport présenté par Y. Lecointe, JP Chassine, H. Legrand, en mars 2004, suite à l’accident « Nitrochimie ».

Dans le même temps, des possibilités d’enrichir et de rendre plus efficaces les contrôles de l’inspection du travail (en tenant compte aussi de la nécessité d’en améliorer la lisibilité, sans remettre en cause l’indépendance de décision qui lui est garantie), seront à explorer dans le cadre de la notion d’interministérialité définie par le décret du 29 avril 2004 sur l’organisation administrative de l’Etat.

En matière de lutte contre le travail illégal, une évaluation des pratiques des services dans le cadre du COLTI et des GIR devrait être réalisée pour mieux définir les pistes d’amélioration.


4.2.2 – Des besoins ponctuels auxquels il faut répondre

Au-delà des appuis internes et externes habituellement recensés et susceptibles d’être mieux organisés et sollicités, certaines investigations dans des domaines précis et habituellement peu investis peuvent nécessiter une expertise externe, dépassant les contours des compétences disponibles dans les services. Deux réponses peuvent être apportées à cet état de fait :

- l’extension des obligations à la charge de l’employeur, mais aussi la possibilité pour les services déconcentrés de conclure une convention ponctuelle avec tel ou tel spécialiste (droit spécialisé, santé, etc…) sur le modèle de ce dont bénéficient les DRIRE avec la possibilité de consulter l’INERIS ou l’IPSN, le coût de la consultation étant à la charge de l’employeur. En marge de la présente mission une directrice adjointe du travail affectée à l’INTEFP a listé un certain nombre de propositions visant à renforcer la capacité d’expertise de l’inspection du travail. Elles sont annexées au présent rapport,

- la possibilité pour les services déconcentrés de conclure une convention ponctuelle avec tel ou tel spécialiste (droit spécialisé, santé,…) ou laboratoire. Une ligne budgétaire « action spécifique travail » mise à disposition des directions régionales pourrait permettre un tel recours (à défaut de ligne budgétaire spécifique, une instruction aux DRTEFP rappelant la possibilité d’un achat de prestation dans le cadre de la dotation des crédits de fonctionnement courant pourrait peut être répondre aux besoins).

Une ligne budgétaire « action spécifique travail » mise à disposition des directions régionales pourrait permettre un tel recours.


4.3 – Les réseaux « appui ressources méthodes » internes au service

Dans la continuité du rapport Chaze chapitre IV 1.2, la MICAPCOR a pris l’initiative de constituer et d’animer « en réseau » les agents dédiés, dans les organigrammes des DR et DD à l’appui des sections d’inspection du travail. Le réseau compte aujourd’hui environ 25 participants actifs aux réunions et/ou contributeurs à la rubrique pratiques professionnelles de SITERE, mais la MICAPCOR recensait au 31 décembre 2003 27 départements (28,8 agents ETP dont 8,25 CT) et 3 régions (2 agents ETP dont 1,2 DA) ayant une fonction ARM, tout en soulignant que le caractère émergent de la fonction conduit à prendre ces chiffres avec prudence quant au contenu des missions confiées à chaque agent, sur l’appui d’une part et sur d’autres fonctions d’autre part.




Le principe est très séduisant en ce qu’il vise une meilleure professionnalisation de la fonction « contrôle » par la prise en compte collective des problèmes de méthode, de pratiques professionnelles, de connaissance des textes et une mutualisation des réponses. Une fiche de poste, validée par la DRT et la DAGEMO donne un cadre à la fonction «ARM », qui est cependant adaptée au gré des contingences locales. Un des griefs, les plus fréquemment soulevés est celui de l’affectation sur ce type de poste d’inspecteurs du travail inexpérimentés, perçus comme peu légitimes par des agents de contrôle confirmés. Il y a, pour le moins, matière à débat, mais l’optimisation de cette nouvelle fonction suppose avant tout un projet partagé au niveau territorial où elle est mise en place et une animation nationale articulant politique nationale (liens avec la DRT et toutes ses compétences techniques) et actions locales, mais aussi pilotage et appui. Elle nécessite également une clarification des rôles avec « directeurs adjoints travail » et une réflexion sur « la taille critique » des territoires où la désignation d’un ARM à temps plein est envisagé.



4.4 – Les réseaux internes « spontanés »

L’exercice des métiers d’inspecteur et de contrôleur, met en œuvre plusieurs types de compétences acquises ou construites tout au long de la vie, au gré des parcours des uns et des autres. Il en résulte une diversité de profils dans l’exercice du travail réel, souvent dénoncé comme facteur d’individualisation des pratiques à défaut d’animation et de pilotage, mais qui a aussi l’immense avantage d’offrir une somme de compétences et de savoir-faire qui donne à l’inspection du travail une richesse qui lui est propre et qui n’est sans doute pas suffisamment organisée.

Deux types de réseau « informels » émergent pour tenter d’organiser cette richesse avec le souci d’une mutualisation :

- les réseaux de l’administration : correspondants de la DRT et formateurs de l'INTEFP,

- les réseaux informels, plus ou moins repérés par la hiérarchie et le plus souvent fonctionnant sans son intervention, la réputation, locale ou régionale ou nationale de « l’expert » suffisant à légitimer sa sollicitation directe par l’agent de contrôle qui le souhaite. Il convient de saluer ces initiatives. Mais un meilleur repérage de ces réseaux, en vue d’une plus grande reconnaissance des agents (dimensions individuelles - notations, prime – et collectives – aménagement de la charge de travail, capitalisation des interventions, répartition des demandes…) et d’une plus grande efficacité collective paraît devoir être organisé à partir d’un état des lieux antérieur à l’élaboration des plans d’action locaux… en privilégiant la souplesse, souvent antinomique d’une formalisation excessive.
4.5 – Les agents de contrôle spécialisé (hors santé au travail)

Si les expériences menées ici ou là sur des champs nouveaux (contrôle des aides) ou très ciblées (main d’œuvre étrangère) sont susceptibles d’être analysées avec le plus grand intérêt, c’est le domaine de la lutte contre le travail illégal qui offre le plus grand nombre d’exemples et… d’interrogations.

Pour le CTRI Ile de France, quelques constats s’imposent :

- « il y a des contrôles sur le travail illégal dans toutes les DDTEFP, y compris dans celles où il n’y a pas de spécialistes sur cette question

- toutefois, il y a plus de contrôles dans les départements organisés avec des agents spécialisés

- la verbalisation sur le travail illégal est de loin le premier motif de verbalisation, même si l’activité des services est loin d’être à la hauteur des enjeux dans la région

- ces unités spécialisées travaillent plus facilement en réseau, en interministériel et avec d’autres partenaires : parquet, police, URSSAF… Elles sont en liaison avec le COLTI et en assure le plus souvent le secrétariat

- qualitativement, les contrôles portent sur des sujets plus difficiles techniquement et des affaires plus intéressantes dans les DDTEFP où il y a des agents mieux formés…

- mais dans certaines DDTEFP, les sections généralistes ont tendance à se désintéresser du sujet, même si dans de nombreux cas, les contrôles sont faits en commun avec les agents de section. Dans ces cas, l’agent spécialisé fait les recherches et s’occupe des suites (procédure ;..) assurant une fonction d’appui sur des sujets dont il est le spécialiste ».

Ces constats mettent en évidence des questions de fond relatives à l’articulation entre les activités de la section généraliste et de la section spécialisée (cette dernière est-elle un aiguillon, un appui, un substitut sur le thème ?)

La question de l’organisation est, en tout état de cause, secondaire par rapport à la définition de la politique de contrôle. Les fiches thématiques annexées à la note d’orientation de la Commission Nationale de lutte contre le travail illégal du 18 juin 2004 permettent de distinguer les actions qui relèvent d’une intégration dans l’activité quotidienne de contrôle, celles qui doivent être abordées dans le cadre des partenariats locaux, décidés en COLTI, et qui doivent concerner tous les agents de contrôle (avec le cas échéant, l’apport d’un agent « appui ressource méthode ») et celles qui relèvent d’organisations nationales ou régionales en fonction des filières à investiguer, et qui doivent donc être articulées à partir du niveau national ou régional, avec l’apport d’équipes projets, ou de maîtrise d’œuvre, pouvant faire appel à l’intervention des sections locales, dans le cadre d’un mode opératoire défini à l’avance (de manière assez simple pour permettre les adaptations au gré de l’avancée des investigations).

Sur cette base, l’organisation pourrait combiner trois types d’intervention complémentaires :

- la section généraliste,
- l’appui ressources méthodes : apport de compétence, et le cas échéant participation à des contrôles en cohérence avec la section généraliste,
- l’équipe projet, du niveau national ou régional, menant ses investigations, et pouvant faire appel aux sections locales.



5 – Réussir la mise en œuvre du nouveau système d’information SITERE

Un « système d’informations » doit éclairer l’action en amont et en aval (éléments de contexte, informations pratiques, indicateurs d’impact, indicateurs d’efficience) et dans le même temps, la décrire (indicateurs quantitatifs et si possible, qualitatifs d’activité). Il doit donc être indispensable à l’agent, pour donner du sens à son action, pour conforter ses pratiques et pour rendre compte de son activité, obligation consacrée par la déclaration des droits de l’homme et par la convention 81 de l’OIT dont personne ne conteste le principe et la nécessité de la mettre en œuvre.

Il n’est pas utile de revenir sur les différents épisodes de la douloureuse histoire de SIE, système encore « en vigueur » et clairement condamné par le rapport IGAS 2002-138 : « la mission n’a pu que corroborer un constat ancien sur l’inadaptation du système actuel de statistique… complètement obsolète et d’ailleurs pratiquement déliquescent ».

Ce jugement sans appel sur un outil moribond n’exonère pas cependant l’ensemble de la « chaîne de pilotage » de ses responsabilités dans l’insuffisante utilisation de l’outil, qu’une note de la MICAPCOR, le 23 mai 2002 avait qualifiée de la manière suivante : « le rapport annuel fait état de statistiques d’activités des contrôleurs et inspecteurs du travail, correspondant aux chiffres que vous nous avez fait remonter et qui ne reflète la réalité que de manière très partielle, voire incohérente… A l’évidence les données communiquées ne correspondaient qu’à un pourcentage des agents de contrôle compris selon les régions entre 30 et 70 %. Ces constatations jettent le discrédit complet sur les chiffres que nous annonçons officiellement… » (celle année-là le mouvement social des contrôleurs avait aggravé sensiblement les difficultés).

C’est pourtant, actuellement, la pression de la hiérarchie pour « quantifier » l’action qui est vécue comme un des sujets majeurs de défiance par les agents de contrôle qui réduisent souvent la politique travail au « syndrome excel » et qui vont même (octobre 2004 – Poitou Charente) jusqu’à boycotter une réunion régionale dont l’ordre du jour leur paraissait privilégier « la notion d’indicateurs » au détriment des préoccupations professionnelles des agents.

La tension est d’autant plus aiguë que les agents de contrôle soulignent que la « majorité d’entre eux » s’astreint (ce qui n’exonère pas de ses insuffisances la minorité qui ne fournit aucun compte rendu, ou qui refuse de rentrer dans le seul cadre admissible : celui défini par la hiérarchie) à des remontées statistiques régulières sur leur activité (souvent dans un rapport de force, dans la mesure où la plupart des directeurs départementaux soumettent le remboursement des frais de déplacement à la production des comptes rendus d’intervention, sous une forme ou une autre)… constituant ainsi une heureuse exception dans un ministère où ils sont les seuls à rendre formellement compte de leur activité quotidienne…, pour presque rien, puisque aucun retour sérieux autre que le rapport au BIT n’est assuré par la hiérarchie, locale ou nationale (la mission en cours de l’IGAS dans les sections d’inspection devrait confirmer le déficit d’exploitation des statistiques fournies, tout en démontrant fort opportunément l’intérêt de leur analyse, y compris par les responsables de chaque section, pour améliorer fondamentalement l’orientation de l’activité).

La question dépasse donc largement les dimensions d’un débat sur l’outil ou d’une résistance à une obligation non contestée, même si elle les intègre… Elle est au cœur de toutes les évolutions possibles de l’inspection, y compris dans sa quête de re-légitimation sociale, illusoire sans action objectivée dans sa conception, dans sa réalisation et dans ses résultats.

S’il devrait être relativement facile, dans une organisation n’excluant pas de sanctionner les manquements aux obligations fondamentales, d’obtenir des « chiffres » sur l’activité, la mise en œuvre d’un système d’information répondant simultanément aux attentes des agents et de l’administration (il ne devrait d’ailleurs pas y avoir d’intérêt antagoniste entre les deux si les objectifs de la politique de contrôle sont admis) est, dans le contexte actuel, un chantier stratégique de première importance.

Le projet SITERE, présenté comme un outil déterminant d’aide à l’action (renforcement du professionalisme et amélioration des contrôles ; facilitation du compte rendu et de l’évaluation), avec une conception ambitieuse (système de partage de l’information horizontal et vertical, ascendant et descendant), intégrant un certain nombre d’outils techniques, un entrepôt de données et un traitement des informations, apparaît comme un élément clef de l’organisation de l’action. L’ensemble de « la chaîne de pilotage » de l’inspection doit être consciente des enjeux et aucun élément pouvant optimiser la pertinence de l’outil et convaincre les agents sur leur intérêt, individuel et collectif, à intégrer ce nouveau système dans leur pratique professionnelle ne doit être négligé. étant entendu que l’utilisation de l’outil par tous doit être affichée comme obligatoire, sans les ambiguïtés qui ont, pour partie, condamné SIE.






Tout en soulignant l’engagement de l’administration centrale dans ce dossier, dont l’aboutissement est prévu pour mi 2006, il convient de renforcer encore la montée en charge technique de produits dans tous ses aspects (répertoires notamment) et les mesures d’accompagnement dans les ajustements techniques mais surtout dans l’appropriation du système par tous les agents.

SITERE n’a pas la dimension de SIE. Un échec comparable dans sa conception ou dans sa mise en œuvre serait catastrophique.

Une de ses réussites devrait être de faciliter la dissipation de l’actuel « malentendu » entre sections et échelon central sur la distance qui séparerait la « politique du travail » des « préoccupations du terrain », et qui peut, très grossièrement être illustrée par le schéma suivant :


Politique du travail
(programme 4)


action 1 action 2 action 3 action 4














Activité en section


Les cinq modalités d’intervention des sections (en l’état actuel ou après rééquilibrage) contribuent à chacune des actions du programme. Il convient donc de prévoir comment faire apparaître cette contribution continue à la mise en œuvre de la politique du travail, en dehors des seules remontées, à ce jour mal faites et peu exploitées, sur les actions concertées de contrôle, les décisions d’autorisation ou de refus de licenciement des salariés protégés, les interventions dans les conflits collectifs.




6 – Une hiérarchie départementale et régionale à conforter dans un vrai pilotage

La « relégitimation » de l’inspection du travail, l’optimisation de ses modalités d’intervention, l’adaptation de son organisation territoriale, l’ajustement interne et externe des ressources et de l’appui dont doivent bénéficier les agents ne pourront être envisagés sans l’affirmation et l’opérationnalité d’un système privilégiant la performance collective. Il convient donc de modifier fondamentalement la réalité de l’organisation des services, l’élément le plus important étant sans doute dans le rôle à jouer dans ce changement par les directeurs régionaux et départementaux (convaincre, rassurer, démontrer, soutenir, conforter, aider, outiller, mais aussi conduire, diriger, orienter, évaluer, valider, infléchir… dans le respect des droits et devoirs des agents de contrôle définis par la convention 81 de l’OIT), qui ne pourront eux-mêmes mener à bien leur mission sans que la « chaîne de commandement » ne soit également lisible et opérationnelle au niveau national.

- En janvier 2001, le rapport Chaze (pages 24 et 25) préconisait une évolution des pratiques susceptibles de tendre à une application des dispositions du décret du 28 décembre 1994 en ce qu’il précise les missions des directeurs régionaux et départementaux. Cette formule doit être soulignée. Les circulaires affirmant la responsabilité et l’autorité des DR et DD sont très explicites (même si l’exégèse, au mot à mot, est un peu moins exigeante dans la circulaire de 1995 que dans celle de 1979). Le problème n’est pas d’affirmer des principes mais de faire évoluer les pratiques, ce qui ne pourra passer que par une autre organisation.

- En septembre 2001, le rapport IGAS Amson, Boulanger, Lucas, souhaitait que le nécessaire réinvestissement, déjà partiellement engagé de la DRTEFP dans l’animation de l’inspection du travail conduise à rendre l’action plus homogène et plus efficace, en fonction à la fois des orientations données par le ministère en matière de priorités et des réalités propres de la zone géographique dans laquelle s’inscrit la section.

- En mars 2003, le rapport IGAS n° 2002-138 appelait à « mettre l’encadrement des services déconcentrés en situation de plus grande responsabilité sur l’organisation des services et la gestion des ressources humaines », en précisant qu’il s’agissait de mettre en place un mode de pilotage axé sur la recherche de résultats, ce qui impliquait simultanément « le renforcement des capacités d’action de l’encadrement dans les services déconcentrés et une plus grande participation des agents à la gestion des questions d’organisation du travail ». Ce rapport avait aussi distingué les fonctions d’appui et d’animation, exercées de manière inégale, mais avec de réelles avancées, des fonctions de pilotage largement déficitaires, à tous les niveaux de responsabilité y compris au sein même des sections d’inspection du travail… C’est pourtant sur l’appui, dans le cadre du pilotage et de l’animation des services qu’un groupe de travail mis en place par l’IGAS, à l’initiative du Cabinet du Ministre, a été à l’origine du rapport n° 2003111d’août 2003, laissant les questions de pilotage à une autre initiative qui ne semble pas avoir vu le jour… (on remarquera d’ailleurs que la pertinence de la distinction entre pilotage et appui ne suffit pas à ôter à l’appui toute utilité dans l’orientation et l’impulsion de l’action).

- Sans anticiper sur les conclusions à venir, d’une nouvelle mission de l’IGAS, encore en cours en novembre 2004 sur l’élaboration et la mise en œuvre de diagnostics et plans d’action dans le cadre de la politique du travail (enquête sur six sites), l’évolution sur les dix-huit derniers mois se caractérise par une progression de l’intérêt pour le travail collectif, avec une intensification du travail d’appui et de ressource méthode, intégrant outillage, formation, et assez souvent, information des partenaires sociaux. Dans le même temps, la notion de pilotage n’émerge pas :

- diagnostics hétérogènes dont la valeur ajoutée est limitée, notamment dans une logique diagnostic/plan d’action…

- plans d’action faiblement éclairants sur leur statut, les objectifs de l’activité, les indicateurs associés, l’organisation de la mise en œuvre et le suivi,

- profond ancrage culturel induisant l’orientation des activités sur un mode individuel et empirique, en fonction des sollicitations externes et relativisant fortement la gestion du temps.


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Un pessimisme excessif ne tiendrait pas compte de diverses évidences, la principale étant dans la disproportion entre le caractère récent de l’affirmation d’une politique du travail et l’enracinement très ancien de la culture dominante à laquelle elle semble s’opposer. Il faut donc se situer dans une logique de moyen terme dans le processus de changement, en valorisant les points positifs, et redoublant d’efforts de conviction car il n’y aura pas d’évolution notable sans une prise de conscience de « l’intérêt à agir ».

L’optimisme, fondé sur les avancées observées, trouve cependant très vite ses limites au regard de la difficulté persistante à obtenir l’adhésion de l’ensemble des acteurs, d’autant que la réponse a minima à une commande très formelle et « lolfienne » :
« un diagnostic, un plan d’action et des chiffres » ne saurait être interprétée comme participant à une modification sensible de la logique d’intervention.

La volonté de mener une politique nationale de contrôle doit donc s’exprimer par un nouveau mode de pilotage, davantage axé sur la confiance réciproque que sur la défiance et la coercition, sans écarter cette dernière en réponse à des comportements individuels inadmissibles (refus de la légitimité de la hiérarchie à organiser une politique de contrôle, refus de rendre compte dans les formes décidées par l’autorité hiérarchique, etc…). Le rapport IGAS-ADIGE sur la mise en œuvre de la réglementation machine (mission TE/AC/EG 950101 de mars 1996) contenait des

recommandations proches de la présente : « Il s’agit de négocier un objectif de progrès dans la réalisation des objectifs ou actions précitées. Non pas « décliner » mécaniquement les obligations qui sont faites au terrain, mais faire se rencontrer autour de ces obligations :
- l’appréciation du possible,
- le choix de méthodes qui vont en faciliter l’atteinte ainsi que l’engagement à mener ce travail de méthode,
- de convenir, de part et d’autre du rôle de direction (hiérarchie) et de réalisation (sections), des moyens d’y arriver, de contrer les risques d’échec et de réagir aux dérives.

Un tel pilotage commun de l’action est à la base d’une appréciation périodique partagée et donc de la capacité de progrès collectif du terrain en question.

Une telle pratique, inspirée du management par objectif, développe un esprit de contrat entre acteurs responsables, chacun dans leur rôle. Elle a le mérite de développer de la confiance (là où des agents de contrôle ont pu en citer l’existence, il est clair que la politique était mieux vécue et appliquée). Elle est un vecteur de transformation parce qu’elle ne situe pas la relation hiérarchique uniquement sur le quoi faire mais aussi sur le comment faire (1).

Elle a aussi pour effet d’armer la hiérarchie locale pour apprécier et faire savoir ce qui est ou non possible a un moment donné et donc d’éclairer le débat de l’administration centrale en termes de marges de manœuvre ».

Cette inflexion dans le pilotage pourrait se concrétiser par une procédure s’apparentant à la notion de contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, impliquant 3 niveaux illustrés sur le schéma tracé page 45. Elle pourrait aussi combiner les principes d’organisation structurels (du type « section ») à des modalités répondant à des besoins conjoncturels ou correspondant à des projets limités dans le temps (exemple : gros chantier, action collective d’envergure sur un type de risque ou sur un secteur professionnel…), tout en faisant apparaître, simultanément les appuis pouvant être mobilisés par les agents de contrôle dans l’ensemble de leur activité (d’où la triple notion de « structure de base », « structure projet » et « réseau de compétence » figurant sur ce tableau comme éléments constitutifs de « l’organisation des sections) ».







Elle devra également tenter de remédier aux difficultés repérées par la mission IGAS 2002-138 :

- articulation des actions d’appui relevant des niveaux régional et départemental,

- diffusion et appropriation des outils conçus au niveau régional (ce qui passera sans doute par une association de l’échelon local en amont de la conception)

- animation adaptée aux rôles de chacun (et notamment animation opérationnelle des chefs de service).

Elle supposera surtout une grande disponibilité des directeurs régionaux et départementaux, une modification de leurs pratiques et la mise en œuvre de nouveaux savoir-faire. L’assistance dont ils pourraient bénéficier de la part de directeurs adjoints ou de directeurs sera particulièrement importante, mais devra être limitée à l’appui, la responsabilité du pilotage ne devant pas être déléguée.












le ou la DRTEFP + CTRI









Document d’orientation (*) proposant l’organisation des sections ; il est réalisé sous la responsabilité du
directeur, à partir de « son » diagnostic, à croiser
avec la perception des agents en section







Ce schéma suppose, en préalable, une recomposition de l’activité des Directeurs régionaux du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle et des Directeurs départementaux du travail de l’emploi et de la formation professionnelle, avec une implication sur le programme 4 du ministère au moins équivalente à 25 % de l’engagement total (ce qui sera une difficulté majeure, impliquant une relation hiérarchique avec le niveau central hors du champ d’intervention préfectoral, mais aussi des choix sur les trois autres programmes). Cette recomposition de l’activité doit porter sur la disponibilité, mais aussi sur la capacité à dialoguer donc à redécouvrir des éléments de langage permettant la compréhension réciproque qui fait aujourd’hui défaut.

Il aurait l’avantage de distinguer les documents d’orientation, de la responsabilité de la hiérarchie mais soumis à débats et les documents d’engagements réciproques, responsabilisant les niveaux n et n + 1.

Les orientations nationales (service central) donnent les éléments de diagnostic et les grandes lignes des actions à mener par les services locaux, en précisant, au moins dans des ordres de grandeur, la part que l’inspection du travail doit consacrer à chacun de ses modes d’intervention, et les dispositions prises en conséquence de ces choix. Elle définissent aussi les actions qui pourront être menées dans le cadre de projets nationaux, conçus par le service central, et réalisés soit avec des moyens propres (affectation d’agents de contrôle sur telle ou telle mission nationale) soit par mobilisation d’agents de contrôle locaux, identifiés en raison de leur compétence territoriale ou thématique (participation à des réseaux).

Les directeurs régionaux et départementaux (approche interdépartementale en CTRI) au vu des orientations nationales, et en fonction de l’analyse des problématiques régionales, élaborent un document d’orientation régional, déclinant les orientations nationales et prenant en compte les besoins et les ressources de la région. Ce document comporte le diagnostic régional, réalisé par le CTRI, un projet de plan d’action (objectifs moyens) intégrant les possibilités d’adaptation de l’organisation territoriale des sections, la valorisation des différentes ressources (expertise, appui, outils…) mises à disposition des agents de contrôle.

Le document d’orientation départemental, élaboré sous la responsabilité du directeur départemental, à partir du document régional, est soumis aux agents de contrôle du département, qui ont ainsi la possibilité d’ajouter les éléments de leur analyse sur le contexte, les objectifs et les moyens d’action.

Sur la base du document d’orientations départemental définitif, arrêté par le directeur départemental après échange avec les agents de contrôle,

le directeur régional décide de l’organisation des sections, après consultation du CTPR, et du service central en cas d’avis non conforme du CTPR,

le directeur départemental et le responsable de chaque section élaborent un document d’engagements réciproques, à la vocation :

de définir ensemble les enjeux, dans une logique d’articulation entre les politiques nationales et les situations locales (vision dynamique d’un diagnostic : par delà le formel, qu’est-ce qui compte pour orienter l’action),

de fixer des objectifs (sur quoi faut-il agir ? comment on agit ? avec qui ?),

de prévoir les moyens (méthode, ressources, appui, organisation, moyens humains) avec un vrai dialogue de gestion entre le DDTEFP et le responsable de la section, duquel pourra ressortir en quoi l’organisation de la DDTEFP prendra en compte les liens nécessaires entre l’action de l’inspection, centrée sur l’application du droit, et son environnement sur les champs : relations sociales, justice, santé au travail, emploi et formation professionnelle, … Pourront également résulter de ce dialogue des décisions organisationnelles comme celles initiées par différentes DDTEFP, qui sans être transposables à une autre, contribuent à « l’allègement » de la charge de l’inspection sur des tâches ne participant pas directement à l’action de contrôle de l’application du droit, mais dont le caractère d’interdépendance est évident (renseignements, voire traitement des plaintes individuelles, contenu des plans de sauvegarde de l’emploi, ingénierie de l’action de contrôle, statistique et diagnostic…).

de faire apparaître les engagements des responsables de service ou de projets en terme de programmation de l’action et d’évaluation de son impact

de prévoir les modalités d’échanges avec les partenaires sociaux et les usagers au niveau régional ou départemental.

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Il conviendra également de préciser, pour faire vivre le système, la distinction fondamentale entre cet exercice collectif et l’entretien annuel d’évaluation prévu par le décret du 29 avril 2002.

Après consolidation de l’ensemble des engagements réciproques au niveau local, les DRTEFP et CTRI proposent le contenu d’un document d’engagement réciproque au service central.

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Cette proposition ne peut trouver application que dans le cadre d’un dialogue de gestion entre DRTEFP et niveau central (réf. rapport IGAS n° 2000189 de septembre 2001), ce qui suppose une organisation centrale, largement évoquée dans le rapport n° 2002-138 de mars 2003.


7 – Un service central à organiser

L’annexe 5 du rapport IGAS Hourcade Lannelongue Lejeune Lucas « positionne le problème » du renforcement de la capacité de pilotage au niveau central, en évoquant les multiples rapports, et notamment celui du BIT – mission tripartite en 1981- ayant souhaité, en vain, un service central pour l’inspection du travail française. La mission du BIT avait observé : « si certes, le ministre du travail est le supérieur hiérarchique de tous les membres du personnel de son département, il n’existe pas, pour l’inspection du travail, de service central spécialisé pouvant constituer l’autorité centrale qui devrait, au terme de l’article 4 de la convention de l’OIT, assurer la surveillance et le contrôle de l’inspection sur l’ensemble du territoire national ».

Vingt trois ans après, ni la création de la MICAPCOR, déjà ancienne, ni la publication du décret instituant le Conseil National de l’Inspection du Travail (jamais appliqué), ni l’implication très convaincue et très personnelle du Directeur des Relations du Travail dans une politique du travail basée sur l’effectivité de droit beaucoup plus récente et dotée d’une mission d’appui, n’ont répondu à l’évidente nécessité d’une « autorité ».

Il n’est donc pas original de proposer la création d’un « service central » dont la mission serait d’assurer le pilotage national de l’activité de l’inspection du travail (programmation nationale intégrant des actions de contrôle dans le cadre de projets nationaux -grands groupes, problématiques complexes avec des moyens spécifiques spécialement dédiés et/ou mobilisation des agents de contrôle de niveau local- contrats d’objectifs et de gestion avec les DRTEFP, évaluation de l’action, participation à la notation des directeurs régionaux et départementaux, articulation entre politique de contrôle du travail et initiatives locales, appui – ressources - méthodes, et liens avec les directions d’administration centrale et autres institutions intervenant sur le champ « travail » ou sur les champs complémentaires en référence à l’article 5 de la convention de l’OIT).

Le rôle de ce service central est important à bien des égards. Mais deux sujets paraissent devoir être mis en exergue :

- la réaffirmation de « l’indépendance » de l’inspection du travail, dans son exact périmètre, afin qu’elle soit respectée avec la plus grande rigueur afin d’aborder en toute clarté les évolutions nécessaires, en terme de conception et de conduite des actions en tenant compte de toutes les interactions, de plus en plus nombreuses, qui croisent les problématiques d’application du droit du travail (c’est en cela que le service central, tournant le dos à une logique corporatiste, ne doit pas être un facteur d’isolement mais d’ouverture). Dans cette optique la relation entre l’autorité et l’ensemble des directions d’administration centrale est fondamentale. Dès 1976, Claude Chetcuti écrivait dans Droit Social : « L’indépendance n’est jamais absolue et l’action de l’inspection s’exerce toujours dans des structures sociologiques et administratives définies dont l’évolution sera parfois lente. C’est dire qu’elle ne peut être le fait d’individus isolés. Elle ne peut être définie comme l’autonomie revendiquée par des individus dont l’action serait fatalement chaotique, mais comme l’indépendance d’un service, c’est-à-dire d’une structure hiérarchisée qui se distingue des autres structures qui l’enveloppent et risquent d’en être concurrentes ou obérentes. L’efficacité, s’appuyant sur la compétence des inspecteurs, suppose l’indépendance dans l’exercice de leur fonction, mais en même temps exige la mise en place d’une structure administrative de soutien et d’encadrement et la définition d’une méthodologie, puisqu’il ne s’agit pas d’une indépendance technique, comme celle du médecin, dont l’action répond à des règles déontologiques indépendantes de la structure où elle s’exerce, mais d’une indépendance administrative qui ne peut être garantie que par cette structure même ».

- la conception d’une « chaîne de pilotage » sans rupture, véritable réponse à l’observation percutante de l’IGAS (1999-090- Linsolas) : « immergés parfois jusqu’à l’apnée, dans la mise en œuvre des politiques prioritaires de l’emploi, et soumis, à ce titre, à la pression continue de l’administration centrale et des préfets, les directeurs départementaux (…) au demeurant ils savent que c’est sur ce terrain qu’ils seront jugés à l’aune de leur résultat. Qui a jamais demandé des comptes à un directeur départemental sur les résultats obtenus par ses services ou sur les actions engagées à son initiative, en matière de prévention des risques professionnels ou en matière de répression des infractions au droit du travail ?… ». Cette conception n’est envisageable qu’à la condition expresse que la « pression » ne soit pas multipliée par deux, mais répartie différemment (le constat de l’IGAS, ne pouvant être interprété que comme une reconnaissance de l’engagement à la limite du raisonnable dans une organisation nationale qui n’est pas de la responsabilité des DR et DD, mériterait d’ailleurs une actualisation au regard de l’impulsion donnée au cours des dernières années, et des démarches volontaristes en matière d’animation et d’appui, sur le champ travail, malgré une actualité toujours pressante sur le champ de l’emploi…).


Le schéma d’organisation correspondant est relativement classique :


instance de consultation des
partenaires sociaux et des usagers




- programmation en liaison avec les directions d’administration centrale
- régulation des activités collectives et individuelles
- contrats d’objectifs et de gestion avec DR et CTRI
- évaluation de l’action et des DR et DDTEFP
- communication
- appui ressources méthode
- organisation des contrôles sur des thèmes ou structures complexes, à dimensions supra-régionales





Le comité d’experts « déontologie » a déjà été évoqué dans la note d’orientation sur l’inspection du travail du 15 mars 1993, mais n’a jamais vu le jour (pas de pouvoir juridique mais influence morale forte du fait du choix des personnalités le composant).

L’instance de consultation (CNIT) a juridiquement vu le jour le 24 février 1983 (décret) mais elle n’a jamais été mise en place bien qu’annoncée par différents ministres du travail. Les organisations professionnelles et confédérations syndicales rencontrées à l’occasion de la présente mission n’expriment pas une unanimité enthousiaste sur une telle instance, et invoquent, pour certaines d’entres elles, le Conseil Supérieur de la prud’homie qui est le seul organe comparable à fonctionner… mais avec un enjeu fort qui justifie un fonctionnement constructif. L’inspection du travail ayant un statut et une vocation bien différents, il serait difficile de faire du CNIT une instance très productive (réf. diversité des déclarations des différents groupes sur l’avis du CES en 1996). La lisibilité de l’action de l’inspection du travail étant importante pour sa légitimité et pour son efficacité, il pourrait être envisagé, faute de pouvoir faire fonctionner immédiatement le CNIT, de constituer, au sein du Conseil Supérieur de la Prévention des Risques Professionnels d’une part et de la Commission Nationale à la Négociation Collective d’autre part, des groupes « ad-hoc » dont la mission serait d’être consultés sur les programmes d’action de contrôle et sur les comptes rendus d’activité de l’inspection du travail (dans la mesure où, comme envisagé ci-dessous, des instances de consultation des partenaires sociaux seraient généralisées au niveau régional, voire dans les départements, un rapport annuel sur le fonctionnement de ces instances pourrait aussi être soumis au CNIT ou à ces groupes « ad hoc »).

S’agissant du « cœur » du service central, les différentes références que donnent les exemples étrangers retracés par un document élaboré sous l’égide de l’Union Européenne en 1995 et par le manuel d’éducation ouvrière du BIT ouvrent un vaste champ des « possibles », déjà exploré, sans concrétisation, par des rapports nationaux comme, récemment ceux de l’IGAS 2002-138 ou de Jean Courdouan le 5 janvier 2002.

Il convient de souligner, toutefois, que l’organisation de l’action des services du Ministère sur la base de programmes enrichit les références, en donnant une responsabilité forte au DRT sur le programme 4, tout en positionnant, aussi, l’inspection du travail sur d’autres programmes, de la responsabilité de la DGEFP et du DAGEMO.











Au-delà de la mission d’animation existante à la DRT et des activités de la MICAPCOR, il s’agit de créer les conditions d’une part du dialogue de gestion avec les échelons de responsabilité déconcentrés et d’autre part de direction du réseau (avec évaluation), avec l’obsession de la valorisation des actions et de leur diffusion, dans les services et en dehors, mais aussi de l’appui méthodologique, par une organisation de l’échange permanent entre les sous-directions de la DRT et les services déconcentrés. Dans ce scénario les propositions déjà formulées par la mission IGAS 2002-138 de mars 2003 paragraphe 332) conservent toute leur pertinence (et semblent même confortées par les évolutions, réelles bien que non abouties, qu’a connues l’organisation centrale au cours des 18 derniers mois). Leur concrétisation, même si elle s’inscrit dans une certaine continuité, doit être conçue et présentée comme un acte fort, impliquant une rupture avec le manque de clarté actuel. Il conviendra de veiller en outre, à ce que l’autorité sur le réseau prenne en compte non seulement les priorités nationales de la politique du travail, mais aussi les activités de l’inspection inhérentes à l’ensemble de ses missions, dont celles appelant, pour le moins, une concertation avec les autres directions d’administration centrale.

Bien entendu, quelle que soit la formule retenue pour constituer le cœur du service central, ses deux attributs vitaux du comité d’experts et de relation avec les partenaires sociaux et les usagers devront être simultanément créés avec, pour le comité d’experts, la possibilité d’utiliser les travaux déjà engagés par la MICAPCOR sur la « déontologie » et sur « l’éthique ».


PRATIQUES PROFESSIONNELLES
ET OUTILS DES AGENTS DE CONTROLE




Ouvrant les journées d’échanges sur l’évolution des pratiques de l’inspection du travail le 4 novembre 1999, Jean Marimbert, directeur des relations du travail, soulignait l’utilité d’une introspection collective pour identifier un « élément du processus de la production » de nos services d’inspection, « d’autant plus nécessaire que nous nous situons dans des métiers de relation. En effet, notre métier porte avant tout sur la relation individuelle et collective avant d’être un métier juridique. Les métiers de relation sont des métiers usants, dans lesquels les agents sont constamment en friction. Echanger autour des pratiques professionnelles est aussi une façon d’échanger autour de la difficulté du métier, pour être plus efficace collectivement et pour ne pas porter seuls le poids de certaines contradictions ».


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Outre l’intérêt de cette définition du « métier de relation » (à intégrer dans les réflexions sur la « spécialisation » et sur « le recrutement »), fondamentale pour expliquer la difficulté à figer une méthodologie, cette vision des enjeux d’un éclairage sur les pratiques professionnelles met en évidence deux éléments de la fonction : processus de production d’un service et solitude face au poids de certaines contradictions.

Ces deux éléments s’opposent en effet aux certitudes encore affichées quant à l’immuabilité du fondement de l’action individuelle : légitimité « sui generis » de la mission et maîtrise de la visite d’entreprise dans sa programmation, dans son déroulement et dans les suites à donner en fonction de sa propre connaissance du milieu et du droit et de sa capacité d’écoute, notamment des salariés. Bien que confortée par le mode dominant du compte rendu de l’action (nombre d’interventions et types de décision) cette idéalisation de la personnalisation de l’action résiste mal aux évolutions de l’organisation du travail, des normes juridiques, de l’environnement institutionnel et de la complexification des sujets traités. Souvent abusivement parée d’une référence à l’article 6 de la Convention 81 de l’OIT, elle ouvre la voie à la critique d’une possible dérive vers « une pratique professionnelle autonome, individualiste, nuisible à la visibilité et peut être aussi à l’efficacité de l’action de l’inspection du travail dans notre pays » (Ph Auvergnon Respect du droit du travail : entre politique de contrôle et politique pénale –Aquitaine 2004). Surtout, elle ne répond pas à l’attente de nombreux agents de contrôle, souhaitant exercer la plénitude de leur fonction et de leur pouvoir de décision individuelle « à l’abri d’influence extérieure indue » mais dans le cadre de références collectives participant à une politique de contrôle articulant initiative et cohérence.

Dans ce contexte, qui appelle aussi un développement de la confiance entre agents de contrôle et hiérarchie, les pratiques professionnelles paraissent devoir faire l’objet de recherches et de précisions sur trois aspects, distincts mais interdépendants :

1 - La pratique individuelle : l’agent de contrôle est investi de missions et de pouvoirs, impliquant des choix se traduisant par des décisions, prises en fonction de sa capacité d’analyse de la situation rencontrée ou des problèmes posés, et mettant simultanément en œuvre ses connaissances juridiques et techniques, son intelligence des modes de relations sociales, sa culture, son éthique et sa déontologie.

Cet aspect de la pratique professionnelle a récemment fait l’objet de diverses investigations ou de projets :

- Antérieurement à la redéfinition du projet de formation initiale des inspecteurs du travail, le CAFOC de Créteil, en collaboration avec le CNAM a, en 1998, tenté de « décrire et d’analyser les activités et les compétences des inspecteurs du travail ». Basé sur une production collective, ce document conçu après confrontation avec un travail précédemment réalisé en juillet 1991 par Quaternaire Education, avait pour but essentiel, à partir de l’expression de professionnels sur leur propre activité (travail social) de dégager les compétences en vue de l’élaboration du nouveau dispositif de formation. Il a le mérite de lister des activités et de permettre d’y rattacher des compétences… mais il n’est pas un document de référence à la disposition des agents à la recherche de repères dans l’élaboration de la réponse à une situation rencontrée ou un problème posé.

- Plus opérationnel, dans la collection « les cahiers de l’INTEFP », a été publié en 2004, sous la signature de Paul Ramackers et de Laurent Vilboeuf et avec la participation de Jean-Pierre Terrier, un recueil sur « l’inspection du travail, son statut, ses missions, ses moyens et son fonctionnement ». Largement diffusé dans les services, il sera bientôt complété par le fascicule « Droit pénal et éléments de procédure pénale » (mise à jour 2004 d’un précédent ouvrage de mars 1999). Ces ouvrages de référence, qui dépassent la notion de vulgarisation, définissent le cadre avec le souci du « pratique »

- Comme rappelé ci-dessus, dans le prolongement des recommandations de l’IGAS (Roux 2003), la MICAPCOR a engagé un ambitieux travail sur « déontologie et éthique », avec l’objectif d’une production en deux étapes. La première, à l’échéance de l’été 2005, précisera les « fondamentaux » de la déontologie (le corpus des règles de base). La deuxième, plus délicate parce que moins consensuelle portera davantage sur la pratique. Ce chantier ne saurait faire perdre de vue l’abondante production de la Mission dans ses « cahiers » et sous forme de notes ou instructions (avec en point d’orgue récent l’instruction sur les procès verbaux du 28 mars 2002).

- Quelques travaux conduits ici ou là ont révélé une richesse pour les professionnels eux-mêmes (ex : travaux de DEA du CNAM de Pierre Parage, mémoire de maîtrise de Messieurs Pacca et Jouve, étudiants en psychologie à Lyon II, thèse de doctorat de Vincent Tiano sur l’incidence de l’approche de l’évaluation des risques sur les pratiques professionnelles,…). De manière moins approfondie, les inspecteurs élèves du travail produisent chaque année dans leurs rapports d’étude, un certain nombre de constats et de préconisations, peu exploités. Le prolongement de l’ensemble de ces travaux, leur valorisation, la mise en débat pourraient offrir l’opportunité d’un programme d’études et de recherches sur les pratiques professionnelles réelles et leur compréhension.

- Comme évoqué également ci-dessus, le développement du système d’information SITERE constitue une avancée importante dans la diffusion des pratiques, articulant action individuelle et action collective et valorisant notamment les travaux des agents ressources méthodes dans la rubrique « pratiques professionnelles ». Cet aspect du projet SITERE (réf. ci-dessus) renforce la nécessité de tout mettre en œuvre pour la réussite de ce projet dans son ensemble.

- Dans cette attente, le vécu des agents sur l’apport de la rubrique « pratiques professionnelles » de SITERE n’est pas homogène et l’abandon des anciens « guides de contrôle » est souvent regretté et semble constituer un des facteurs de la moindre implication sur certains types de contrôle à caractère technique. Il conviendrait de mettre en place un groupe de travail, si possible transversal aux trois services d’inspection, pour établir un échéancier de travail, privilégiant les guides à mettre à jour ou à constituer, comme, par exemple, un « guide repère pour la pratique de la visite » dont le contenu devrait être enrichi par la production de la MICAPCOR sur déontologie et éthique.

- Au-delà des initiatives nationales, de multiples actions visant à permettre aux agents de se référer à des repères dans leur action quotidienne sont menées aux niveaux régional ou départemental, sous des formes diverses : échanges organisés en réunion de service sur telle ou telle expérience de contrôle, diffusion papier ou télématique de « bonnes pratiques », ateliers, groupe de travail, etc… le foisonnement de ces initiatives témoignent d’un souci de professionnalisme… pas toujours ordonné dans un souci d’optimisation de ressources (plusieurs initiatives locales sur ce même sujet, sans coordination).

- La production de CD ROM (à ce jour conciliation, risques chimiques) reste à développer, et leur utilisation à accompagner, ces produits devant davantage être utilisés dans l’aide à l’action que dans l’aide à la formation.

Une meilleure organisation de l’administration du travail, suivant le schéma proposé ci-dessus, devrait être le principal garant de l’élaboration d’une « doctrine méthodologique » permettant aux agents d’assumer les charges de leur fonction et de les conforter dans le cadre de leur action individuelle (meilleure expression des besoins au niveau local, valorisation et validation des initiatives aux niveaux régional et national, diffusion, etc…).

Dans le même temps, dans l’hypothèse où comme proposé ci-dessus, serait organisée une participation des agents à une identification des déficiences du droit vis-à-vis des conditions de sa propre application, cette action, sous forme d’ateliers régionaux ou nationaux, pourrait aussi être mise à profit pour répertorier les difficultés à surmonter dans la conception du contrôle, dans son exercice et dans les suites à y donner.

Dans une logique très proche, la DRT et l’INTEFP devront mesurer l’évolution, en trois temps (1999, 2001, 2003) des journées d’échanges sur les pratiques de l’inspection du travail et envisager dans quelles conditions la continuité de cette initiative sera porteuse de progrès pour les agents.

Dans ce cadre, ou dans un autre, la doctrine de l’inspection quant à ses modes d’intervention sur des problématiques investies récemment devra être mieux définie au niveau national (harcèlement, stress au travail, lutte contre les discriminations…). En effet si le caractère généraliste de l’inspection du travail justifie pleinement que les agents de contrôle ne soient pas absents de l’observation et de la correction de ces phénomènes de société toujours plus importants, la forme et la méthode de leur intervention reste à définir, d’autant qu’elles contribuent largement, en l’état actuel des choses au manque de repère dans la programmation de l’action entre réponse à la demande individuelle et politique de contrôle.



2 - La pratique collective : les contributions de l’IGAS (rapport susvisé 2002-138 de mars 2003 et rapport à venir fin 2004) constituent une irremplaçable référence pour mesurer les progrès accomplis et les motifs d’inquiétude qui demeurent, ou se cristallisent. Les propositions formulées ci-dessus (à confronter avec celles de l’IGAS avec le souci de la recherche de la meilleure solution) en matière d’organisation de l’administration et du système de pilotage ainsi que celles sur les arbitrages à rendre quant aux missions de l’inspection ne doivent pas minimiser les questions plus techniques (mais néanmoins « politiques ») de l’exercice en terme de démarche diagnostic – plan d’action – évaluation.


2.1 – Sur le diagnostic, l’hétérogénéité des situations observées, y compris
dans les trois régions expérimentatrices (Bourgogne – Midi Pyrénées – Rhône Alpes), mérite un examen plus approfondi et plus général de ce qui a été réalisé et des difficultés rencontrées. Faute de n’avoir pu pratiquer cet examen, les problèmes majeurs sont provisoirement concentrés en trois directions qu’il convient de citer tout en soulignant qu’il n’est pas contestable que la conception d’une politique doit s’appuyer sur un constat préalable permettant de définir le « pourquoi », le « comment » et le « où » de l’action. Il faut également donner acte à la DRT que le « flou » qui lui est aujourd’hui reproché (absence de méthode et d’outil) est le revers d’une médaille dont le côté « face » a été mal apprécié en ce qu’il prenait le parti d’une grande initiative du niveau local dans la définition de sa politique (mais ce parti pris n’a pu résister à la réalité, et à ses antagonismes entre cadrage national de l’action et absence de maîtrise individuelle et collective de l’action de terrain).


conception fondamentale du diagnostic : est-ce une photo de l’environnement socio économique ? Est-ce une méthode de repérages des spécificités locales sur les thèmes d’intervention suggérés par les orientations nationales sur l’action (et dans ce cas, dans quelle dimension : globalité de chaque action du programme 4 ou domaines dans lesquels est souhaitée une remontée d’information dans le cadre de la DNO ?) Est-ce un moyen de faire ressortir les spécificités locales pour organiser des actions locales, dans le cadre des actions du programme 4 ?

contour du diagnostic : est-ce un diagnostic de section embrassant l’ensemble des activités économiques et des risques ? Est-ce un diagnostic départemental dans lequel chaque section doit, le cas échéant, situer la spécificité de son environnement de ses atouts et de ses contraintes ?

utilisation du diagnostic : en quoi enrichit-il le contrôle ? Facile-t-il la communication sur l’action en l’objectivant et la formalisant, ou cible-t-il des problèmes non révélés antérieurement sur lesquels il convient d’agir ? Est-il un « fil rouge » pour assurer les transitions entre inspecteurs se succédant sur une même section ?


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La réponse a priori unique à ces trois questions doit être construite avec prudence, pragmatisme et respect du travail, parfois énorme et de grande qualité, réalisé au niveau régional (SEPES notamment) et local (département et/ou section), avec un impératif : ne pas remettre en cause les avancées jugées positives dans l’efficacité du contrôle et des autres actions de l’inspection.

La DRT (mission d’animation) annonçant une future instruction sur la politique du travail, il paraît primordial qu’une méthode soit affichée, après analyse de tout l’existant et de son opérationnalité par une instance associant DRT, MICAPCOR, DARES, et DGEFP (au regard de l’éventuel lien entre différents diagnostics), et services déconcentrés. L’orientation suggérée ci-dessus d’un « dialogue de gestion » antérieur à l’organisation de l’action privilégierait la construction de diagnostics départementaux croisant des logiques nationales (le programme 4) et territoriales (différentes suivant la configuration des départements : bassin d’emploi, arrondissements, agglomérations ou communes…), sectorielles et intégrant des données sur l’activité des sections (à partir de l’analyse des CRI) à partir desquels le directeur départemental engagerait le dialogue avec les agents de contrôle qui devrait aboutir, à la définition des actions à mener et de l’organisation du travail (adéquation moyens/plan d’action ; adaptation de la répartition des compétences par territoires ou secteurs d’activité). Dans cette logique, direction et agents de contrôle auraient « intérêts liés » dans la production d’un diagnostic opérationnel. La procédure, très exigeante pour l’échelon régional et départemental, libérerait l’inspection de contraintes méthodologiques qui ne sont pas dans sa mission mais la responsabiliserait dans l’argumentaire sur l’activité (à l’inverse de la majorité des procédures actuelles où l’inspection produit des éléments, qui impactent peu ou pas son organisation et son fonctionnement).


2.2 – Le plan d’action

Il doit éclairer toute l’activité de l’inspection et, par conséquent prendre en compte l’ensemble des missions des agents de contrôle, faisant bien apparaître la place prioritaire du contrôle, après arbitrage fait par la hiérarchie et assumé par elle (qui traite la demande individuelle tout en nourrissant l’action de contrôle ? Comment allège-t-on ou répartit-on l’activité « administrative ? »).

S’agissant du contrôle, la formule de Philippe Auvergnon (document Aquitaine 2004 déjà cité) paraît devoir être privilégiée : « à l’heure où l’on semble mettre un peu de tout sous le vocable de « politique du travail », il serait bon, à défaut d’être à la mode, de continuer à souhaiter pour l’inspection du travail une définition d’une « politique de contrôle » de l’application du droit du travail : celle-ci ne réside pas uniquement dans l’orientation d’actions collectives et concertées mais devrait s’attacher à promouvoir ces dernières en distinguant les espaces qui restent nécessairement de la liberté de l’agent de contrôle à titre individuel. Une certaine crispation sur la « section d’inspection du travail » comme seul lien éventuel de véritables orientations de l’action peut rendre quelque peu pessimiste. Il faut particulièrement en France, inciter à dépasser l’invocation à tout propos de l’indépendance que l’on tiendrait de la Convention Internationale 81, précisément en lisant cette dernière…. »

On en retiendra la nécessité d’articuler, dans la programmation, les activités « réactives » et « proactives » pour reprendre l’expression des Pays-Bas, le national et le local, le réalisable et « l’inextricable » :

- une politique de contrôle par définition collective et concertée, dans la définition de laquelle les orientations nationales et régionales prennent une place prépondérante (… si possible dans le cadre du dialogue de gestion souhaité plus haut), mais prenant aussi en compte, pour partie, la réponse aux problématiques locales portées par les entreprises, les représentants du personnel et les usagers

- des espaces de « respiration » laissant libre place à l’initiative individuelle de contrôle (sans l’exclure de la programmation et du souci de contribuer à la politique du travail), afin de conserver à l’inspection sa mission de veille, voire d’anticipation sur des problèmes de société, qui doit rester un de ses traits de caractère (j’ai ainsi personnellement constaté au cours des dernières années l’utilité pour la politique du travail, d’initiatives individuelles d’agents de contrôle placés sous mon autorité sur les thèmes du spectacle vivant ou de la lutte contre les discriminations quelques temps avant que ces sujets ne soient inscrits dans les politiques nationales. J’ai aussi mesuré, au cours de la présente mission, la vivacité, 6 ans après, du ressenti des agents vis-à-vis d’une orientation ministérielle médiatisée sur la prétendue inopportunité d’investir la problématique du temps de travail de certains cadres dans certains secteurs d’activité. J’en tire la conclusion dans l’intérêt de l’application du droit du travail qu’il faut dire à l’inspection ce qu’elle doit contrôler avec tout le poids qui s’attache aux priorités mais ne pas lui dire ce qu’elle ne doit pas contrôler dans la mesure où elle reste dans le cadre de ses missions et de ses devoirs.

- une prise de responsabilité de la hiérarchie dans la définition des choix sur ce qui n’est pas prioritaire ou dans le traitement de certains sujets inextricables (dérogations machines dangereuses pour les jeunes par exemple)


2.3 – L’évaluation

- Elle est bien sûr fondamentale et doit, dans la mesure du possible porter sur l’évaluation de la politique publique de contrôle

- Ce sont donc les indicateurs d’impact qui doivent être privilégiés, sans que soient pour autant négligés les indicateurs de contexte, de moyens, d’activité, de résultats

- Le système d’information est déterminant, et la conception des indicateurs doit associer les agents dans la double recherche de leur pertinence et de leur disponibilité, mobilisable sans prendre le pas sur l’action.

- Comme indiqué ci-dessus, la politique du travail dépassant la politique du contrôle, l’activité de l’administration du travail, et l’impact de son action doivent être mesurés et évalués dans le cadre de l’évaluation de la politique du travail

- Le renseignement des indicateurs par chaque agent de contrôle, dans la forme et avec les moyens définis par la hiérarchie est bien évidemment obligatoire et le service central doit avoir les moyens de rendre effective cette obligation.


A l’exception du point relatif à l’obligation (trivialement évidente) de rendre compte dans les formes définies par la hiérarchie, les quatre affirmations ci-dessus sont suffisamment importantes pour constituer sans attendre un groupe projet associant DAGEMO, DARES, DRT et services déconcentrés pour concevoir et mettre en œuvre une politique s’appuyant sur les travaux déjà réalisés et mettant le maximum d’atouts du côté de l’administration sur ce chantier.






2.4 – L’information des partenaires sociaux et des usagers

Tout en rappelant l’importance de l’association des partenaires sociaux à la re-légitimation de l’action de contrôle dans le cadre d’une politique du travail nationale, et des moyens à mettre en œuvre pour que le service central puisse informer (pour le moins) les partenaires sociaux et les usagers dans une structure spécifique de type CNIT ou dans des groupes ad hoc d’institutions préexistantes, il convient de mettre en évidence la nécessité de prévoir, aux niveaux régional et départemental, l’information des partenaires sociaux sur l’activité de l’inspection du travail.

De l’analyse, forcément fragmentaire, qui a pu être faite au cours de cette mission, il ressort de multiples initiatives prises en ce sens par les services :

- réunion des partenaires sociaux pour présenter le plan d’action annuel et l’activité de l’année précédente (parfois dans une logique « travail », parfois dans une conception « travail emploi formation professionnelle »),

- démarches bilatérales en direction des branches professionnelles dans lesquelles s’exerce une action concertée. Par delà l’information des organisations, émerge une certaine forme d’association : information des mandants, assistance aux employeurs ou aux représentants des salariés, etc… Ces démarches ne sont pas nouvelles et ont largement démontré leur utilité dans la mise en œuvre « d’actions prioritaires »,

- formules plus pérennes de « conférence régionale » ou « d’observatoire départemental » ou « territorial » : tripartisme permettant d’approfondir les approches des uns et des autres sur un ou plusieurs thèmes de la politique du travail et pouvant aboutir à des actions communes. Davantage que l’inspection du travail, c’est l’administration du travail qui est partie prenante dans ce type d’organisation, mais l’action de l’inspection peut être valorisée en amont (présentation de son action et de ses constats comme point d’ancrage des débats) ou en aval (participation à une action de contrôle ou d’information induite par les débats ou les accords conclus au terme des débats).

Ces types de concertation doivent être tous encouragés, comme contribuant à la lisibilité et à la légitimité de l’action des services et de l’inspection en particulier. Ils peuvent en outre, déboucher sur des actions concrètes (représentation du personnel dans les PME, lutte contre les discriminations, égalité professionnelle, insertion des jeunes…) participant à la politique du travail ou de l’emploi.

Un observatoire de ces pratiques pourrait être constitué au niveau national et les informations qu’il regrouperait pourrait faire l’objet d’une présentation annuelle au CNIT ou aux groupes ad hoc s’y substituant.

Cette façon d’observer et d’analyser les pratiques paraît préférable à une organisation monolithique et uniforme sur l’ensemble du territoire, d’autant que l’examen des expériences des uns et des autres fait essentiellement ressortir le caractère évolutif, très lié aux contextes locaux et à la place des hommes et des femmes dans les systèmes. Elle semble confortée par l’expérience tout à fait intéressante des transports routiers où l’organisation du « tripartisme » dans le prolongement des accords de 1994 et du contrat de progrès engageant la profession, se traduit par des situations très diverses suivant les régions et une relative difficulté à faire vivre une instance nationale (non réunie en 2004).



3 - Les pratiques professionnelles et les contrôles « à risques »

Préalablement à toute tentative de définition, il convient de souligner, comme l’ont fait, courant octobre 2004, les CTPR et CHSR que si les violences, outrages et obstacles dont sont victimes les agents de l’inspection du travail doivent être appréhendés de manière spécifique dans la mesure où ils participent à une remise en cause du principe même du contrôle, ils ne peuvent faire passer au second plan les violences, outrages et obstacles dont sont victimes les autres agents des DDTEFP (SCRE, COTOREP, services d’accueil) et des DRTEFP (SRC…), qui doivent par conséquent être traités avec autant de détermination. Dans le même temps les aspects « recul de l’autorité de l’Etat » et « légitimité des corps de contrôle » dépassent largement les limites de l’inspection du travail et justifient une approche interministérielle respectant les spécificités de chaque corps de contrôle. Devront donc être suivies avec intérêt les initiatives prises dans plusieurs départements, dans les semaines qui ont suivi le drame de Saussignac par certains préfets (Charente, Doubs, Jura, Somme, Yonne…) et qui peuvent contribuer à améliorer, par l’interministérialité, les réponses que doivent construire les services d’inspection du travail, objet des développements qui suivent et qui tiennent compte, outre des comptes rendus des réunions de CHS et CTPR (réf. synthèse en annexe) de travaux réalisés par les DDTEFP du Nord (Lille) et du Rhône antérieurement aux faits de Saussignac, par le service départemental de l’inspection du travail de l’emploi et de la politique sociale agricole de Charente et par l’inspection générale de l’inspection des transports après le double meurtre.

La question de la pratique professionnelle paraît devoir être abordée en trois parties (la préparation du contrôle, le déroulement du contrôle, l’organisation du collectif de travail qu’est la DDTEFP) les questions relatives à la formation étant évoquées dans la partie « gestion des ressources humaines » du présent rapport.

Les éléments ci-dessous devront être confrontés aux analyses réalisées par ailleurs au niveau national (DAGEMO, cellule d’urgence et d’appui, CHS) ou déconcentré et donner lieu, le plus tôt possible, à un plan d’action (janvier ou février 2005) national, avec des déclinaisons locales. Ce plan d’action devra avoir pour finalité l’affirmation de la légitimité du contrôle et la protection des fonctionnaires dans une quadruple dimension : physique, morale, administrative et juridique. Simultanément, il devra avoir l’ambition de permettre à l’agent, selon l’expression d’un médecin, « de se protéger de toute culpabilité et faire son travail ».

On mentionnera cependant que l’écoute attentive des agents de contrôle des trois services d’inspection du travail de Dordogne, deux mois et demi après le drame qui les a frappés permet de souligner :

- le constat qui est le leur sur la dégradation du climat social dans lequel ils évoluent et qui était perçu avant le drame, mais qui s’est encore plus dégradé depuis,

- l’importance du traumatisme qu’ils subissent, et des besoins qui sont les leurs, surtout en agriculture, en terme de soutien « politique » avant qu’ils ne puissent envisager de reprendre une activité de contrôle conforme aux enjeux,

- leur grande perplexité sur les techniques de repérage des situations à risques, confrontées à la situation vécue à Saussignac : selon eux, aucune des préconisations formulées n’aurait permis d’éviter le drame,

- leur certitude sur l’efficacité et la pertinence du dispositif d’urgence et d’appui mis en place en 2003, qui a remarquablement démontré sa réactivité et sa compétence (le seul sujet d’inquiétude évoqué n’étant pas lié à la compétence de la cellule nationale, mais en rapport avec la question de l’application de l’article L 50 du Code des pensions civiles et militaires et des retraites ; cette question prenait d’ailleurs deux dimensions : celle du cas particulier de la famille Trémouille, et celle de l’ensemble des agents de l’inspection du travail, non visée par le texte).


3.1 – Préparation et conception du contrôle

3.1.1 – Repérage des situations à risques

- Dans la majorité des cas, le contrôle est programmé, dans le cadre de l’instruction d’un dossier particulier, pour traiter une réclamation, pour un contrôle « périodique », ou pour un contrôle sectoriel ou thématique. La décision de procéder au contrôle doit être assortie d’une consultation du dossier de l’entreprise afin de prendre connaissance de quelques éléments pouvant situer les conditions et le contenu du contrôle : date de la dernière intervention en entreprise (une bonne périodicité du contrôle peut participer à une « dédramatisation » par l’employeur, une répétitivité, bien que justifiée par les événements ou les investigations, peut être vécue comme de l’acharnement et susciter de l’agressivité…), caractéristiques des constats effectués au cours des précédents contrôles et des suites qui y ont été réservées, données particulières sur la situation de l’entreprise, la personnalité de l’employeur, le climat social… Cette approche suppose une tenue régulière des dossiers et leur accessibilité, quels que soient les aléas de la vie de la section et la mobilité des agents. Elle peut permettre à l’agent, même récemment affecté sur la section, de percevoir un niveau de difficulté du contrôle.



- Certains contrôles peuvent présenter, a priori, quelques risques en fonction de leur nature :

- contrôle suite à une réclamation formulée par un ou des salariés ayant fait état de difficultés possibles,
- contrôle de nuit,
- contrôle au siège de petites entreprises sans lieu de production (cette situation est fréquente dans les transports où des entreprises exercent une activité sans garage et sans bureaux, parfois avec des véhicules loués) impliquant une visite au domicile de l’entrepreneur, parfois dans des habitations isolées (secteur rural) ou réputées violentes (zones urbaines sensibles),
- contrôle dans le cadre de la lutte contre le travail illégal.


Les indices de difficultés ainsi repérés, par dossier, ou par type de contrôle peuvent, suivant leur importance donner lieu à une adaptation des modalités de contrôle :

- rechercher des renseignements complémentaires lorsque les indices laissent entrevoir des difficultés avec d’autres administrations,
- contrôle à deux,
- contrôle intégré dans une action de plus grande envergure (COLTI par exemple),
- contrôle assuré normalement, mais avec possibilité affirmée d’appeler un collègue ou un supérieur en cas de difficulté…


Quatre questions interrogeant la pratique professionnelle méritent des investigations particulières, avec des réponses partagées :

-; Le contrôle à deux : le double meurtre de Saussignac a malheureusement démontré qu’il n’était pas un élément de protection absolue. Il peut même, dans certaines circonstances être un élément « déclenchant » l’incident, si l’employeur voit dans cette modalité d’exercice une « attention particulière ». Mais il porte un certain sentiment de sécurité pour les agents, peut rendre plus efficace certaines investigations, et permettre l’expression de témoignages convergents. Ni systématique, ni proscrit, il paraît devoir être exercé dans certaines circonstances qui peuvent le justifier. Des réflexions à ce sujet ont été engagées dans quelques départements. Le résultat de ces investigations permettra peut être de définir une typologie de ces circonstances.

- la visite inopinée : son principe ne doit pas être remis en cause et son bien fondé doit être rappelé, sous diverses formes, dans les actions de communication à mener sur les missions de l’inspection du travail. Dans de nombreux cas, c’est la finalité du contrôle (travail de nuit, travail illégal) qui exige le caractère inopiné de la visite. Dans d’autre cas, bien que son principe soit maintenu, l’utilisation qui en est faite peut être modulée (siège social d’une entreprise sans lieu de production par exemple) à l’initiative de l’agent, en fonction de la nature de son contrôle et de ce qu’il entend rechercher.

- l’utilisation du téléphone portable : c’est une proposition formulée par la plupart des CHS régionaux et elle a déjà été mise en œuvre (parfois avant le 2 septembre) dans certaines DDTEFP. Elle suppose une organisation adaptée pour que l’agent de contrôle soit certain de contacter quelqu’un en cas de difficulté (astreinte pour le travail de nuit ou de la fin de semaine – ce qui n’est aujourd’hui pas possible – ou convention avec forces de police ou de gendarmerie).

- l’information préalable des organisations professionnelles : elle ne peut être envisagée que dans le cadre d’actions collectives et porter sur les conditions générales de l’opération de contrôle, avant ou après son déroulement. Elle ne saurait avoir de caractère individuel, à l’initiative de l’administration, par rapport à telle ou telle entreprise. Elle peut amener l’organisation professionnelle à informer ses adhérents de l’action collective de l’administration ce qui peut améliorer sa lisibilité.


3.1.2 – Les contrôles ne présentant pas de risques a priori

L’absence d’indices de difficulté n’emporte pas la certitude d’un contrôle sans difficulté. De multiples facteurs, envisageables mais non prévisibles au cas par cas peuvent mettre l’agent de contrôle dans une situation de tension, avec l’employeur, ou des salariés, ou des clients…

perception spontanée du contrôle : « j’ai été dénoncé », « j’ai du travail, vous tombez au mauvais moment », « mes salariés, mes voisins, ma clientèle vous voit(ent) procéder à un contrôle, ils vont penser qu’il y a quelque chose qui ne va pas, mon image va en pâtir… » « je suis chez moi ».

circonstances imprévues, qui fondent un contexte défavorable : entreprise en difficulté, incident de production, plusieurs contrôles administratifs, de nature différente, dans une même période…

Ces tensions font « partie du métier » et sont intégrées différemment par les agents de contrôle (dans son étude réalisée en Aquitaine en 2004, Ph. Auvergnon relève : « tous les contrôleurs interrogés auraient rencontrés des situations d’obstacle ; cependant seuls certains d’entre eux décident de verbaliser ; les autres disent préférer contourner la situation d’obstacles par divers stratagèmes : la maîtrise de soi, la négociation pour parvenir à se servir de l’agressivité de l’autre afin de faire avancer les choses ou tout simplement, pour certains en demandant d’être reçus par quelqu’un d’autre »). Elles supposent donc que les agents de contrôle y soient préparés (réf. ci-dessous formation) sans jamais considérer qu’elles sont « normales » et doivent être « banalisées ». Elles appellent donc une réponse, en cours de contrôle, et après.

3.2 – Le contrôle

Les conseils suivants ont été listés dans le Rhône dans le cadre d’un travail collectif (2002) :

- garer son véhicule de façon à pouvoir repartir rapidement

- à l’entrée : se présenter clairement sans hésiter à montrer sa carte de service (garder sa carte de préférence sur soi plutôt que dans la sacoche). En cas de difficultés manifestes dès l’entrée, rappeler le droit d’entrée et le droit de visite (articles L 611.8 et 12 du code du travail), et le caractère inopiné du contrôle. Dédramatiser la situation en expliquant le caractère banal d’un tel contrôle impromptu. En cas d’opposition prolongée, rappeler les suites pénales susceptibles d’être réservées à ce type de comportement,

- en cas de durcissement de la situation à l’entrée ou au cours du contrôle : garder son calme en notant ostensiblement tout ce qui est dit et expliquer pourquoi ces notes sont prises si cela est demandé. Ne pas insister si la situation devient intenable mais, en se retirant, annoncer clairement que l’on va revenir pour assurer le contrôle et que le procureur de la république va être immédiatement averti, notamment s’il y a eu outrage,

- de manière générale, rappeler clairement à la personne les enjeux de son comportement, ce qui permet de caractériser l’élément intentionnel du délit,

- lors de la visite : dans les situations a priori « douteuses » prendre en considération la configuration des locaux et ne pas se laisser entraîner dans un endroit isolé. (de même, ne pas hésiter à demander l’enfermement d’un chien agressif)… Identifier les sujets susceptibles de « faire monter la pression » très vite pour les aborder de manière opportune,

- une des difficultés consistera à distinguer l’emportement colérique de très courte durée au cours duquel l’interlocuteur pourrait laisser fuser quelques épithètes peu flatteuses de la stratégie d’intimidation délibérée dissimulée sous une apparente colère. En tout état de cause, tout noter calmement.

Par delà ces conseils, non exhaustifs, la question des pratiques professionnelles peut être abordée à travers quelques notions :

- l’autorité : elle doit être intégrée à la mission de contrôle et s’exprimer à travers l’explication, sereine, de la légitimité du contrôle :
- pourquoi un contrôle ? (éléments de contexte : contrôle de routine, instruction d’un dossier, politique nationale, locale…),
- cadrage du contrôle : contenu du contrôle (les possibilités que me donne la loi, les investigations que je vais mener, les documents que je vais examiner, les lieux que je vais visiter, les personnes que je vais rencontrer ou interroger…)
- objectivité du contrôle : impartialité, observations, constats, qui déboucheront sur des actes dont la portée est expliquée (cas de recours, procédure contradictoire en cas de procédure pénale engagée par le parquet…)

L’autorité dans l’exercice de la mission, c’est le pouvoir de la mission, et non le pouvoir sur l’interlocuteur ; le contrôleur est dans l’investigation et le constat, il n’est pas dans la contradiction et le reproche, et ne doit pas venir sur ce registre, même si son interlocuteur entend l’y positionner.


la gestion par « l’évitement » : l’évitement est légitime. En situation anormale (menaces ou difficultés à exercer le contrôle), l’agent de contrôle qui se retire n’est pas en échec. C’est le contrôle qui est en échec. Il convient cependant de distinguer le court terme et le moyen –ou le long- terme : l’évitement sur le court terme ne doit pas remettre en cause l’action pour le droit sur le moyen terme. Le principe, facile à énoncer n’est pas toujours aisé en pratique : l’agent de contrôle qui, par souci d’apaisement, considère, dans une réunion de chantier qu’il peut ne pas réagir à des réflexions mettant en cause l’autorité publique, est dans une logique (légitime, c’est lui qui apprécie) de court terme, mais il devra, ensuite, trouver le moyen, seul, ou avec le soutien de ses collègues ou de sa hiérarchie, de positionner l’autorité publique et la légitimité du contrôle. En aucun cas l’évitement sur le court terme ne doit déboucher sur la décrédibilisation dans le moyen terme ou sur l’instauration de zone de non droit. Ce principe engage l’institution et pas seulement l’agent de contrôle.


3.3 – Le collectif de travail (hiérarchie et collègues)

3.3.1 – Soutien de l’agent après un incident de contrôle

L’institution doit comprendre que l’agression (quelle que soit sa nature) est une atteinte au contrôle, donc à la fonction de l’institution, dont l’agent est victime, comme par « procuration ». Il en résulte une nécessité de « déculpabiliser » l’agent et de positionner l’institution dans la réponse à l’employeur (3.2).

L’agent qui a subi un outrage doit faire une déclaration d’accident, dans la mesure où la portée de l’incident sur son état de santé n’est pas prévisible à court terme.

Il doit signaler l’incident sur un registre, ou par une fiche, ou sur une main courante et mentionner les faits dans le dossier de l’employeur, quelle que soit la suite qu’il entend donner à l’affaire.

La victime doit être laissée libre de parler largement ou pas des événements qu’elle a vécus. Si elle a besoin de parler l’institution doit s’organiser pour lui permettre de se libérer (cellule régionale, lieu de parole sans la hiérarchie, hiérarchie, médecin, psychologue, etc…).

Elle doit être accompagnée dans la procédure judiciaire qu’il entend engager.


3.3.2 – La relation avec l’employeur ou l’entreprise

Qu’il y ait poursuite ou pas, il convient que le DDTEFP acte les incidents auprès de l’entreprise et indique que l’institution se donnera les moyens de poursuivre son action de contrôle et de veiller à l’application du droit.

Dans ce cadre, doit être appréciée la forme dans laquelle sera exprimée l’autorité de l’Etat : convocation de l’employeur, nouveau contrôle avec l’appui de la hiérarchie ou de la force publique, etc…


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La relative complexité des situations rencontrées et des réponses à y apporter justifierait que dans chaque direction départementale soit conçu et diffusé un « protocole d’affirmation de la légitimité du contrôle et de soutien des agents » rappelant les références juridiques (loi du 13 juillet 1983, circulaire et note technique DAGEMO MICAPCOR du 30 juillet 1993 mise à jour, du 24 septembre 2003 et du 3 février 2004 et les procédures et organisations qui en résultent ; articles L 611-8, L 611-9, L 611-2, L 631-1, L 631-2, R 631-1 du Code du travail, articles 224-1, 433-3 et 433-4 du Code pénal), donnant des repères méthodologiques aux agents de contrôle (par exemple fiche précisant les notions de droit d’entrée, de droit de visiter les locaux, fiche à conserver sur soi et indiquant la conduite à tenir et la procédure à suivre en cas de difficulté dans un contrôle) et précisant les dispositions prises notamment au vu de la note du 3 février 2004, ainsi que les conditions de leur mise en œuvre pour exercer le soutien moral,(disponibilité organisée de la hiérarchie, mise en place de lieux de parole fonctionnant régulièrement, modalités de saisine de la commission régionale,disponibilité de l’assistante sociale, conventions de partenariat avec des associations…) médical, administratif (main courante, fiche de signalement, registre, contact avec la cellule régionale, alerte de la cellule nationale…), judiciaire dû aux agents, et pour assurer la réalisation des contrôles (relations avec le parquet, contact régulier - mais hors dossier particulier - avec les juges du siège, protocole de relation avec les services de police et de gendarmerie).

Dans le même temps, chaque direction départementale devra revisiter son document unique dans le cadre de l’évaluation des risques, et, au delà des prescriptions et recommandations sur les pratiques professionnelles, mettre en œuvre tous dispositifs de protection, notamment ceux relatifs à la conception et à l’équipement de tous les locaux où les agents sont amenés à recevoir du public.

Le CHS régional devra recevoir, périodiquement (au moins chaque semestre) une information sur la mise en place de ces protocoles et sur les affaires ayant donné lieu à son application. Serait ainsi constitué un observatoire régional des incidents, avec un rapport annuel à présenter au CHS national (sans préjudice des procédures issues des textes susvisés) et permettant la constitution d’un observatoire national.



4 - Les outils

La volonté de mettre en œuvre une politique du travail prioritairement axée sur l’effectivité du droit doit intégrer la réflexion sur la modernisation du système de pénalités. Cette réflexion prendra nécessairement en compte les possibilités d’amélioration des moyens et pouvoirs de l’inspection du travail.

Une note de la MICAPCOR (décembre 2001) rappelle les outils juridiques à la disposition des agents de contrôle dans leur mission relative à l’inspection du travail. En outre, la mission d’appui a, dans ses note et instruction du 28 mars 2002, précisé dans quelles conditions devaient être adoptées les pratiques professionnelles et les techniques administratives des agents de contrôle, au regard des évolutions des règles issues du Code pénal et du Code de procédure pénale et de la jurisprudence.

Cet important travail est majoritairement salué, les critiques parfois formulées sur une trop grande exigence vis-à-vis des agents de contrôle confortant le jugement positif sur l’initiative.

La question des outils à disposition des agents est cependant toujours d’actualité, et porte le plus souvent sur les possibilités de développement des amendes administratives : l’important travail réalisé par Jean Michel, chargé de mission à la Direction des Relations du Travail sur les mesures civiles, administratives et pénales qui peuvent être prises par les inspecteurs du travail. Outre la correction que cet ouvrage impose à toutes les déclarations hâtives concluant « au classement sans suite de la plupart des procès-verbaux dressés par l’inspection du travail » (mais pour un agent de contrôle, c’est le classement de la procédure qu’il jugeait importante qui est mal vécue) les propositions de Monsieur Michel ont séduit une partie importante des agents de contrôle en ce qu’elles plaident pour un développement de sanctions administratives. L’auteur reprend son argumentaire dans la revue Droit Social de septembre-octobre 2004, en insistant sur « le juste équilibre entre les deux catégories de sanctions en instituant un système tout à la fois lisible, cohérent et crédible ».

Les réunions de CTPR et CHS régionaux organisées en octobre 2004 dans le prolongement du drame de Saussignac mettent l’accent sur cette solution, qui à l’examen, appelle aussi des réserves dans les services (réf. page 34 de l’étude de Ph. Auvergnon en Aquitaine). C’est en fait, l’extension du dispositif de suppression des aides à l’emploi prévu à l’article L 324.13.2 du Code du travail (travail dissimulé, marchandage, prêt de main d’œuvre) qui concentre le plus grand nombre de proposition en cas de délit d’obstacle ou d’outrage.

Sur le champ de la « santé au travail », la présente mission a été l’occasion pour deux directeurs adjoints du travail affectés à l’INTEFP et à la DDTEFP du Rhône de formaliser leurs réflexions sur les pistes ouvertes par Monsieur Michel (propositions annexées au présent rapport).



GESTION DES RESSOURCES HUMAINES




1 - Augmenter sensiblement les effectifs affectés au contrôle de l’application du droit du travail

L’avis du Conseil Economique et Social (1996) recommandait un accroissement des effectifs des inspecteurs du travail en section… sans chiffrer précisément cette augmentation, qu’il souhaitait conjuguer à une révision de la carte des sections, le rééquilibrage des différents composants des DRTEFP et DDTEFP et une grande diversité dans le mode de recrutement.

En janvier 2001, le rapport Chaze appelait un plan pluriannuel de renforcement des effectifs, et ciblait, en tendance, une possible moyenne de 25 000 salariés et 60 établissements de plus de 50 pour une section de trois agents de contrôle. Le rapport au BIT estimant, au 31 décembre 2003, la charge moyenne d’une section à 32 210 salariés, l’objectif du rapport Chaze se traduit par une cible à 1 815 agents (605 inspecteurs, 1 210 contrôleurs dans la tradition du 1 + 2) plus proche de la moyenne européenne citée par la DRT dans le document remis aux partenaires sociaux au début de l’été 2004, qui impliquerait un effectif de 2 000 agents de contrôle pour la France. La différence entre 1 815 et 2 000 paraît presque dérisoire au regard de l’effectif budgétaire au 31 décembre 2003 (469 sections = 1 407 postes budgétaires, 1 330,49 équivalents temps plein).

Dans le même temps, plusieurs commentateurs ont assorti leur recommandation quant à une progression significative des effectifs de vœux relatifs à l’organisation et aux méthodes d’intervention.

Ainsi R. Struillou (Droit Social mars 2002) : « le seul renforcement des moyens humains, pour nécessaire et justifié qu’il soit n’est pas suffisant : l’action des services, leur efficacité et finalement leur utilité sociale, ne sont pas uniquement déterminés par le nombre des agents mais également par la volonté et la capacité à élaborer un projet d’ensemble articulant les ajustements des moyens, les réformes de l’organisation et l’évolution vers les méthodes d’action plus collectives au service d’objectifs clairement définis ».

Cette exigence de concomittance (qui exclut toute possibilité de réorganisation significative sans moyen supplémentaire) entre la progression des effectifs et l’évolution des modalités d’intervention n’est pas formellement démentie par les créations de section, certes insuffisantes, qui ont pu être faites depuis la publication du rapport Chaze, à l’exemple d’une direction départementale, dont le nombre de sections a été porté au cours des dernières années (sur des bases objectives, du nombre de salariés de 12 à 15), soit une progression de 25 %, qui n’était sans doute qu’un rattrapage, mais qui malgré un investissement appréciable de la direction, reconnu par les agents, ne s’est traduit par aucune modification notable dans la programmation et la mesure de l’impact de l’action et qui laisse toujours un sentiment d’impuissance à la majorité des agents.

La notion de contrats d’objectifs, conjuguée à des orientations fortes sur les missions prioritaires et sur le traitement des besoins au détriment desquels serait assurée la progression de l’action prioritaire, pourrait répondre à cette exigence de sens collectif.



2 - Optimiser la gestion des ressources humaines en faveur de chaque catégorie d’agents participant à la mission d’inspection du travail

2.1 – Secrétariat et assistance

Les tâches de secrétariat sont moins souvent évoquées dans les problèmes de l’inspection du travail mais n’en sont pas moins objet de débat. Le rapport de l’IGAS sur l’élaboration et la mise en œuvre des diagnostics et plans d’action sur six sites devrait constituer, bien que ce ne soit pas sa vocation, les prémices d’un état des lieux, mettant en lumière une grande diversité de situation sur les effectifs, et sur le contenu des tâches suivant les sections et les personnalités… des agents et de leur encadrement (conception de l’animation de la section, culture et pratique de la bureautique chez les agents de contrôle, organisation de la réponse à la demande individuelle dans la DDTEFP et dans la section, politique de documentation de la DR, de la DD et de la section…). Le développement de l’outil SITERE, et notamment de son application REDAC V2 va sans doute contribuer simultanément à l’évolution des tâches… et à la cristallisation de quelques résistances.

Dans le même temps, la question de la place des catégories C recouvre plusieurs dimensions qu’il convient de prendre en compte :

- diminution sensible du nombre d’agents de cette catégorie en section au cours des dernières années,

- distinction entre agents et adjoints administratifs qui justifie le plan engagé par le Ministère

- émergence, à une échéance qui reste à fixer, des secrétaires administratifs,

- repli des fonctions de gestion sur les mesures emploi et formation qui peut, dans l’immédiat, ouvrir la piste à des réflexions sur un éventuel redéploiement sur le champ « travail »






Tous ces éléments plaident pour une prise en compte globale de la place des secrétariats et fonctions d’assistance (dans une sens très large, de nombreux agents de catégorie C participant à l’activité de traitement de la demande individuelle, et souvent avec un haut niveau de connaissance et de prestation) dans les réflexions sur l’organisation de l’inspection du travail et, surtout pour les deux derniers constituer des « leviers » pour concevoir de nouveaux modes d’intervention.

Il conviendra d’articuler, pour ce faire, les différents niveaux territoriaux, les initiatives locales ou régionales dans le cadre des procédures de « gestion de projet » devant être intégrées dans le cadre d’un « chantier national », réactivant les « études métiers » et « offre de service » réalisées au cours des dernières années.


2.2 – Les contrôleurs du travail

La place des contrôleurs du travail dans le système d’inspection du travail français est marquée par son importance :

- deux tiers des effectifs de contrôle,
- interventions concentrées sur les établissements de moins de 50 salariés, qui sont les plus nombreux et qui sont les moins contrôlés, alors que la structure de l’emploi, l’organisation du travail et le mode de relation justifient une technicité et un savoir faire exigeants, y compris sur les champs « IRP » et « santé – sécurité au travail ».

La question de leur positionnement est donc centrale, comme évoquée dans d’autres parties, du présent rapport en terme d’organisation, de recrutement et de formation.

Celle du statut a été explorée plusieurs fois avec deux réponses différentes, à treize ans d’intervalle (plan de transformation d’emploi en 1990 et réforme du statut du corps interministériel en 2003). L’impact de la deuxième réponse sur le moyen et le long terme reste à mesurer mais des insatisfactions sont déjà exprimées.

Par delà le sujet, primordial, du degré de satisfaction des attentes, la réforme de 2003 ne manquera pas d’avoir des conséquences en terme d’organisation quant elle devra être conjuguée avec la mise en place des secrétaires administratifs. En effet, le principe selon lequel le corps des contrôleurs était le corps unique de catégorie B dans les services déconcentrés implique une couverture très large, de toutes les activités des DDTEFP (68 % des contrôleurs sont « hors section »), avec une frontière pas toujours très claire entre catégorie C et B (services de renseignements, voire de contrôle de la recherche d’emploi) et entre B et A (gestion des mesures emploi et encadrement de service, beaucoup d’inspecteurs du travail occupant des postes comparables, même s’ils ont évolué, à ceux qui étaient confiés aux « chefs de centre). La section d’inspection du travail est par contre caractérisée par une clarté, la répartition des missions étant relativement figée entre C, B et A.



La création de postes de secrétaires administratifs va générer un certain nombre de questions et notamment :

- celles de la possibilité d’affecter des « B » sur des fonctions sédentaires en section (assistance à définir dans le cadre de projets d’organisation), heurtant la référence de base,

- celle de la mobilité des contrôleurs du travail au sein des services, une définition « a priori » (qui reste à faire) des postes de secrétaires administratifs « bloquant » les possibilités d’évolution sur des postes jusqu’à ce jour ouverts à tous les contrôleurs.


2.3 – Les inspecteurs du travail

Jusqu’au début des années 90, l’inspecteur du travail avait pour vocation d’exercer l’activité originelle et identitaire du corps. Le plan de transformation d’emploi a rompu cette logique, en réponse à une revendication des contrôleurs d’une part et à l’évolution des missions sur le champs emploi et formation professionnelle d’autre part… Il en résulte un « brouillage de l’identité », la moitié des agents de grade d’inspecteur du travail en poste au Ministère chargé du travail étant hors section (avec une petite partie de cette moitié, sur le « champ travail », et une part appréciable sur le champ contrôle de la formation professionnelle puisque la fusion des corps d’inspecteur du travail et d’inspecteur de la formation professionnelle a accru l’éventail des fonctions exercées par les inspecteurs du travail).

Très peu de temps après la mise en œuvre du plan de transformation d’emploi, la décision, imprévue dans les travaux sur l’accompagnement dudit plan, de retirer la gestion du CFI aux DRFP en transformant les DDTE en DDTEFP et « le coordonnateur de zone CFI » en « coordonnateur emploi formation » a complété « la gamme » des postes recensés en catégorie A ou équivalent, tout comme le recrutement de contractuels « chargés de mission CES ».

A cette époque, une certaine typologie des emplois, bien que non écrite et non évoquée dans le décret du 28 décembre 1994 avait donc été établie avec :

- des inspecteurs en section,
- des inspecteurs « hors section, animateurs et/ou gestionnaires sur le champ emploi, formation professionnelle, handicapés, insertion, etc…
- de coordonnateurs emploi formation sur l’infra départemental emploi formation développement local,
- des chargés de mission sur la politique «qualité » CES, parfois conçue de manière extensive.


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Le début des années 2000 est marqué par une nouvelle double évolution « statutaire » et « fondamentale » :

- la mise en œuvre de la loi SAPIN, qui se traduit par un processus de titularisation des CEF dans le corps des IFP en voie d’extinction mais réactivé pour accueillir des attachés emploi formation. Ce corps conserve cependant sa qualité « en voie d’extinction », ce qui a priori « bloque » les possibilités de recrutement de CEF ou AEF contractuels, ou titulaires

- l’évolution des missions des services, sous l’influence de la LOLF mais aussi du plan de cohésion sociale, moins exigeant pour les services en terme de gestion, mais plus mobilisateur sur les fonctions d’animation ou d’expertise, activités également en développement sur le champ travail.


De cette double évolution, résulte un véritable besoin en compétence que repèrent les CTRI et qui, conjugué à la quasi stabilité du nombre de sections d’inspection du travail accentue l’élargissement de l’éventail des fonctions confiées aux inspecteurs du travail. Ainsi, les postes offerts à la sortie de l’INTEFP pour les nouvelles promotions ont-ils été ouverts en 2003 à des fonctions « d’animation des politiques territoriales emploi-formation » et, pour un poste, à une activité de secrétaire général de DDTEFP (il y a moins de 10 ans, une telle fonction était « inventée » dans une DDTEFP à gros effectif pour être occupée par un directeur du travail).

En 2004, la fonction d’animation des politiques territoriales est promise à plusieurs IET (dont certains, anciens coordonnateurs emploi formation avaient passé le concours d’inspecteur du travail avec l’espoir d’une évolution de carrière et de compétence) et apparaît un poste de chargé d’étude (diagnostic travail) en SEPES, alors que seule l’autorité du DAGEMO a pu couper court à la tentation de nouveaux postes sur des missions d’administration générale en DDTEFP….

Ce rapide survol de la problématique « mission des agents du grade d’inspecteur du travail » tend à poser la question fondamentale : ce grade a-t-il vocation à être le grade unique pourvoyant à tous les besoins des services déconcentrés en catégorie A (hors encadrement supérieur) ?.

La réponse mériterait sans doute une expertise que la présente mission ne peut comporter. Plusieurs éléments semblent plaider pour une réponse négative, a fortiori dans le cadre d’une mission centrée sur l’action de l’inspection du travail dans le champ de l’application de l’effectivité du droit :

- la transversalité, ou l’interdépendance entre le travail, l’emploi et la formation professionnelle, fortement promue à la fin des années 80 et au début des années 90 (« Modernisation négociée », rapport Gandois pour le commissariat au Plan « Performance globale ») demeure une évidence, d’ailleurs rappelée avec force avec l’affirmation de concept de Maisons de l’Emploi, ouvertes, selon l’expression de Madame Barbaroux, DGEFP, « aussi bien aux multinationales comptant un établissement sur le territoire qu’au bénéficiaire d’un PLIE, dont les intérêts ne sont pas contradictoires en tout ». Cette transversalité, complexe, ne saurait être ignorée par les inspecteurs du travail généralistes, d’autant qu’elle sera de plus en plus présente dans la problématique de gestion des ressources humaines des entreprises (démographie, restructurations, formation tout au long de la vie, et aménagement de parcours professionnels, lutte contre les discriminations, etc…). Elle n’en sera pas pour autant davantage structurante dans l’activité relative à l’application du droit qu’elle ne le fut au cours des quinze dernières années (implication « périphérique voire virtuelle » sur le champ des aides à l’emploi et réelle bien que non homogène sur les plans de sauvegarde de l’emploi ou sur les accords d’entreprise Aubry I dans le cadre de la politique de réduction du temps de travail… dont l’entrée « droit et conditions de travail était évidente). D’ailleurs le caractère généraliste de l’inspection doit se traduire par un équilibre entre les différents champs d’intervention (relations sociales, sécurité et santé au travail, condition de travail et emploi) et l’inscription de l’évolution du corps des inspecteurs du travail vers un corps de l’inspection du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (discutable aussi face à la tendance décentralisatrice qui est une tendance de fond) se ferait à contre sens de la volonté de réaffirmer le caractère généraliste avec une forte préoccupation vis-à-vis de l’implication sur le champ de la santé au travail. Il n’en reste pas moins que l’indiscutable transversalité « travail emploi formation professionnelle » justifie que des agents ayant le grade d’inspecteur du travail apportent leur concours à la mise en œuvre des politiques d’emploi ou de formation professionnelle dans le cadre d’intervention où seront valorisées leur connaissance de l’entreprise, des relations sociales, de l’organisation du travail, ou du contrôle (le champ des restructurations économiques et des plans de sauvegarde de l’emploi et de revitalisation économique étant l’exemple le plus éclairant sans être exclusif). Il semble donc nécessaire que soit revisitées les analyses de 1990 afin que soient définis les postes d’inspecteur du travail « hors section » sur les champs de l’emploi, de l’insertion, et de la formation professionnelle (hors activité « contrôle de la formation professionnelle pour laquelle la question ne se pose pas au regard de l’unification du statut).

 l’analyse des activités et des compétences à laquelle il a été procédé par le CAFOC et le CNAM en 1998 dans la perspective de la réforme de la formation initiale des inspecteurs du travail a fait ressortir les « compétences communes » aux fonctions des IT en section et sur le champ emploi. La liste qui résulte de cette analyse est étonnement centrée sur des activités (et les compétences qui s’y attachent) « d’agents de catégorie A », au détriment de compétences techniques liées à la matière traitée. Cet état de fait se traduit par une réelle difficulté dans la conception de la formation, où le « tronc commun », malgré de multiples efforts, reste déséquilibré en faveur de l’action « travail » et dans la définition du métier comme en atteste l’analyse de Mokhtar KADDOURI chercheur au CNAM :
« En écoutant les uns et les autres, nous sommes amenés à nous demander s’il existe un ou plusieurs métiers de l’inspection du travail. Le métier n’est pas seulement une question technique et professionnelle mais une question éminemment politique, ce qui pose le problème de sa construction. C’est la raison pour laquelle je ne peux vous dire s’il existe un ou plusieurs métiers de l’inspection du travail. Je ne peux que relever une diversité des points de vue. Il vous appartient de décider, du fait que cette question soit précisément politique… Il convient de retenir quelques points pour que l’on puisse parler d’un métier :
- l’existence d’un savoir-faire propre au collectif de personnes qui vont former ce métier,
- la culture, car il n’est pas possible de parler de métier sans se référer à une culture qui est sous-jacente et qui donne des valeurs à ce métier,
la reconnaissance du métier sur le marché et son utilité sociale,
- le métier s’acquiert par la mise en place d’une formation, dont la formation initiale, pour pouvoir le formaliser ».

Depuis 2000, l’INTEFP n’a de cesse de dégager, pour répondre à cette problématique, des savoir faire communs, et une culture « transversale ». Mais il serait présomptueux d’annoncer des résultats tangibles.

l’élargissement des besoins en cadre A actuellement perçus par les CTRI dépasse largement la notion de transversalité « travail emploi formation » en abordant les champs « administration générale » et « études », et supposerait, pour être satisfait par un recours systématique aux inspecteurs du travail, un argumentaire allant au-delà d’une simple application du principe « nécessité fait loi » ou de la possibilité de donner très légitimement des pistes de mobilité fonctionnelle à des agents du corps interministériel d’inspecteurs du travail (cette piste paraissant davantage relever d’une gestion des mobilités inter-corps que d’une dilution de l’identité d’un corps).

La logique du plan de transformation d’emplois était une logique de complémentarité entre le « travail » et « l’emploi ». Elle demeure, mais, non maîtrisée, la complémentarité se transforme en concurrence, en antagonisme, ou en perte d’identité, surtout si la notion « d’emploi » s’étend à toutes les activités « hors travail » des DDTEFP ou DRTEFP.


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De cette analyse ressort le principe que les agents du corps interministériel, affectés au sein du Ministère chargé du travail avec le grade d’inspecteur du travail doivent remplir des fonctions :

- liées à la politique du travail (contrôle et missions qui contribuent à l’effectivité du droit, avec certaines fonctions à l’intérêt indiscutable – appui ressources méthodes ; études à condition qu’elles ne soient pas confiées à des débutants),

- de contrôle de la formation professionnelle,

- de mise en œuvre des politiques de l’emploi et de la formation professionnelle, lorsqu’elles permettent de valoriser l’approche « travail » ou les savoir acquis en section d’inspection.

Les autres fonctions (ingénierie emploi formation, administration générale, etc… seraient, en conséquence réservées à des agents d’un corps d’attachés, avec des passerelles possibles dans le cadre de dispositions générales sur les mobilités fonctionnelles, avec les limites évidentes de « l’atypisme » du corps des inspecteurs du travail (qui a des avantages, mais aussi une justification et des contraintes).


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La mise en œuvre résolue de ces orientations dans les toutes prochaines années pourrait contribuer de manière efficace, à la problématique de renforcement des effectifs dédiés à l’effectivité du droit, avec une dotation budgétaire stable de 800 inspecteurs, recentrée sur la fonction originelle (600/800 par exemple), objectif à atteindre en trois ans en accentuant les affectations des nouvelles générations sur les postes correspondants, dans le sens de ce que souhaite de manière beaucoup plus drastique l’avis du Conseil Economique et social en 1996. Bien sûr simultanément les besoins inhérents à l’animation territoriale des autres politiques visant à la cohésion sociale, tout comme ceux qui seraient rendus nécessaires ( ?) par la mise en œuvre de la LOLF (dont la finalité n’est pas de créer des procédures justifiant la création de nouveaux postes de fonctionnaires au détriment de fonctions essentielles, mais qui appelle incontestablement de nouveaux savoir faire) devront être pourvus, après objectivation, par d’autres voies, qui restent à explorer, dans une relative sérénité au regard des moyens accompagnant le plan de cohésion sociale.


2.4 – Les directeurs adjoints du travail

Progressivement, s’est installée une règle non fondée statutairement selon laquelle l’inspecteur du travail promu au grade de directeur adjoint ne peut plus exercer le métier qu’il avait choisi quelques années auparavant.

Il en résulte une extraordinaire équation sur l’importance quasi résiduelle de la fonction de base relative à l’effectivité de droit. En 2004, 12 IET sur 40 affectés au ministère du travail exerceront des fonctions en section (30 %). S’ils sont tous bien notés, dans une dizaine d’années, soit après avoir exercé 25 % de leur activité s’ils ont commencé leur vie professionnelle en passant le concours d’inspecteur du travail, ils seront promus directeur adjoint et quitteront leurs fonctions. Ce calcul, provocateur et caricatural, ramènerait le métier « identitaire » à 7,5 % du recrutement originel (un indicateur beaucoup plus objectif aurait pu être construit à partir d’une cohorte d’inspecteurs recrutés en 1990…) mais la durée de la présente mission n’a pas permis à la DAGEMO d’identifier les éléments nécessaires à la construction de cet indicateur, qui aurait tenu compte des passages croisés entre emploi et travail, et qui aurait aussi dû être corrigé par le fait que des inspecteurs et directeurs adjoints « hors section » contribuent à la mission des services sur le champ travail.

Au-delà de cette analyse quantitative, la question plus qualitative de la compétence acquise par l’expérience est sans doute plus épineuse. Métier de relation, dans un environnement multi-dimensionnel de plus en plus complexe, le métier d’inspecteur du travail sur des fonctions de contrôle est-il un métier de « débutant » ?, éventuellement exercé, aussi, par des agents plus anciens ayant sacrifier leur carrière professionnelle à des impératifs géographiques ou d’attachement à leur fonction ?

Le constat que porte le document de travail remis aux membres du groupe de travail du Conseil Supérieur de la Prévention des Risques Professionnels en début d’été, en ce qu’il justifie un renforcement de la fonction de contrôle de l’effectivité du droit, conjugué à ceux qui pourraient être faits sur les autres champs d’investigation de l’inspection du travail sont sans ambiguïté sur le caractère de « spécialiste » que recouvre la fonction d’inspection du travail généraliste. Dans le même temps, les problèmes d’organisation de l’action de contrôle et de son pilotage, comme l’IGAS l’a mis en évidence, appelle une réponse adaptée aux spécificités locales, dans le cadre de schéma, à définir, au centre d’une politique ambitieuse de contrôle.

C’est donc dans une double approche de « compétence » et de « pilotage » que la reconfiguration de l’organisation des sections devrait offrir un certain nombre de possibilités de définition de postes permettant à des directeurs adjoints du travail de poursuivre leur carrière « en section » (cette opportunité doit être basée sur une logique de poste, et non de gestion individuelle des carrières : c’est le poste qui requiert le directeur adjoint et non le fonctionnaire promu qui justifie le poste).


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Cette ouverture dans la gestion du corps, des compétences et dans le pilotage des sections, ne condamne pas la posture des « directeur adjoints travail » actuellement en activité. Il convient cependant d’entendre les regrets exprimés par les agents de contrôle dans un certaine nombre de cas où la notion de « pôle travail », englobant le suivi de politiques de l’emploi (alternance, plans de sauvegarde de l’emploi, main d’œuvre étrangère…) relativise fortement les possibilités d’implication des directeurs adjoints travail sur le champ de l’activité liée à l’effectivité du droit du travail.

Enfin, doit également être soulignée l’importance des missions d’appui (appui ressources méthodes, appui juridique, etc…) qui peuvent être confiées à des directeurs adjoints ou direction régionale ou en direction départementale et qui doivent contribuer efficacement à l’activité des services sur le champ de l’effectivité de droit.


2.5 – Les directeurs du travail

Les responsabilités des directeurs régionaux et départementaux seront essentielles, comme envisagé dans une autre partie de ce rapport dans la relégitimation et l’organisation de l’inspection du travail.

Mais des agents de grade de directeurs du travail, affectés sur différents postes devront aussi apporter leur pierre à l’édifice, avec une légitimité également démontrée sur l’apport en compétence et/ou en terme d’organisation. Les exigences de la mission à confier aux directeurs régionaux et départementaux du travail imposeront, dans la plupart des DR et les directions départementales ayant en charge le contrôle des conditions de travail et d’emploi de plus de 150 000 salariés (le seuil n’étant qu’indicatif) que des directeurs du travail apportent tout leur concours à l’organisation et à la mise en œuvre de l’action de l’inspection du travail, sans pour autant « décharger » les directeurs régionaux et départementaux de leur obligation d’implication personnelle. Cette fonction nécessitera d’être définie avec précision et appellera une formation spécifique.



3 - Le recrutement

La question des moyens étant primordiale, celle du recrutement l’est tout autant.

Elle s’inscrit pour notre ministère comme pour toute la fonction publique d’Etat dans un contexte marqué par :

- la démographie, et notamment la répartition des agents entre différentes tranches d’âge qui met en évidence l’importance des recrutements dans les années à venir avec le double défi du renouvellement partiel (mais significatif) et de la concurrence du secteur privé d’une part et de l’ensemble de la fonction publique d’autre part sur un marché du travail promis à d’inévitables tensions. La question essentielle est donc celle de l’attractivité (et l’affirmation d’une politique du travail sera déterminante à ce sujet),

- des orientations nationales plus conjoncturelles, mais néanmoins importantes, relatives à la politique gouvernementale en matière de diversification du recrutement dans la fonction publique, notamment à travers les opérations de reconversion de plusieurs milliers d’agents de l’Etat ou de grandes entreprises publiques et des modalités de recrutement permettant à la fonction publique d’être plus représentative de la diversité de la société française tout en contribuant à la lutte contre la précarité et l’exclusion.


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Dans ce contexte, la politique de recrutement devant permettre la meilleure efficacité de l’inspection du travail concerne plusieurs fonctions :

- Les fonctions d’appui technique, ingénieurs, médecins, ergonomes, voire juristes spécialisés sont essentielles et doivent justifier un recrutement adapté aux besoins de compétence, ce qui paraît justifier une exploration de ces besoins, dans un échange constructif entre l’Administration Centrale et les CTRI.

Dans un deuxième temps, la réponse adéquate aux besoins devra dépasser les difficultés statutaires pour permettre un recrutement qualitatif et quantitatif conforme aux attentes.


; S’agissant des corps interministériels des contrôleurs et des inspecteurs du travail :
le débat, au terme de la présente mission ne portant pas sur les conditions de recrutement d’inspecteurs du travail ou de contrôleurs dédiés à telle ou telle activité, il est recentré sur les enjeux d’évolution de la culture et des savoir-faire des agents de contrôle généralistes étant entendu que la configuration des corps, dans sa forme actuelle, conduit à recruter des personnels qui pourront exercer plusieurs types de fonction, sans obligation absolue de faire du contrôle sur le champ du travail (statutairement, rien n’empêche de concevoir une carrière en exerçant des activités emploi en tant que contrôleur, puis inspecteur, puis directeur adjoint pour n’aborder la problématique « contrôle travail » que dans le rôle de pilote ( ?) du directeur départemental). En outre, s’agissant des inspecteurs, comme souligné dans une autre partie du présent rapport, le passage au grade de directeur adjoint impose, à ce jour, une rupture avec la pratique du contrôle après quelques années seulement d’activité. Il y a donc un paradoxe à concevoir des recrutements sur l’identité d’un métier minoritaire dans l’espace pour les contrôleurs (32 % des contrôleurs sont en section), et dans le temps pour les inspecteurs (50 % des inspecteurs sont en section mais devront la quitter pour accéder au grade de directeur adjoint).

Le paradoxe est encore plus fort à la lecture du projet « santé au travail », qui, en exprimant une préoccupation forte sur davantage « d’aptitude » sur le champ contrôle, déséquilibre encore plus le rapport entre l’exigence des pré-requis pour un métier et l’utilisation de ce pré-requis dans une carrière professionnelle.

Malgré ce double paradoxe, il est souhaitable de maintenir (voire amplifier) les modes de recrutement axés sur l’activité identitaire, dans la mesure où :

- les autres propositions du présent rapport tendent à une « reconquête » de la fonction de contrôle par l’ensemble du corps,

- l’expérience a démontré que l’exercice du métier de relation qu’est celui de l’inspecteur du travail « ne nuit pas » (c’est un euphémisme) à l’acquisition des pré-requis nécessaires aux fonctions d’encadrement et de mise en œuvre des politiques sur l’ensemble des champs d’intervention du Ministère.


Dans ces conditions, l’objectif doit être d’ouvrir le recrutement traditionnel pour élargir « la culture de base » des deux corps par l’apport de personnes à profil scientifique pour mieux aborder l’évolution majeure du positionnement sur le champ de la santé au travail.


Deux voies peuvent être préconisées :

- la première consiste à organiser deux concours distincts pour chacun des corps : concours ouverts à des juristes, littéraires ou économistes, d’une part, concours ouverts à des scientifiques d’autre part. La formule offrirait une garantie pour un parfait dosage entre les types de publics, suivant la répartition choisie. Elle peut aussi avoir l’avantage de répondre à l’attente, ancienne, d’une sélection qui ne rebuterait pas les meilleurs juristes, comme le ferait l’actuel concours, par une image de possibilité d’échec dans une épreuve d’ordre scientifique (cette image semble d’ailleurs pouvoir s’effacer avec quelques explications). Elle mettrait, par contre, un enjeu fort sur la formation des agents dans la mesure où il appartiendrait à l’appareil de formation d’assurer des parcours adaptés aux individus, de façon à ce qu’à la prise de fonction, l’ensemble des agents soit prêt à occuper, avec des savoir faire très proches, tous les postes offerts par l’administration. Elle interroge, aussi, sur l’homogénéité du corps, avec un sentiment d’appartenance à telle ou telle catégorie. Elle risquerait, en outre, de ne pas être validée par le ministère de la fonction publique, comme dérogeant au principe général selon lequel la plupart des concours d’accès à la fonction publique sont soumis à des conditions de diplôme par référence à un niveau d’études, sans spécification au contenu des études conduisant au diplôme requis.

- la deuxième formule est de valoriser les actuelles épreuves des concours, en faisant ressortir les opportunités qu’elles offrent aux deux types de public, dans une approche d’ouverture intellectuelle sur des disciplines reflétant bien le contenu des métiers qui seront exercés. Cette option, plus conforme à un nécessaire parallélisme entre exigences des épreuves et exigences des métiers, a le revers d’un certain « brouillage » d’image, et porte peut-être le risque de décourager les meilleurs juristes.

Le deuxième formule, qui est immédiatement accessible, semble pouvoir être privilégiée avec, simultanément un plan de communication qui, de toute façon, paraît indispensable au regard de la situation de concurrence avec les autres concours administratifs et le secteur privé.

Ce plan de communication devrait avoir pour cible prioritaire :

- les étudiants ou anciens élèves d’institut universitaire technologique, avec une attention particulière à ceux ayant abordé les problématiques d’hygiène et de sécurité pour le concours de contrôleur,



- les étudiants de faculté de droit, avec priorité aux filières « travail » et « santé au travail »,

- les étudiants de faculté des sciences.

Des modules de préparation au concours, pourraient, le cas échéant, être proposés pour vaincre les résistances induites par la pluralité des épreuves. Sur cette option, l’administration a le choix entre des préparations ouvertes à tous les publics remplissant les conditions d’accès au concours ou le ciblage sur certaines catégories de candidats potentiels, avec le souci de répondre à l’objectif de diversité des recrutements, représentative de la diversité de la société française.

Cependant le débat sur l’enrichissement des profils, et ses conséquences sur la conception du concours et des recrutements ne doit pas faire perdre de vue la question plus générale, mais toute aussi importante, de tous les pré-requis essentiels de « métier de relation », notamment ceux qui touchent au comportement en situation. Le « grand oral » a vocation, en principe, à évaluer les candidats sur ce registre. Il n’est pas sûr que cette épreuve, à préserver, suffise à répondre à cet objectif et une évolution du concours avec « mise en situation » serait sans doute intéressante. Elle devrait s’inscrire dans une réflexion plus large sur les modalités des épreuves d’évaluation des inspecteurs du travail, dans les temps du recrutement d’une part (« à partir de profils de poste et de définitions des fonctions proposés à la candidature ») et de la formation d’autre part (« évaluation de la formation à partir d’objectifs pédagogiques visés ») selon la distinction formulée par le CNAM dans son rapport d’évaluation du dispositif de formation des IET en 2003.

Par delà les modes de recrutement traditionnels par concours, il convient de mentionner toutes les possibilités de diversifier les recrutements, que l’avis du Conseil économique et social avait appelées de ses vœux en 1996, et en particulier le concours de « la 3ème voie » pour le recrutement d’inspecteur du travail. Les avantages de cette formule, sont évidents en terme de diversification des profils ; Le recul que doit posséder l’administration par rapport aux opérations déjà menées dans ce cadre, de manière très irrégulière pourrait donner lieu à une étude sur l’intégration des lauréats dans les services et dans les fonctions avant que cette voie soit inscrite de manière plus pérenne dans les modes de recrutement habituels.

Enfin, les opportunités offertes par les plans de reconversion en faveur des fonctionnaires ou agents d’entreprises publiques doivent être expertisées au regard des besoins de l’inspection du travail et des possibilités juridiques d’intégrer les corps interministériels de contrôleur ou d’inspecteur.






4 - La formation

La formation des agents du Ministère, et notamment de ceux des corps interministériels de contrôleurs et d’inspecteurs du travail est toujours présentée en deux temps : la formation initiale liée à l’entrée dans le corps, et la formation continue, permettant l’adaptation aux évolutions de la carrière professionnelle dans un environnement également évolutif. Cette distinction est encore renforcée, depuis quelques années, par le mouvement général de déconcentration, qui ajoute aux différences de conception, une séparation (amoindrie dans les faits par une offre de service de l’INTEFP aux DRTEFP) des organes de programmation et de gestion pour une partie de la formation continue.

Cependant, le concept de formation tout au long de la vie, sans remettre en cause la distinction entre les deux types de formation, interroge le système dans sa globalité et les prochaines années seront, dans l’ensemble de la fonction publique, marquées par une évolution sans doute importante de l’organisation de la formation (la « transposition » de l’accord du 20 septembre 2003, que le Ministère de la Fonction Publique entend proposer à la discussion avec les partenaires sociaux, pouvant, le cas échéant, en fixer le cadre général).

Dans l’immédiat, les améliorations à porter aux formations doivent bénéficier à l’ensemble des agents du ministère contribuant à la conception de la mise en œuvre de la politique du travail (et donc pas seulement les agents des deux corps de contrôle) et seront abordées suivant le schéma traditionnel.


4.1 – La formation initiale des inspecteurs et contrôleurs du travail

Telle qu’elle a été conçue, en deux temps, (2000 pour les IET, 2003 pour les contrôleurs), la formation initiale des agents des deux corps interministériels, repose sur deux grands axes :

- l’acquisition d’une culture professionnelle commune aux agents du corps dans lequel ils exerceront leur activité (avec le souci d’une mobilité professionnelle au sein de ce corps),

- l’appropriation des connaissances à partir des situations professionnelles, les plus proches possibles de celles que rencontrent les agents (« pré-affectation » des inspecteurs après 10 mois de formation « de tronc commun » et « affectation des contrôleurs » dès leur recrutement).

L’investissement de l’ensemble du ministère sur ce chantier est à souligner et est reconnu à l’externe pour les innovations qu’il comporte, tant en terme de conception de la formation (concept de la professionnalisation) que des moyens mis en œuvre (projet « campus numérique » - enseignement à distance – soutenu par la Délégation Interministérielle à la Réforme de l’Etat). Le souci d’évaluer l’impact des réformes de la formation est tout aussi important, puisque trois ans après sa mise en oeuvre la formation initiale des IET a déjà fait l’objet de plusieurs investigations, dont une, majeure, en 2003 par le Centre de Recherche en Formation des Adultes (CRF) du CNAM.

Sans préjudice des décisions qui pourront être prises dans la continuité de ces analyses, sur proposition du conseil national de la formation et/ou, ultérieurement, du conseil scientifique qui devrait voir le jour après la transformation du statut – toujours envisagée et encore reculée – de l’INTEFP, les évolutions de la formation des agents de contrôle semblent devoir porter sur :



une meilleure définition des compétences attendues : le parti pris (à ne pas remettre en cause) de la professionnalisation au contact du travail « réel », ne doit pas se traduire par une négligence du « prescrit » ou du « souhaitable ». C’est dans cette perspective que l’INTEFP a constitué un « groupe projet » sur le champ de la « santé au travail » en septembre 2004, qui, à partir d’un travail d’analyse interne doit associer à ses investigations les approches de l’administration centrale, des services déconcentrés et d’autres intervenants, afin de mieux définir un type de « référentiel », qui pourrait être utilisé aussi bien pour mieux définir les modalités de recrutement que les produits de formations initiale et continue.


une recherche intensive d’amélioration de l’organisation de l’alternance, en agissant simultanément :

sur l’architecture de la pédagogie en centre de formation, et sur l’optimisation du fonctionnement des réseaux de formateurs,
 sur les conditions d’apprentissage sur les lieux de travail : professionnalisation des formateurs de terrain, identification de la fonction tutorale, meilleure analyse des situations de travail, permettant une meilleure articulation entre formation sur les lieux de travail et en centre de formation,
 sur l’identification des processus de construction identitaire et sur leur accompagnement.


Ces évolutions, quelle que soit la forme qu’elles prendront, devront se traduire par une meilleure formalisation des relations entre l’INTEFP, les services déconcentrés, et les formateurs. Si le changement de statut de l’INTEFP intervient, la négociation du contrat de progrès qu’il impliquera devra structurer les objectifs et modalités d’élaboration de cette formalisation (qui devra aussi intégrer la négociation avec les services d’inspection du travail des ministères de l’agriculture et des transports).

Dans le même temps, la mise en œuvre de la nouvelle formation des contrôleurs du travail appellera une attention particulière, la première difficulté semblant résider dans les tensions que connaissent les services déconcentrés, et qui relativisent la disponibilité des contrôleurs stagiaires (et des acteurs de leur accompagnement dans les services) pour la formation. C’est la résultante d’une contradiction entre une exigence toujours plus forte de la formation (un an, avec 20 semaines de formation théorique au lieu de 13 précédemment) et une affectation valant occupation d’un poste identifié, dès le premier jour de la formation, avec son corollaire en terme de charge de travail. Cette tension entre deux logiques justifie un arbitrage… en faveur de la formation, sans remettre en cause les principes de service public.


4.2 – La formation continue des inspecteurs et contrôleurs du travail :

D’une manière générale au cours des dernières années, l’INT devenu INTEFP a déployé de gros efforts pour élargir ses prestations et se constituer des savoir-faire, en lien avec la DGEFP et la DAGEMO sur les activités emploi et formation d’une part et management d’autre part. Cette évolution doit être poursuivie, voire amplifiée. Mais elle a sans doute eu une conséquence négative sur la place accordée au « cœur du métier ». Il doit donc être proposé, en matière de formation comme sur l’ensemble des problématiques d’organisation des services, non pas une compensation ou un retour en arrière, , mais un rééquilibrage avec des moyens supplémentaires, permettant à la logique « travail » de ne pas pâtir du développement des autres activités.

Dans un contexte marqué par la nécessité de mieux évaluer les conséquences de la déconcentration d’une partie de la formation continue, les premiers chiffres disponibles, qui ne portent que sur une année et ne peuvent donc être très significatifs, font apparaître une diminution sensible du nombre de jours de formation continue sur le thème du droit du travail :

2000 : 6 817 jours (31 % du total FC)
2001 : 5 580 jours (30,53 % du total FC)
2002 : 2 580 jours (20,68 % du total FC) dont 1 133 jours en DR (19,20 % de la FC en DR)

Ces formations se concentrent sur les préventions des risques à effets différés (risques chimiques, amiante, risques biologiques), les équipements de travail et le BTP.

Sans se départir de la prudence que justifie cette analyse, il convient d’affirmer la nécessité d’intégrer la problématique de la formation dans les « contrats d’objectifs » (ou de progrès, ou de projet) proposés par le présent rapport pour une meilleure organisation de l’inspection du travail, et de renforcer l’offre de services de l’INTEFP, tant sur la mise à disposition de formateurs que sur l’organisation de stages dits « ressources » pour les formations ne pouvant être mises en place au niveau régional.

Dans le même temps, les formations « mobilité », qui ont pour vocation d’accompagner les agents changeant d’affectation devront être rénovées, notamment pour les contrôleurs du travail, en phase avec les évolutions de la formation initiale.

Mais il faut aussi mettre en exergue l’importance stratégique du travail engagé par la DAGEMO courant octobre 2004 afin de mesurer, avec les autres directions d’administration centrale, les évolutions d’organisation et de compétences que portent la décentralisation, le plan de cohésion sociale, le plan santé au travail, la loi du 4 mai 2004 et la lolf. Devraient, en effet, en résulter un repérage des éventuelles possibilités de redéploiement du personnel entre différentes missions et fonctions, et bien sûr une identification des principales évolutions attendues en matière de pratiques professionnelles et de compétences à mobiliser. Ce chantier devrait aussi concerner les agents de catégorie C et la mission de secrétariat et d’assistance dans la fonction « travail ».

Enfin, on soulignera l’enjeu du développement de nouveaux vecteurs de formation. Ainsi la publication, début 2005, d’un CD Rom risques chimiques devra faire l’objet d’un accompagnement d’envergure et d’une évaluation de son impact.


4.3 – Les formations des autres intervenants sur le champ « travail »

L’ambition de la politique du travail, au sein de laquelle la mise en œuvre du plan de santé au travail nécessite un plan d’action, au delà des prévisions « courantes » en faveur :

- des ingénieurs de sécurité : à partir de l’analyse collective (profil de poste, nature de l’activité) et individuelle (profil des personnes recrutées), programme de formation personnalisé pour les nouveaux arrivants. Mais il paraît aussi nécessaire de procéder à une analyse individuelle des besoins des ingénieurs déjà en poste et de répondre aux besoins qu’elle devrait faire apparaître

- des médecins inspecteurs régionaux : dans le prolongement des opérations déjà engagées avec l’ENSP (approche santé publique et veille sanitaire), concevoir les aspects spécifiques à la mission « santé travail » au sein des services déconcentrés

- des chargés d’étude des SEPES : par delà la formation, engagée, sur le diagnostic travail, ouverture sur l’évaluation, notamment en matière d’impact (formation action ?)

- des directeurs adjoints du travail et directeurs du travail : les formations paraissent devoir être plus ambitieuses, notamment par une recherche de croisement entre la logique « management » et la logique « technique »

- des directeurs régionaux et départementaux : accompagnement des directeurs régionaux et départementaux dans l’implication personnelle qui doit être la leur dans la définition d’une stratégie d’intervention et dans sa mise en œuvre opérationnelle, ce qui suppose des savoir faire sur l’interne et sur l’externe

- de la direction des relations du travail : formation spécifique et aussi (surtout ?), ouverture aux services territoriaux (1 semaine en section d’inspection pour chaque attaché et chaque administrateur civil ?)

Outre les compétences spécifiques à chaque catégorie, il convient de rechercher les possibilités de favoriser, à travers l’organisation de formations, les croisements des « cultures » et des « préoccupations », notamment entre administration centrale et services déconcentrés.


4.4 – Les formations à la gestion des situations de contrôle difficile et à la relation avec l’usager

Ce sujet ne se limite pas au contexte des agents en section d’inspection. En effet, si l’événement le plus douloureux qu’a eu à connaître l’inspection du travail concerne un agent affecté au contrôle de l’application du droit, l’analyse des périodes récentes montre que c’est l’ensemble des agents de ce ministère qui peuvent être à un moment ou à un autre confrontés à une situation difficile dans le cadre d’un contrôle en entreprise (section ou contrôle de la formation professionnelle), dans les services (SCRE, COTOREP….) ou dans le cadre d’une mission de renseignements. Dans cette perspective, les propositions formulées ont vocation à s’adresser à des degrés divers à l’ensemble des agents.

Leur contenu s’appuie sur un diagnostic des actions de formation ou d’accompagnement des projets des services réalisés par l’INTEFP au cours de ces dernières années. Il s’appuie également sur une enquête menée auprès de l’ensemble des écoles du réseau des écoles de service public (RESP). Les propositions et les axes de travail pour l’INTEFP sont une synthèse des renseignements recueillis.


4.4.1 – Quelques éléments de diagnostic : l’action de l’INTEFP en la matière

Au cours de ces dernières années, l’INTEFP a intégré dans ses enseignements et dans son offre de formation continue cette préoccupation. Les informations ci-dessous attestent de cette évolution. Néanmoins, si beaucoup d’enseignements en formation initiale sont susceptibles de préparer les inspecteurs et les contrôleurs du travail à affronter ces situations, ils ne sont pas toujours présentés, ni vécus, à l’exception de certains d’entre eux, comme se rattachant à cette thématique.


La prévention des situations difficiles en formation initiale
Dans les dispositifs de formation initiale des inspecteurs du travail et de contrôleurs du travail, cette notion est d’abord appréhendée sous l’angle du positionnement de la fonction (au sein des services, dans le cadre d’une relation triangulaire employeur/salarié/administration). Pour la FIA, ce positionnement sous-tend l’ensemble des modules dits de formation générale (10 mois). L’hypothèse sous-jacente à ce travail et à cet apprentissage repose sur l’idée qu’une approche qualité de l’action des agents (qualité de la relation, qualité de l’application de la règle et de son explication, qualité du travail, qualité des écrits, qualité des actes administratifs) doit avoir une influence sur la nature des relations entre l’agent d’autorité, son environnement et ses interlocuteurs. Un travail important est produit dans ce sens pour amener les agents en formation à expliciter leur position, ses fondements, sa justification et accompagner sa décision.

Dans les phases de préparation au poste de travail, cette approche est complétée par notamment, des enseignements sur la préparation, la conduite et les suites d’une visite d’entreprise. Pour la FIA, durant les enseignements à l’INTEFP, cet enseignement va jusqu’à la préparation, la conduite et la rédaction des courriers de suites de visite dans le cadre d’une vraie visite d’entreprise consacrée aux équipements de travail.

Des modules sur la communication sont également proposés aux stagiaires. En FIB, ces modules prennent pour clé d’entrée l’entretien en permanence et la présentation du contrôleur dans le cadre d’une visite d’entreprise. Ces modules sont complétés pour les contrôleurs du travail affectés au SCRE, à la COTOREP ou dans des services renseignements par des enseignements complémentaires axés sur la conduite d’entretien. En FIA, ce module est plus vu sous l’angle de la gestion des situations relationnelles difficiles.

Il faut signaler également qu’en FIA, le module de formation consacré à l’approche des conflits du travail permet également d’aborder des techniques (distanciation, reformulation,…) qui sont essentielles dans ce type de situation.

Il faut enfin préciser que l’ensemble des enseignements privilégiant une approche pédagogique par les problèmes à résoudre et les situations de travail (analyse d’une situation par les apprenants, proposition d’une démarche par l’apprenant, débat sur les démarches proposées) permet plus que par une méthode pédagogique classique (exposé d’un intervenant) d’expliciter et d’aborder les questions que peuvent se poser les apprenants sur la nature réelle de leur travail et les questions qu’ils se posent sur leur action.

Par ailleurs, les périodes de formation étant fortement alternées (au moins 50 % du temps de formation se passe dans les services déconcentrés) les élèves et stagiaires vont avoir l’occasion d’approcher la nature du travail de contrôle et ses aspects relationnels, en accompagnant leurs tuteurs dans l’exercice de leur activité.


La prévention des situations difficiles en formation continue
Dans le cadre de la formation continue, l’INTEFP n’a proposé de formations systématiques sur ce sujet que pour les publics des services SCRE et COTOREP. A chaque fois ces formations, au-delà des aspects inter-individuels liés à la conduite d’un entretien ont mis en évidence les aspects primordiaux liés l’organisation dans laquelle s’insère l’activité de contrôle de l’agent (services isolés, affectation d’agents par défaut ou avec une faible expérience, manque d’implication du rôle de ces services dans une politique locale soutenue par la direction et en lien avec des partenaires, …). A tel point que ces formations ont toujours été doublées par des formations en direction de l’encadrement, de façon à inscrire l’action de ces services dans une politique locale. Autant les premières formations ont eu beaucoup de succès, autant les formations en direction de l’encadrement n’ont rencontré qu’un succès d’estime.

Devant cette difficulté à mobiliser le management sur l’action de services qui ont pu à certains moments ne pas être jugés comme prioritaires, l’INTEFP s’est orienté plus sur l’accompagnement de projets de service. Dans ce contexte, un engagement de la direction locale permet de mobiliser l’encadrement et les agents dans le projet et de travailler à la fois sur les orientations, le développement des partenariats, la définition des rôles de chacun et la gestion des situations difficiles. Dans l’exemple du SCRE et du handicap, la connaissance approfondie de la situation matérielle et morale d’un demandeur d’emploi ou d’un travailleur handicapé est essentielle pour exercer son action en évitant, comme cela a parfois été observé d’induire des représentations de l’autre qui peuvent dénaturer la relation et parfois la rendre difficile. Ainsi, plusieurs projets locaux ont été conduits sur les services SCRE ou COTOREP allant même jusqu’à la mie en œuvre de situations simulées dans le service avec débriefing en présence de la direction.

Pour les agents de l’inspection du travail, l’INTEFP est essentiellement intervenu dans des situations où les services locaux constataient un malaise des contrôleurs du travail affectés à cette fonction. Dans ces situations, il s’est agit d’aménager des sortes de sas entre l’affectation des agents sur un poste et la prise effective de ce poste. Ce temps étant alors mis à profit pour accompagner ces agents sur les aspects pratiques de l’activité.

Dans d’autres situations, les services ont organisé des démarches faisant suite à des situations où des agents en fonction avaient rencontré des difficultés (DDTEFP du Rhône, CTRI Nord Pas de Calais).

Du point de vue du diagnostic, on peut dire que l’INTEFP est intervenu sur différents aspects de cette problématique, dans des dispositifs plus ou moins organisés et selon les sollicitations dont il a pu faire l’objet.

Pour affiner ce diagnostic, il est nécessaire de bien voir que cette question des situations difficiles, malgré la prise en charge récente des suites d’une agression, ne fait pas l’objet d’une expression aisée. Les propositions formulées par ailleurs devraient contribuer à une meilleure connaissance des faits et donc à la construction d’une réponse « formation » de plus en plus pertinente.

Enfin, s’il existe quelques manuels, mémento ou ouvrages divers, sur la règle de droit, il existe peu de guides de pratiques qui prennent en compte cette dimension. La pratique, notamment de l’inspection en matière de visite reste peu explicitée ailleurs qu’à l’INTEFP. Quand elle l’est, elle est souvent sur le mode du prescrit et dans une approche classique de la visite (seul, dans l’entreprise…)

Le rôle de l’INTEFP s’inscrit dans ce contexte de pratiques des services qui nourrit son action et la limite également en reproduisant d’une certaine manière le discours ambiant.


4.4.2 – La pratique d’autres écoles de service public

Sur la trentaine d’écoles qui composent le RESP, 11 ont répondu à la sollicitation que nous leur avons adressée. Pour la plupart, elles ont pris la peine de développer leur réponse et souvent de la doubler d’un échange téléphonique ou à l’occasion d’une rencontre.

L’analyse de ce retour d’expérience n’est pas suffisamment approfondie à ce stade et avec certaines écoles pour en tirer des enseignements significatifs. Cependant, les premières réponses permettent de créer une typologie des écoles face à ce problème et donc une typologie des situations rencontrées par les fonctionnaires. Ces réponses permettent également par leurs apports ou au contraire par leurs lacunes de créer une typologie des réponses de formation possible. C’est cette typologie qui peut nous guider dans la constitution d’une offre de formation complète et cohérente sur ce thème.

On peut classer les écoles en trois catégories au regard de cette problématique :

- les écoles pour qui les publics accueillis intègrent dans leur activité le risque majeur pour l’agent (police, armée, administration pénitentiaire dans une moindre mesure),
- les écoles pour qui les publics sont confrontés à des risques importants et de manière courante (protection judiciaire de la jeunesse, santé…),
 les écoles pour qui les publics ne sont pas confrontés à des risques importants ou qu’ils n’ont pas identifié comme pouvant être important (ENACT, greffe,…)

On peut également produire une typologie des actions de formation qui sont mises en oeuvre :

- les actions de formation au travail en sécurité qui intègrent dans les procédures de travail cet aspect (ex : à l’école de police les enseignements sur l’intervention intègrent dans les savoirs transmis et dans les simulations les procédures reconnues comme efficace pour mettre le moins possible en danger la santé ou la vie des agents. Il en est de même à l’ENAP)
- les actions de formation qui assimilent ces situations à des situations de négociation
- les actions de formation qui privilégient l’aspect communication sous toutes ses formes (y compris celles dispensées aux IET dans le cadre des sessions inter-écoles)
- les actions de formation qui privilégient la maîtrise de soi, la prise de distance, l’analyse de l’autre et de ses attitudes.


Ces différentes formations s’adressent soit à l’encadrement dans une perspective de prévention des risques ou de traitement de situations de crise, et/ou à l’agent impliqué directement dans une situation à risques.

Sous réserve d’une analyse plus fine des produits de formation, il n’est pas toujours aisé de faire une correspondance fine entre la typologie des écoles dressées auparavant et les actions mises en oeuvre.

Par ailleurs, en règle générale, ces formations apparaissent comme une part mineure de l’activité de formation.

Enfin, il ne semble pas que ces actions de formation constituent de véritables dispositifs de formation intégrant tous les aspects de cette problématique.



A cet égard, le CNFEPJJ, semble être l’établissement qui intègre le mieux cette problématique de gestion des situations difficiles. En particulier, cet établissement dont les personnels font l’objet de violences fréquentes et parfois majeures intègre dans son apprentissage une démarche visant, dans le cours de la vie professionnelle, à traiter collectivement les difficultés rencontrées par un agent dans l’exercice de sa profession. Dans cette optique, le CNFEPJJ forme ses élèves à l’analyse de leur pratique au sein de groupes de réflexions.

Les investigations seront poursuivies plus avant avec le CNFEPJJ, l’école de police, voire la Poste et la RATP pour analyser plus finement les dispositifs de formation et d’accompagnement mis en oeuvre.


4.4.3 – Quelques préconisations pour améliorer le dispositif de formation de l’INTEFP

Pour améliorer son dispositif de formation, l’INTEFP devra travailler dans plusieurs directions de façon à traiter les multiples facette de ce problème.

Traiter les situations difficiles dans une démarche d’évaluation des risques et de prévention
Avant l’accident tragique de Saussignac, ce phénomène était trop souvent perçu comme une fatalité, un concours de circonstances, voire la résultante de causes exogènes à l’activité de contrôle. Cette approche est presque un paradoxe au sein de notre ministère. Les dispositifs d’assistance mis en place ces dernières années visent à prendre en charge les conséquences d’une violence sur un agent, dans les cas les plus graves. On peut supposer que la violence quotidienne reste encore trop souvent gérée exclusivement par les agents concernés.



Pour contribuer à une prise en charge collective de ce risque et de ces conséquences sur les agents, il est nécessaire, comme cela a été évoqué par ailleurs, d’améliorer la démarche d’évaluation des risques et d’intégrer dans le management une politique de prévention.

Pour cela l’INTEFP pourrait développer beaucoup plus dans l’ensemble de ses parcours d’adaptation à l’emploi ou cycles pour l’encadrement supérieur un volet approche de la prévention des agents et en particulier dans les situations de contrôle.


Rendre lisible la formation sur ce sujet
Comme cela a été rappelé ci-dessus, l’INTEFP a pris au fil du temps des initiatives qui se rattachent plus ou moins à cette problématique. Ces initiatives sont éparses et peu explicites. Il lui appartient de compléter le dispositif de formation et surtout à le rendre explicite.

Ceci signifie qu’il est nécessaire de réécrire une partie des fiches pédagogiques pour intégrer cet aspect et en particulier de mentionner explicitement dans les cahiers des charges de l’alternance une prise en compte de cet aspect de l’activité. Dans cette optique, les inspecteurs élèves de la promotion 2004 bénéficieront, dès mars 2005 de deux journées de formation sur les incidents de contrôle, à partir d’une fiche pédagogique rédigée début décembre 2004.


Concevoir des dispositifs qui concernent tous les profils de fonctions concernés dans les différentes dimensions du problème
Au regard de ce qui peut être fait dans les autres écoles, cette question doit être abordée à partir de plusieurs points de vue :

- du point de vue de l’encadrement : il s’agira d’intégrer dans les cycles existants, ou dans des formations spécifiques la question de la prévention des risques et de la gestion des événements lorsqu’ils se produisent (cellule d’appui, communication de crise, communication interne…),
- du point de vue des agents : tout en développant les formations qui s’inscrivent dans une démarche qualité de l’action publique, il s’agira de compléter nos dispositifs avec des actions de formation permettant d’aborder du point de vue des agents, l’anticipation et la gestion es situations difficiles. Ce type de formation comporte un aspect comportemental fort. Plusieurs écoles de pensée sont possibles (sophrologie, PNL…). De ce point de vue des dérives sectaires ne sont pas à exclure. L’INTEFP en lien le cas échéant avec la DGEFP devra expertiser l’offre sur le marché et retenir les prestataires pouvant intervenir en formation initiale et continue.

Sur les modalités de formation, en laissant une large place aux formations en salle (FI, FC, offre nationale, proposition d’action dans l’offre de service), l’INTEFP proposera aux CTRI des accompagnements de projet sur ce thème. En effet, la prise en compte de ce problème dans les services est obligatoirement l’occasion de travailler sur les deux aspects de la question : organisation des services et aspects relationnels.

Un groupe de travail interne à l’INTEFP, intégrant les problématiques travail, transport, agriculture a été mis en place pour aborder l’ensemble de ce sujet.


4.5 – Validation des acquis et reconnaissance de l’expérience professionnelle

Le rapport d’évaluation sur la réforme de la formation initiale des inspecteurs du travail (réf. ci-dessus CRF CNAM 2003) suggère, avec force, d’imaginer « un diplôme qui correspondrait à cette fonction professionnelle et sociale plus large, permettant aux formés d’avoir de la distance par rapport à l’exercice du métier et lui laissant, en cas d’échec au passage devant le jury, la possibilité de valoriser professionnellement les acquis de la formation par d’autres voies. Cette orientation suppose probablement de passer des accords ou conventions avec des institutions universitaires ou d’enseignement supérieur. Cette suggestion rejoint les débats internes au réseau des écoles de service public, qui investissent aussi les services du Ministère de la Fonction Publique et de la réforme de l’Etat. En l’état actuel de cette réflexion, semble se dessiner une orientation selon laquelle les écoles professionnelles de service public pourraient rechercher un adossement à des universités, conduisant à l’attribution de crédits dits ECTS, donnant une validation universitaire des acquis des formations professionnelles des fonctionnaires.

Dans le cadre de ces orientations, l’INTEFP paraît devoir être encouragé dans son futur contrat de progrès à rechercher des partenariats avec des universités intervenant dans l’ensemble de ses champs d’intervention (le seul partenariat qu’il vit actuellement porte sur un DESS sur le champ des politiques territoriales de l’emploi et de l’insertion professionnelle).

Cette voie pourrait aussi être explorée pour valoriser des acquis de l’expérience professionnelle, par exemple pour les agents particulièrement impliqués dans des réseaux formels ou informels (ARM ou autres) et acquérant de réelles compétences sur tel ou tel aspect de leur métier.


4.6 – La mobilité

Le rapport IGAS 2002-138 suggérait la mise en place d’un groupe de travail associant les administrations centrales et les chefs des services déconcentrés pour proposer des mesures de développement de la gestion de proximité des affectations et des mouvements. Cette perspective se déclinait avec un constat relativement péremptoire sur la nécessité de fixer des règles claires en terme de durée de séjour sur les postes (« pas plus de 6 ans, durée qui apparaît adaptée pour permettre une bonne insertion professionnelle et relationnelle, mais pour prévenir des risques de routine, de démobilisation et de dérive déontologique »).

Le sujet est important et l’instauration d’un dialogue en vue de rechercher une réponse au problème posé ne peut être que souhaitée, sans doute dans un contour bien plus large que celui qui était envisagé.

La durée de la présente mission n’a pas permis à la DAGEMO de fournir les éléments permettant de cerner l’importance quantitative du problème (combien d’agents de contrôle sur « leur » section depuis plus de 5 ans, 8 ans, 15 ans…). Quoi qu’il en soit, et même si, en l’absence de « statut d’emploi », la limite de 6 ans suggérée par l’IGAS ne paraît pas adaptée à la diversité des cas, il serait judicieux d’afficher un certain nombre de principes, compatibles avec l’indépendance (qui ne suffit pas à justifier l’inamovibilité mais qui impose des garanties) et le statut des inspecteurs et des contrôleurs du travail qui en son état actuel, ne permet pas d’organiser des mobilités fonctionnelles dans le cadre d’une prise en compte simultanée des intérêts des agents et des services. L’application des propositions ci-dessus formulées sur l’organisation de l’inspection pourrait contribuer à une meilleure gestion et surtout une meilleure visibilité des situations posant problème.


4.7 – L’ouverture de l’inspection du travail française sur l’Union Européenne

L’administration du travail française a « intégré » une dimension européenne depuis de nombreuses années, avec dans un premier temps, une prise en compte plus ou moins passive, des évolutions des textes induites par l’activité juridique, puis judiciaires, des institutions européennes.
Cette forme « d’ouverture » ne suffit sans doute pas pour construire et consolider une culture commune des agents sur le contexte international dans lequel ils évoluent.

Un certain nombre d’initiatives ont été prises, en 2004, dans le cadre d’une orientation ont été pris, en 2004, dans le cadre d’une orientation donnée à ses services et à l’INTEFP par le Directeur des Relations du Travail.

Ces initiatives, centrées sur la formation initiale ou sur des participations à diverses manifestations ou colloques, sont importantes mais ont un impact limité au regard de leur faible « taux de pénétration » sur l’ensemble des agents des services d’inspection. Il convient donc d’amplifier le mouvement engagé, avec le souci d’une meilleure diffusion et surtout d’une plus grande opérationnalité. Pourrait ainsi être envisagée la publication d’une brochure trimestrielle, dédiée à l’actualité européenne et à ses implications sur le droit ou les institutions (travail et inspection) annonçant les diverses manifestations permettant des échanges sur le droit du travail européen ou l’inspection du travail et présentant, aussi, chaque trimestre, l’inspection du travail d’un pays européen. Le Comité des Hauts Responsables de l’Inspection du Travail pourrait être invité à apporter une contribution à chaque numéro, et seraient aussi répertoriées et valorisées toutes les possibilités de coopération, soit dans le cadre d’action de contrôles transfrontaliers, soit dans le cadre d’échanges de fonctionnaires.


ANNEXES






1 – Lettre de mission


2 – Extrait d’un diagnostic de section d’inspection du travail des Bouches du Rhône


3 – Propositions en vue de renforcer la capacité d’expertise de l’inspection du travail


4 – Propositions en vue de renforcer l’efficacité du contrôle de l’inspection du travail


5 – Récapitulatif synthétique des suggestions et propositions formulées au cours des réunions des CHS régionaux et CTPR


6 – liste des personnes consultées


7 – Part des agents exerçant des fonctions de contrôle de l’application du droit du travail














Extrait d’un diagnostic de section d’inspection du travail
des Bouches du Rhône



Le fonctionnement de la section induit une mobilisation des agents sur des tâches permanentes ou ponctuelles qui complètent l’activité de contrôle, selon les modalités suivantes :

 une journée de permanence hebdomadaire, qui mobilisent donc 40 journées de travail en moyenne sur l’année pour trois agents, soit 120 jours pour la totalité de l’effectif,

 les réunions internes de service qui se déclinent à plusieurs niveaux :

- celles organisées au niveau de la section : 4 réunions de section organisées en 2003,
- celles relevant du niveau de la bi-section : 3 réunions de bi-section organisées en 2003,
- celles relevant du niveau de l’Antenne : au moins 3 réunions d’Antenne organisées en 2003 (présentation de la nouvelle organisation du S.O.R. d’Aix en janvier 2003, préparation de l’action concertée initiée par la 11ème section sur l’ouverture des commerces le dimanche à Plan de Campagne le 1er juin 2003, préparation de l’action concertée de contrôle des H.C.R. le 9 juillet 2003 initiée par la bi-section 12-13, etc…),

soit à titre indicatif, 10 x 1 demi-journée + 2 jours de préparation, ce qui donne 7 jours au total consacrés par chaque agent de la section à des réunions internes à l’Antenne d’Aix en Provence, soit 35 jours pour la totalité de l’effectif,

- 10 réunions M.A.I.T. et 6 réunions organisationnelles d’une demi-journée chacune, soit un total de 8 jours pour l’inspecteur du travail,

- diverses participations à d’autres activités, telles que les participations à des groupes de travail (ex : harcèlement moral, responsabilité pénale des agents, évolution du métier de secrétaire, groupe méthodologique santé/sécurité, etc…), les fonctions d’interface A, etc… : au moins 10 jours pour les agents de contrôle au total sur un an,

- participation à des formations ou des sensibilisations (ex : risques chimiques et C.M.R., sous-traitance dans le pourtour de l’étang de Berre, dialogue social et I.R.P., action pénale de l’inspection du travail, REDAC, TEMPO, BO SIE, comptes rendus d’intervention, etc…) : au moins 10 jours pour les agents de contrôle sur l’année, et 10 jours également pour les agents de secrétariat,



Au total, il peut être évalué à plus de 150 jours le temps passé par les agents de contrôle sur une année de fonctionnement à ces activités complémentaires au travail de terrain. Compte tenu de ce qui précède en terme d’état des lieux effectué pour la section, il est important de mettre en perspective ce chiffre avec le temps restant disponible sur une année pour les agents de contrôle, en prenant comme base la présence d’un agent à temps complet :

365 jours calendaires
- 104 jours de repos hebdomadaire
- 47 congés/RTT
- 9 jours féries
_______________
= 205 jours disponibles

Pour les seuls trois agents de contrôle, cela correspond, donc, à 615 jours de disponibilité sur une année. Il y a lieu de remarquer que les activités (hors contrôle ou hors suivi administratif) décrites ci-dessus mobilisent, en quelque sorte, près de 25 % du temps des agents de contrôle de la section (et 30 % pour l’inspecteur du travail).

Ce travail d’évaluation de l’activité des agents de contrôle mériterait d’être approfondi sur des bases communes au niveau des sections, en vue, notamment, d’enrichir le débat sur l’articulation entre les actions collectives et l’activité « incompressible » d’une section.

A titre d’exemple, il pourrait être retenu qu’une demande d’autorisation de licenciement ou de transfert pour un salarié protégé représente, en moyenne, une demi-journée de travail, soit plus de 20 jours pour l’inspecteur du travail sur l’année 2003 au regard des données chiffrées précitées pour la 12ème section.

Cette évaluation du temps disponible pour l’activité de terrain est à mettre en perspective avec le nombre d’établissements que chaque agent est réputé contrôler dans le cadre des missions généralistes définies par l’article L 611-1 du Code du travail.


PRINCIPE :
RENFORCER LA CAPACITE D’EXPERTISE DE L’INSPECTION DU TRAVAIL


DOMAINE D’ACTION OBJECTIFS PROPOSITIONS


Sur le champ du risque chimique



permettre à l’agent de contrôle de repérer la composition et les risques entraînés par l’utilisation de produits chimiques, grâce à la mise en demeure d’analyse de produits prévue à l’article L231-7 du code du travail, qui renvoie, via l’article R231-55-3, à un arrêté qui n’a jamais été pris.
prendre l’arrêté permettant d’agréer des organismes chargés de l’analyse des substances chimiques
intérêt : l’it/ct est parfois démuni face à une préparation, particulièrement lorsqu’elle est fabriquée par l’utilisateur lui-même, puisqu’ il en ignore la composition et les effets, sans possibilité de recourir à des fiches de données de sécurité inexistantes.

Sur le champ du risque cancérogène/mutagène/
reprotoxique
- même objectif que le précédent, s’agissant de produits CMR, pour lesquels l’article R231-59 du code du travail, pris par application de l’article L231-7, renvoie à des organismes agréés, sans que l’arrêté permettant cet agrément ait été pris

- permettre à l’agent de contrôle de repérer sur un chantier BTP de réhabilitation ou de démolition la présence d’amiante, friable ou non, ou de plomb ( dans les peintures par exemple ), en mettant en demeure le maître d’ouvrage de faire procéder à des analyses
- - prendre l’arrêté permettant d’agréer des organismes chargés de l’analyse des produits CMR
intérêt : idem ci-dessus



- insérer dans la partie législative du chapitre V ; titre III, livre II ( dispositions applicables aux opérations de BTP ) un article autorisant l’it/ct à mettre en demeure, selon le même schéma que l’article L231-7, le maître d’ouvrage de recourir à un organisme agréé pour analyser la composition des produits ou substances, susceptibles de contenir de l’amiante ou du plomb
intérêt : trop souvent le repérage de la présence de l’amiante ( en dehors des flocages/calorifugeages/faux plafonds pour lesquels le diagnostic est obligatoire ), ou du plomb, ne se fait pas ou trop tardivement
L’ entreprise concernée par les travaux susceptibles d’exposer leurs salariés n’a souvent ni les compétences ni la surface financière suffisante pour se lancer sur un diagnostic, qui de plus à terme est susceptible de faire reposer sur elle-seule la charge financière du retrait de ces substances cancérogènes. Cette mesure permettrait d’augmenter sensiblement le nombre de chantiers de retrait de plomb ou d’amiante déclarés à l’inspection du travail.


Dans le secteur du BTP
- permettre à l’agent de contrôle de s’assurer que les matériels utilisés pour le levage de charge, tels qu’une grue, ou même simplement présents sur le chantier, sont stables et ne présentent pas de risques de renversement

- modifier l’article L233-5-2 du code du travail afin que l’it/ct puisse mettre en demeure le chef d’établissement utilisateur d’un équipement de travail, servant au levage de charges, de faire vérifier par un organisme agréé sa stabilité.
intérêt : il est difficile pour un agent, qui s’interroge sur la stabilité d’une grue d’obtenir des assurances sur le sujet, alors même que le risque pour les salariés ou l’environnement du chantier est réel.

Sur l’utilisation des équipements de protection individuelle



- permettre à l’agent de contrôle de s’assurer que les EPI utilisés par le salarié, notamment pour se protéger du risque de chute de hauteur, sont appropriés et adaptés au risque encouru.

- permettre à l’agent de contrôle de s’assurer que les EPI utilisés pour se protéger du risque chimique ou des risques liés à des produits CMR sont appropriés et adaptés.

- modifier l’article L233-5-2 du code du travail en prévoyant la possibilité de faire procéder, par mise en demeure, à la vérification de la conformité de l’EPI et/ou de la résistance de l’installation destinée à son usage, notamment le point d’ancrage ou la ligne de vie
intérêt : le recours aux EPI pour se protéger contre le risque de chute est appelé à se multiplier, notamment par application de la loi de 1993 sur la coordination SPS, qui impose au maître d’ouvrage de prévoir dès la conception de l’ouvrage, des mesures permettant la prévention des risques professionnels lors de l’entretien ultérieur de l’ouvrage. Ces mesures consistent souvent, pour la prévention des risques de chute de hauteur, en la pose de points d’ancrage ou de lignes de vie sur les bâtiments industriels, dont il est difficile de prévoir la résistance dans le temps.
La mise en demeure de vérification permettrait donc de s’assurer d’une part de la solidité résiduelle de dispositifs d’ancrage vieillissants, d’autre part de la conformité des EPI utilisés

- modifier l’article L231-7 du code du travail en prévoyant une mise en demeure permettant de connaître le caractère approprié, compte tenu de la nature et du degré de pollution, de l’EPI mis à disposition, notamment lorsqu’il s’agit de protections respiratoires
intérêt : les protections individuelles respiratoires sont souvent retenues lors de travaux ponctuels exposant le salarié à un risque chimique ou CMR, sans qu’il soit possible, sans mesure du degré de pollution et sans connaître la nature de la pollution., de savoir si l’EPI porté est ou non approprié.







PRINCIPE :
RENFORCER L’EFFICACITE DU CONTROLE DE L’INSPECTION DU TRAVAIL

DOMAINE D’ACTION
OBJECTIFS PROPOSITIONS

Dans le secteur du BTP



- assurer une meilleure hygiène des salariés sur les chantiers, en faisant peser cette obligation sur le maître d’ouvrage, qui est le seul, compte tenu de son pouvoir d’organisation et de sa vision globale du chantier, à pouvoir garantir de façon pérenne, la mise en place à disposition de l’ ensemble des travailleurs présents sur chantier, d’une base-vie sur chantier


- rendre le maître d’ouvrage garant de l’effectivité de la coordination Sécurité et Protection de la Santé, sur les chantiers de niveau II ou I, en introduisant la possibilité de lui notifier un arrêt de travaux, dès lors qu’il n’a pas désigné de coordonnateur SPS, ou qu’il n’a pas fait établir un plan général de coordination, contrairement aux prescriptions des articles L235-4 et L235-6 du code du travail, et qu’un risque sérieux d’atteinte à l’intégrité physique résulte de cette carence.

- autoriser l’it/ct à arrêter les travaux sur un chantier, dès lors qu’un équipement de travail utilisé pour le levage des charges n’est pas stable ( à rapprocher de la proposition faite plus haut permettant à l’it/ct de mettre en demeure le chef d’établissement de faire vérifier la stabilité de l’équipement de travail )
- introduire dans la partie législative du code du travail (chapitre V, titre III, livre II) un article permettant de mettre en demeure le maître d’ouvrage de prévoir les installations nécessaires à l’hygiène des travailleurs ( vestiaires, WC, réfectoires, voire douches lorsqu’il s’agit de travaux salissants les rendant obligatoires ) .
intérêt : cette mesure, qui rejoint la pratique sur nombre de chantiers importants, est la seule susceptible d’assurer un niveau d’hygiène satisfaisant. Faire reposer cette obligation sur chaque employeur est en effet illusoire, surtout dans le contexte actuel de sous-traitance en cascade, dès lors que l’on se trouve face à de petites structures, ou sur des interventions ponctuelles, qui ne permettront pas, compte tenu de la charge financière que représentent une location, d’installer les bungalows nécessaires

- introduire dans la partie législative du code du travail (chapitre V, titre III, livre II) la possibilité d’arrêter tous les travaux sur chantier, selon les mêmes modalités que celles prévues à l’article L231-12 du code du travail, dès lors que l’it/ct a constaté l’absence de désignation de coordonnateur SPS ou de plan général de coordination, et le risque sérieux qui en résulte pour la sécurité des travailleurs.
Intérêt : la sanction pénale aujourd’hui prévue n’est pas adaptée, du fait des délais de jugement, et le référé civil, s’il peut être utilisé, l’est de fait rarement, compte tenu de la complexité de la procédure civile. L’arrêt de travaux, immédiat et simple d’utilisation, répond parfaitement aux enjeux importants liés à la mise en œuvre de la coordination SPS et la condition de l’existence d’un risque sérieux permet de limiter son utilisation aux cas patents.

- modifier l’article L231-12 du code du travail pour y introduire un nouveau cas d’arrêt de travaux : l’absence de stabilité d’un équipement de travail servant au levage de charges, dès lors que son renversement est susceptible de créer un risque grave et imminent pour les travailleurs ou l’environnement du chantier.
Intérêt : de la même façon que pour l’absence de coordination SPS sur le chantier, il importe de réagir vite à une situation de risque de renversement d’une grue et l’arrêt de travaux est sans doute l’outil le plus adapté à la situation

Sur le risque mécanique
- permettre à l’it/ct d’arrêter les travaux dès lors que le salarié est exposé à un danger grave et imminent résultant de l’absence de protection de la partie travaillante ou non travaillante d’un équipement de travail, ce dont il résulte un risque de contact mécanique pour le salarié.

- modifier l’article L231-12 du code du travail pour permettre à l’agent d’arrêter les travaux sur un équipement de travail dépourvu de protection de sa partie travaillante ou non travaillante
intérêt : organiser le retrait immédiat du salarié d’une situation dangereuse créée par l’absence de protection des éléments tournants, coupants, … sur un équipement de travail. Il s’agit d’un risque aisément repérable et connu : on peut toutefois éventuellement envisager, pour atténuer l’émoi que cette mesure serait susceptible de soulever, de créer une étape préalable, consistant à mettre d’abord le chef d’établissement en demeure( sur la base de l’article R233-47 qu’il faudrait compléter) d’assurer la conformité de ses équipements, et n’autorisant l’arrêt de travaux que si la mise en demeure n’est pas satisfaite ; il conviendrait toutefois de prévoir un délai de réalisation court, compte tenu des risques encourus par le salarié.

Sur le risque cancérogène- mutagène- reprotoxique
- assurer l’efficacité de l’arrêt de travaux prévu au II de l’article L231-12 du code du travail ( exposition de salariés à certaines substances CMR au-delà des valeurs limites autorisées ), en prenant le décret prévu au V du même article, afin qu’en cas de constat d’une situation dangereuse résultant d’un dépassement de ces valeurs limites, l’it ou le ct puisse effectivement arrêter les travaux.

- prendre le décret prévu au V de l’article L231-12 du code du travail
intérêt : même si cet arrêt de travaux est certainement et de plus loin le plus compliqué et le moins probable, il est toutefois dommage de se priver d’un outil susceptible d’être utilisé dans certaines situations.

Sur une situation de risque résultant d’une organisation du travail défectueuse
- rendre efficace la mise en demeure du directeur départemental, telle que prévue à l’article L231-5 du code du travail, en prévoyant qu’à l’issue du délai imparti par la mise en demeure et en l’absence de mesures prises par le chef d’établissement pour faire disparaître la situation dangereuse résultant de conditions de travail dégradées…, l’it/ct peut arrêter les travaux.

- ajouter à l’article L231-12 du code du travail autorisant l’agent de contrôle à arrêter les travaux, l’hypothèse d’une situation dangereuse à laquelle le chef d’établissement n’aurait pas remédié malgré la mise en demeure du directeur départemental
intérêt : à l’heure actuelle, seules des sanctions pénales ( contravention ) sont prévues, ce qui ne saurait être satisfaisant. Le préalable de la mise en demeure, dans une situation où il n’existe pas de texte instaurant des obligations formelles, a le grand mérite de limiter les éventuelles contestations d’un arrêt de travaux portant sur une situation dangereuse résultant d’une organisation du travail défectueuse, car on peut supposer que la contestation interviendra à l’occasion de la mise en demeure ( recours hiérarchique ) et non ultérieurement.

Sur le risque électrique
- permettre une action immédiate de l’it/ct sur un risque de contact électrique avéré par la production d’un rapport de vérification électrique, auquel le chef d’établissement n’aurait pas donné suite, dès lors qu’il en résulte une situation de danger grave et imminent pour les salariés.
- modifier l’article L231-12 du code du travail pour y introduire la possibilité d’arrêter les travaux en cas de situation dangereuse, résultant d’un risque de contact électrique, direct ou indirect, dès lors que ce risque est identifié par le rapport de vérification électrique.
Intérêt : permettre une réponse immédiate de l’inspection du travail à une situation susceptible d’entraîner une électrisation, voire une électrocution, en introduisant la garantie préalable de l’existence d’un rapport de vérification électrique objectivant le risque.



RECAPITULATIF SYNTHETIQUE DES SUGESSIONS
ET PROPOSITIONS FORMULEES
AU COURS DES REUNIONS DES CHS REGIONAUX ET CTPR
Octobre 2004





1 - Cadre général

- Les pouvoirs publics doivent légitimer les actions de contrôle et mettre en valeur les moyens que la République a donné pour faire appliquer la loi.

- L’Etat doit être le garant de l’ordre public social, que doivent respecter, à travers le droit les agents de contrôle, les élus et les organisations patronales.


2 - Donner des moyens aux services de contrôle

- Doubler les effectifs de contrôle et le nombre de sections d’inspection du travail (mieux répondre à la demande individuelle et assurer une régularité dans la périodicité des contrôles, qui présenterait le double avantage d’une meilleure application du droit et d’une moindre dramatisation du contrôle).

- Unifier les services de contrôle


3 - Promouvoir le droit du travail et les contrôles contribuant à son application par :

3.1 - Une action en direction de la société

- mieux faire connaître les missions et l’activité de l’inspection du travail : campagne de communication nationale, éditions de plaquettes, de brochures, mettant en exergue les modalités d’intervention (libre accès, visite inopinée, contact avec les représentants du personnel…) ; intégration du droit du travail dans les programmes scolaires,

- créer des obligations nouvelles, telles que celles consistant à afficher dans l’entreprise les observations de l’inspecteur du travail,

- au niveau régional, définir une réelle politique du travail, avec un volet politique pénale et la faire connaître,

- renforcer les coopérations avec les services de santé au travail,

- au niveau local, multiplier les contacts avec les associations de chômeurs, les experts comptables, le bâtonnier, les parlementaires.


3.2 – Une action auprès des partenaires sociaux (niveaux régional et local)

- lettres
- contacts bilatéraux (administration/chaque organisation)
- contact systématique avec les organisations patronales après chaque incident de contrôle impliquant une entreprise de leur secteur d’activité,
- réunions périodiques (représentants des employeurs et des salariés) afin de présenter l’action de l’inspection du travail.


4 - Pratiques professionnelles

- Ne pas mettre en cause l’agent de contrôle, victime du contrôlé,

- Répondre à la demande individuelle, afin de ne pas exaspérer le public,

- Réexaminer la répartition des établissements sans privilégier la répartition + de 50 / - de 50 salariés

- Préparer les contrôles, et repérer les risques d’incident en fonction de la nature des investigations menées (travail illégal, filières d’immigration clandestine, nouvelle forme de délinquance économique) des types d’entreprise (certains chantiers, certaines boulangeries lors de contrôles de nuit, certains débits de boissons…) ou du moment du contrôle (nuit, dimanche…)

- Opérations collectives (foires exposition ou foires d’attraction par exemple) à structurer dans un plan d’intervention

- Pratique du contrôle à deux à mieux définir (quand, pourquoi, où, comment, qui ?)

- Equiper les agents de contrôle (ou les voitures de service) d’un téléphone portable avec numéro pré-enregistré (ce qui suppose, pour les contrôles de nuit et de week-end, une organisation de la réception des appels : astreinte pour la hiérarchie, un collègue ? liens avec gendarmerie, police ?)

- Tendre à une cohérence des interventions des agents sur un territoire donné (inter section) ; envisager des contrôles par secteurs d’activité

- Equiper les agents de contrôle de « bombes anti-agression »



5 - Mieux connaître les risques

- Distinguer les incidents de contrôle et les incidents dont sont victimes les autres agents des services (inspection FP, SCRE, COTOREP, accueil, etc…) : une égale attention doit être assurée à tous les fonctionnaires, mais l’obstacle à contrôle doit être traité en tant que tel

- Privilégier la démarche d’évaluation des risques et l’élaboration du document unique

- Mettre en place des observatoires des incidents (niveau régional ou départemental) ; la proposition vise surtout les services DR et DDTEFP et les services d’inspection du travail (agriculture, transport) mais prend, dans certains départements (Doubs, Jura, Somme, Yonne…) un caractère transversal à la fonction « contrôle » assurée par l’ensemble des services de l’Etat. Quelle que soit la dimension retenue, est soulignée l’importance de l’ingénierie préalable à la mise en place de l’observatoire (pourquoi ? par qui ? quels faits et quelles analyses ? quelle exploitation ?…)

- Mettre en place des « registres d’incidents » (et accompagner son utilisation : communiquer sur son existence, en tirer des enseignements permettant l’action…)

- Concevoir des fiches d’information, se substituant au registre

- Procéder à des études sur le stress dans les services


6 - Rôle de la hiérarchie en cas d’incident

- Se mettre en capacité d’être informée de tout incident

- Inspirer confiance : être à l’écoute, manifester son soutien, déculpabiliser (l’agent victime vit souvent les faits comme un échec personnel)

- Organiser la gestion de l’incident :

 avant l’incident : mettre à disposition des agents une fiche indiquant ce qu’il faut faire en cas de situation difficile ; avoir conçu et publié un guide des procédures ; avoir conclu un protocole d’intervention avec les services de police et de gendarmerie et entretenir les relations avec les autorités dirigeant ces forces de l’ordre : être en relation confiante et constructive avec le parquet ; exercer une vigilance offensive au quotidien, sur les discours ou articles de presse décrédibilisant le contrôle ou les fonctionnaires

 après l’incident : veiller à ce qu’il y ait déclaration d’accident de service ; s’assurer que les besoins de l’agent (appui juridique, appui psychologique) sont pourvus ; systématiser les plaintes et le suivi avec le parquet (tolérance O) ; assurer la liaison avec la MICAPCOR et avec la cellule régionale d’appui

 définir avec l’agent les meilleures conditions de son retour dans l’entreprise où il a subi un outrage, un obstacle.


7 - Dispositif(s) d’appui et d’écoute

- Assurer le fonctionnement optimal de la cellule d’appui : promouvoir son existence, indiquer comment elle fonctionne, rompre avec son image originelle privilégiant l’intervention dans le cas de mise en cause de la responsabilité personnelle des agents, faire apparaître son accessibilité et pousser à son information systématique, affirmer un droit à la confidentialité pour les agents qui le souhaitent

- Mobiliser la médecine préventive (visite périodique, mais intervention ponctuelle en cas de besoin) ; associer les assistantes sociales

- Saisir le CHS ou les commissions locales de sécurité, ou les groupes ad hoc constitués dans certains départements

- Mettre en place des groupes de parole, avec intervenants extérieurs et sans la hiérarchie

- Conclure des conventions avec des associations spécialisées dans l’aide aux victimes, ou le soutien psychologique


8 - Mettre en place une politique de prévention

- Définir « le droit de retrait »

- Intégrer la dimension « sécurité des agents » dans la mise en œuvre de la charte Marianne

- Aménager les locaux afin de prévoir la sécurité des agents (configuration de l’accueil, possibilité de sortir pour l’agent menacé, liaison avec bureaux voisins ; système d’alarme ou d’alerte, le plus discret et le plus efficace possible)

- Ne pas permettre la réception de public dans un bureau isolé (y compris dans les permanences en mairie)

- Prendre des dispositions particulières pour les sections détachées (ou pour les services d’inspection du travail des transports), par nature isolées

- Sécuriser la circulation des personnes ne faisant pas partie du service


9 - S’engager dans une politique de répression

- Privilégier la comparution immédiate

- Ecarter toute possibilité de recours à la procédure « plaider coupable »

- Explorer toutes les possibilités d’intervention de l’administration dans la procédure (intervention de l’agent judiciaire du trésor, partie civile quand elle est juridiquement possible)

- Rechercher toute possibilité d’implication de la hiérarchie à l’audience

- Intervenir auprès du Garde des Sceaux pour sensibiliser les magistrats du siège

- Développer les sanctions administratives

- Exclure du bénéfice des aides publiques les entreprises poursuivies pour obstacle ou outrage


10 - Renforcer les actions de formation

- Adapter les formations initiales (toutes catégories), continues et de mobilité, concernant les agents devant exercer des activités de contrôle et d’accueil

- Modules de formation – sensibilisation sur la notion de risques et sur la prévention (Réf. DD Lille-Nord et Rhône)

- Donner des grilles de lecture des situations à risques et apprendre à agir ou réagir en cas de violence verbale ou physique





PERSONNES CONSULTEES




1 – Cabinet du Ministre
Monsieur Eric AUBRY, directeur de Cabinet du Ministre délégué aux relations du travail
Madame Sophie BOISSARD, directrice adjointe de Cabinet
Monsieur Serge VO-DINH, conseiller technique


2 – IGAS
Madame Marie-Caroline BONNET GALZY
Monsieur Roger LINSOLAS
Madame Emmanuelle JEANDET MENGUAL
Monsieur Jacques ROUX
Monsieur François BRUN
Monsieur Jean-Pierre CHASSINE
Monsieur Guy CLARY
Madame Marie-Ange DU MESNIL DU BUISSON
Monsieur Jean ROIGT
Monsieur Daniel LEJEUNE
Monsieur Benjamin JOLY
Madame Stéphanie SEYDOUX


3 – Administration centrale

3.1 – DAGEMO
Monsieur Jean-René MASSON
Madame Martine NOULIN
Madame Odile LAUTARD (MICAPCOR)
Monsieur BORIES (MICAPCOR)
Monsieur LE MAO (MICAPCOR)

3.2 DARES
Madame Annie FOUQUET
Madame Patricia COURSAULT

3.3 – DGEFP
Madame Catherine BARBAROUX
Monsieur Stéphane CLEMENT
Monsieur Jean-Louis FORNARO

3.4 – DRT
Monsieur Jean-Denis COMBREXELLE
Madame Monique LARCHE MOCHEL
Monsieur Marc BOISNEL
Monsieur Michel RICOCHON
Monsieur Robert PICCOLI
Madame Christiane GIRAUD
Madame Françoise LE GAC
Monsieur Jean-Louis DAYAN
Monsieur Daniel CHAPU


4 – ANACT
Monsieur Henri ROUILLEAU


5 – Universitaires
Monsieur Philippe AUVERGNON
Monsieur Jean-Emmanuel RAY
Madame Annie THEBAUD MONY
Monsieur Pierre-Yves VERKINDT

6 - Personnes qualifiées
Monsieur Jean COURDOUAN, ancien directeur ADMITRA BIT
Madame Catherine d’HERVE, DR ANPE Lille
Monsieur Jean-Paul POUMEROUX, chargé de mission auprès du DG DCCRF
Monsieur Claude Emmanuel TRIOMPHE, UET
Madame Sylvie SIFFERMAN, UET
Dr Jean-Marie DE CONINCK, commission européenne
Monsieur Paul WEBER, CHRIT

Réseau ARM
Madame Céline BERNARDI, inspectrice du travail
Madame Marianne RICHARD MOLLARD, directrice adjointe
Monsieur Laurent PINA, inspecteur du travail

7 – Partenaires sociaux
Monsieur BURBAN, UPA
Monsieur TELLIER, MEDEF
Monsieur VEYSSET, CGMPE
Monsieur LECANU, CFE-CGC
Monsieur DONNEDU, Madame DENOYER, Messieurs MASSON et ROYER, CGT
Messieurs URBANIAK et SPENCER, CGT-FO
Monsieur JOUAN, Madame THERY, CFDT
Monsieur DINTINGER, CFTC
Monsieur MAIRE, UNSA
Monsieur ROUGE, UR CGT-FO Languedoc Roussillon


8 – Organisations syndicales de Ministère
CFDT
Madame MAYOUX
Monsieur ABED
Monsieur BROUARD
Monsieur LAISNE
Monsieur SCHALCHLI

CFTC
Madame TURPEAU

CGT
Madame DENOYER
Madame GUYOT
Monsieur GIRARDET

FO
Monsieur BOULY
Monsieur DEBLIQUY
Monsieur DIAZ
Monsieur DUCOURANT
Monsieur KLOETZEN
Monsieur MARICHEZ
Monsieur PELLETIER
Monsieur PEROU
Monsieur RACT MUGNEROT

SNUTEF
Madame BARON
Monsieur BAUDET
Monsieur BEAL RAINALDI
Monsieur MARECHAU
Monsieur MERIAUX

SUD TRAVAIL
Madame DEVILLERS
Monsieur SINIGAGLIA
Monsieur VERGEZ

UNSA
Madame PINEAU
Monsieur ZEAU






9 - DRTEFP
Madame Marie-Laure BALMES, DRTEFP Nord Pas de Calais
Madame Denise BERNOLLIN, DRTEFP Champagne Ardennes
Monsieur Marc BIEHLER, DRTEFP Ile de France
Monsieur Yves CHAMBARLHAC, DRTEFP PACA
Monsieur André GUILLON DRTEFP Bourgogne
Monsieur Jacques MOREL, DRTEFP Languedoc Roussillon
Monsieur Jean NITKOWSKI, DRTEFP Aquitaine
Monsieur Yves POIRIER, DRTEFP Lorraine
Monsieur Didier REY, DRTEFP Corse
Monsieur Robert SALOMON, DRTEFP Auvergne
Monsieur Guy SEGUELA, DRTEFP Poitou Charente
Monsieur Vincent LEMAIRE, DTEFP Guadeloupe
Madame Véronique BIDET, DRTEFP Bourgogne
Monsieur Georges BRUNET, DRTEFP Rhône Alpes
Madame Anaïck LAURENT, DRTEFP Ile de France
Monsieur Marc- Henri LAZAR, DRTEFP Franche Comté
Monsieur Jean- Paul MIMEUR, DRTEFP Bourgogne
Monsieur Roger MONCHARMONT, DRTEFP Languedoc Roussillon
Monsieur Jean-François PERRAUT, DRTEFP Aquitaine


10 – DDTEFP
Monsieur Bernard BAILBE, DDTEFP Côte d’Or
Monsieur Michel DELARBRE, DDTEFP Bouches du Rhône
Monsieur André CANO, DDTEFP Hérault
Monsieur DOLE, DDTEFP Nord Lille
Madame Marie DUPORGE, DDTEFP Mayenne
Madame Danielle GIUGANTI, DDTEFP Haute Corse

Monsieur Alain MARTINON, DDTEFP Gard
Monsieur Jean-Claude MIQUEL DDTEFP Dordogne
Monsieur Laurent VILBOEUF, DDTEFP Charente
Monsieur Bernard ALIGNOL, DDTEFP Gard
Monsieur Eric BAYLE, DDTEFP Rhône
Madame Muriel GAUTIER, DDTEFP Bouches du Rhône
Madame Monique GUILLEMOT RIOU, DDTEFP Finistère
Monsieur Hervé LANOUZIERE, DDTEFP Rhône
Monsieur Jean POPOWYCZ, DDTEFP Dordogne
Monsieur Vincent TIANO, DDTEFP Bouches du Rhône
Monsieur Jean-Marie VIMEUX, DDTEFP Nord Lille
Monsieur Pierre GASSER, DDTEFP Yonne
15 agents DDTEFP Nord Lille
5 contrôleurs région Languedoc Roussillon
3 inspecteurs région Languedoc Roussillon
11 agents de contrôle Dordogne (travail, agriculture, transports)







12 – Inspection du travail des transports
Monsieur Jean-Marc GERLIER, inspection générale
Monsieur Guy DUCASSE, direction régionale transport
Monsieur Serge VARENNES, inspection générale


13 – Inspection du travail de l’agriculture
Monsieur Joseph DOMPS, DGFAR
Monsieur Michel BOUE, SDITEPSA Dordogne


14 – INTEFP
Dominique VANDROZ, directeur des études
groupe projet « santé au travail » (Jean-Daniel CRISTOFORETTI, Patricia BARTHELEMY, Mireille CRENO CHAUVEAU, Thomas KAPP, Jérôme N’GUYEN, Pascal ROIG)



Jean BESSIERE Directeur de l’Institut national du travail de l’emploi et de la formation professionnelle
Ecrit par sudiste, le Lundi 17 Janvier 2005, 09:15 dans la rubrique "Actualité".